Les régions intérieures souffrent depuis des années d’un déséquilibre caractérisé par un tissu industriel faible et une infrastructure de base presque absente sous prétexte que ces régions sont agricoles. D’où la déception des jeunes qui y habitent et qui ne disposent d’aucune ressource.
Le développement régional constitue un élément important pour faire de la Tunisie un vrai hub d’investissement et un site où il fait bon vivre partout où l’on va. C’est que la situation actuelle de nos régions laisse à désirer, hormis quelques régions du littoral qui ont bénéficié de certains avantages (réalisation d’infrastructure de base, de ports et d’aéroports, d’hôtels et d’un tissu industriel). Certaines régions de l’intérieur ne sont pas encore bien loties en Internet, en infrastructure de base et en équipements collectifs dans un monde qui a banalisé la technologie de pointe et qui aspire à faire toujours plus. Le déséquilibre régional a la peau dure et on n’a pas trouvé encore une solution tangible de nature à renverser la vapeur.
D’ailleurs, le webinaire organisé le 1er avril 2021 par la commission numérique de la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (Ctfci), en collaboration avec la Fondation Tunisie pour le développement sur le thème : «Développement régional, nouveau levier pour la Tunisie», a permis de donner un éclairage sur une situation régionale confuse. Malgré les avantages contenus dans la loi de l’investissement, les investisseurs aussi bien locaux qu’étrangers ne se bousculent pas devant le portillon pour créer leurs projets. Au contraire, on assiste à des délocalisations de certaines unités.
Un vrai gisement
Pourtant, les régions disposent d’un vrai gisement constitué de ressources humaines bien formées et compétentes mais gagnées, paradoxalement, par le doute et le désespoir. En fait, plusieurs jeunes diplômés dans ces régions attendent depuis des années de trouver un emploi correspondant à leur profil, en vain. Le tissu industriel est peu développé et l’agriculture occupe une place de choix dans les régions du Nord-Ouest, par exemple. Or, peu de jeunes veulent s’adonner au travail de la terre préférant montrer leur compétence dans le domaine industriel et technologique. C’est pour cela que plusieurs habitants des régions intérieures émigrent vers les régions côtières à la recherche d’un emploi dans l’industrie ou l’hôtellerie.
D’où la nécessité pour les intervenants publics d’orienter leur action vers l’amélioration des compétences via une formation complémentaire adaptée aux besoins des entreprises afin de permettre à ces jeunes de s’intégrer dans la vie active. A ce niveau, se pose un autre problème non moins grave qui concerne le système d’enseignement et de formation inadaptée aux besoins de l’économie et des entreprises. La réforme entamée pour rectifier le tir a marqué le pas et n’a pas donné encore les résultats escomptés.
Le financement fait défaut
Serge Degallaix, ancien ambassadeur de la France en Tunisie, a estimé que « malgré la persistance de grandes disparités entre les régions et d’un chômage endémique, notamment parmi les jeunes diplômés, l’important consiste à créer une mécanique qui permet à ces régions de se développer, de rayonner et d’exploiter de façon optimale les potentialités disponibles ». Depuis des années, les autorités publiques ont promis de faire de ces régions des pôles de développement rayonnant sur les autres régions, mais les résultats sont peu probants, même si on a réalisé des pôles de compétitivité dans certains secteurs économiques comme le textile-habillement, l’agroalimentaire et autres.
Le pire est que les jeunes compétences n’ont pas un accès facile au financement pour lancer leurs projets. Certaines initiatives ont été mises sur les rails en fournissant des ressources financières sous forme de crédit aux jeunes. Il s’est avéré que certains projets ont fait long feu, même si ces jeunes ont bénéficié d’un accompagnement et d’un soutien durant tout le processus de création desdits projets.
Le développement régional mérite une réflexion en profondeur pour sauver ces jeunes de la déprime et de l’isolement. Ces jeunes sont prêts à prendre le risque pour émigrer clandestinement vers l’Europe. Le temps est venu pour donner plus d’importance à ces régions qui sont source de richesses dans la mesure où elles fournissent les produits agricoles, le pétrole, le phosphate et d’autres minéraux.