Le décrochage scolaire guette.
L’année scolaire aura été exceptionnelle à plus d’un titre. La Pandémie de la Covid-19 a, en effet, contraint le ministère de l’Education à chambouler le calendrier scolaire en instaurant un nouveau rythme dès le début de la saison et en réduisant le nombre d’élèves par classe pour limiter le risque de contamination en milieu scolaire. Dès le démarrage du premier trimestre, ce nouveau rythme scolaire a déstabilisé des élèves non habitués à alterner des jours de cours et des jours sans, ce qui a eu, pour effet, de refroidir leur motivation.
La discipline de certains et la volonté des enseignants d’achever les programmes dans les délais et de veiller à ce que les notions enseignées et les contenus des chapitres soient bien assimilés par les élèves n’empêcheront pas le fossé de se creuser entre les élèves sérieux et bûcheurs, qui ont recours aux cours particuliers pour être à jour, garder le niveau et rattraper leurs lacunes, et les moins assidus, qui, non seulement, n’ont pas les moyens de suivre des cours particuliers, mais qui, plus est, passent les journées où ils n’ont pas cours à ne rien faire au lieu de réviser.
Au rythme scolaire par alternance qui a impacté négativement le rendement des élèves est venue s’ajouter la grève des surveillants et des surveillants généraux qui a accentué le flottement au sein du milieu scolaire, perturbant considérablement la bonne marche de la vie scolaire. Des jours durant, des élèves ont profité de l’absence du registre de présence tenu par les surveillants pour faire l’école buissonnière sans réfléchir ni s’appesantir sur les conséquences désastreuses de ce comportement irresponsable. C’est avec le retour progressif à la normale qu’ils se rendront compte de l’écart qui a fini par se creuser avec leurs camarades plus studieux.
Le nombre d’élèves absents par classe a augmenté
Dans l’incapacité de suivre le rythme scolaire, s’ensuivent alors les absences et la présence va devenir sporadique malgré le retour du registre de présence dans les classes. Selon un enseignant dans un collège du Centre-Ville, suite à la grève des surveillants, le taux d’absentéisme des élèves a, en effet, considérablement augmenté par rapport à l’année dernière. «J’ai l’habitude de voir chaque année des élèves s’absenter dans ma classe, mais cette année le nombre est plus élevé que d’habitude».
Aujourd’hui, c’est le décrochage scolaire qui guette. Plutôt que de rattraper leur retard, des élèves ont déjà largué les amarres pour aller grossir les rangs de ceux qui ont décroché en cours de route. C’est le difficile revers de la médaille du nouveau rythme scolaire mis en place depuis le début de la pandémie et qui, s’il a été réfléchi pour limiter les contaminations dans les établissements, a mis à nu les failles profondes d’un système d’éducation à deux vitesses qui a fini par laisser sur le bord de la route les élèves issus des quartiers et des zones défavorisés les moins nantis (pas d’accès à l’enseignement à distance, manque de moyens pour suivre les cours de rattrapage…). Au regard du nombre élevé d’absences cette année, ils seront probablement nombreux l’année prochaine à ne pas retourner sur les bancs de l’école préférant passer à autre chose plutôt que de reprendre leurs études scolaires.
En plus des répercussions sociales et économiques, la pandémie de la Covid-19 aura finalement contribué à donner un coup d’accélérateur au décrochage scolaire, rendant la tâche plus difficile à des décideurs qui ne sont toujours pas arrivés à trouver des solutions efficaces à ce fléau qui représente un véritable casse-tête à l’échelle nationale.