Le rapport de la Cour des comptes avait mis à nu des fonds détournés et d’autres dépenses excessives injustifiées, ce qui a alourdi le fardeau de l’Unat, désormais surendettée.
Depuis des mois, voire des années, l’Union nationale des aveugles de Tunisie (Unat) s’enlise dans une situation financière et administrative inextricable, dont seul le personnel avait payé un lourd tribut. Soit, « des affaires louches » et des malversations manifestes à l’origine d’une crise interne persistante. « 45 mille non-voyants continuent à vivre dans la misère, au vu et au su du ministère des Affaires sociales », ainsi alerte, dans une conférence de presse, tenue hier au siège du Snjt à Tunis, le président de l’Union régionale de la Manouba, Ali Laâouini, accompagné de quatre de ses collègues dont l’adhésion à l’Unat fut injustement gelée pour avoir porté plainte contre le confident de la justice désigné à la tête de l’Union.
Pris à témoin, ils ont fait état de corruption. Rapport de la Cour des comptes à l’appui, M. Laâouini a dit ce qu’il avait sur le cœur. L’homme a dressé un bilan financier peu reluisant, fondé sur des chefs d’accusation qui pèsent sur ledit confident de la justice. Celui-ci, révèle-t-il, avait usé de son pouvoir pour faire ce que bon lui semble, loin de tout contrôle. Il a dérogé à la règle et dépassé son mandat de trois ans, suite à un soi-disant congrès électif jugé illégal. Ce qui fait que, depuis 2013, l’Unat n’arrive pas à s’en sortir. A l’époque, ses ressources ont avoisiné 4 millions de dinars. Un chiffre d’affaires qui, en si peu de temps, aura été revu à la baisse, soit quatre fois de moins (583 mille dinars en 2017). Alors que les donations publiques versées à l’Union au titre de 2011-2017 ont été estimées à plus de 1,8 million dinars. De même, les ressources des unions régionales ont été, au cours de la même période ou presque, de près de 2 millions dinars. Cela dit, les comptes ne sont pas bons. A preuve, l’Unat se dote, à elle seule, de 44 comptes bancaires et postaux, tandis que les déclarés ne dépassent pas neuf au total. Y a-t-il anguille sous roche !
L’Union mal gérée et surendettée
Par ailleurs, à l’en croire, le rapport de la Cour des comptes avait mis à nu d’autres dépenses excessives injustifiées, ce qui a alourdi le fardeau de l’Unat. Elle est désormais surendettée, avec 172 mille dinars de dettes contractées en 2016, d’autant qu’elle ne pouvait plus payer ses contributions sociales estimées à plus de 1, 2 million dinars. « Les biens propres de l’Union (voitures, lots de terrain et bien d’autres équipements) ont été discrètement vendus », révèle Khmaies Sahbani, vice-président de l’Unat qui, à force de s’indigner, a été mis au frigo. Sa collègue Zaâra Ben Jeddou, présidente de l’Union régionale de Gafsa, s’est étalée sur les dépassements commis par le confident de la justice tout au long de son mandat à la tête de l’Unat. « Cette responsable n’a jamais respecté les lois organisant l’Union des aveugles », accuse-t-elle.
Crise sans précédent
« L’Unat est au bord de la faillite », déplore, ému, Lotfi Tounsi, président de l’Union régionale de Tunis, indiquant qu’il s’agit là d’un état des lieux jamais vécu. Il a mis le ministère des Affaires sociales à l’index, l’accusant d’être impliqué dans cette crise de gestion sans précédent. A ses dires, il y a eu des cas de corruption à peine voilés. Et de signaler qu’il existe aussi d’autres dépassements dangereux. « En poursuivant en justice un responsable judiciaire à la tête de l’Unat, on risque de n’avoir plus droit à la justice», craint-il.