Dans cet entretien, M. Ahmed Habib Idir nous parle des examens conduisant à l’octroi de diplômes de musicien, du soutien à la production, mais aussi de l’importance de promouvoir notre identité musicale.
Les musiciens sont les plus touchés par la crise du covid et ses conséquences, d’autant plus que le ministère, ces dernières années, ne leur subventionne pas beaucoup de spectacles. Y a-t-il un plan prévu pour les soutenir ?
Oui malheureusement, depuis mars 2020, à cause de la crise sanitaire, les musiciens et les artistes en général sont quasiment au chômage. Il y a eu les mesures d’aide en urgence déployées par le ministère des Affaires culturelles en mai 2020 et pendant la deuxième vague de la pandémie en décembre de la même année. Mais ces efforts restent insuffisants, compte tenu des dizaines de milliers de professionnels, voire des centaines de milliers, toutes disciplines artistiques confondues. Le ministère des Affaires culturelles ainsi que les établissements qui lui sont référés ont tenté tout au long de la pandémie de trouver des solutions pour dénouer cette situation. Citons le retour du Festival de la chanson tunisienne et bien d’autres événements musicaux partout dans les régions. Le département de musique et de danse a contribué par l’achat de spectacles et des performances musicales et chorégraphiques pour des évènements et manifestations culturelles qui ont eu lieu dans plusieurs régions du pays. Cependant, cette période a été caractérisée par de nombreuses interruptions des activités artistiques et culturelles. A noter également le soutien des artistes à travers la promotion ou la subvention de certains événements culturels basés sur la diffusion en streaming.
Pour ce qui est de l’aide à la production, il y a eu une commission, mais où en sont les choses ?
La commission d’aide à la création artistique et littéraire a communiqué ses résultats pendant le mois de Ramadan et les artistes, dont le soutien a été approuvé, viennent de compléter les procédures et de signer les accords-cadres pour obtenir la première tranche du budget de financement alloué à leur projet.
On croit savoir que ces dernières années, le ministère ne soutient que la production d’une chanson et non plus d’albums en entier. Pourquoi ?
Le Département de la musique et de la danse soutient une ou plusieurs œuvres musicales, compte tenu du budget qui lui est alloué à cet effet, mais devant l’évolution qu’on connaît et qui a vu la production musicale passer de l’ère de l’album audio au clip vidéo. Des sociétés de production et de distribution d’albums et de CD ont quasiment disparu de notre pays comme «Soka, et Phony…» qui ont été remplacées par «Youtube» et «Deezer»… L’artiste a dû s’adapter à cette nouvelle génération de plateformes numériques de diffusion. A ne pas oublier l’évolution du coût de la réalisation d’une chanson du fait que les prix du matériel et des cachets des artistes et des techniciens ont doublé
En 2019, il y a eu le projet d’accorder des cartes professionnelles à honorifiques sous le titre de «Artiste distingué», puis, on n’en a plus entendu parler.
En effet, il y a eu cette initiative qui allait se concrétiser, mais le ministère a cru bon de patienter jusqu’à ce qu’on trouve une assise juridique, d’autant plus que les associations professionnelles étaient majoritairement contre.
Qu’en est-il pour les examens conduisant à l’octroi de diplômes de musicien dans ces conditions de crise et de confinement ?
En 2020, le diplôme de la musique arabe ainsi que le diplôme de la maîtrise d’instrument musical ont été reportés et pour cette année, le ministère a appelé les candidats à passer les épreuves le 8 septembre et les jours qui suivront. Nous visons à y parvenir et nous espérons que la situation sanitaire que traverse notre pays ne nous empêchera pas d’accomplir cette tâche dans les délais qui lui sont fixés. D’autre part, j’invite les journalistes et les médias audio et visuel à se joindre aux efforts déployés par le ministère et le soutenir, à promouvoir la musique «identitaire» si j’ose dire, à améliorer le niveau et raffiner les goûts. L’art est un message et un moyen qui va transmettre notre identité tunisienne pour les générations futures. Cela dit, je continue à croire qu’il y a trois piliers essentiels pour la réussite: les droits d’auteur des musiciens qui restent encore bafoués, un média consacré essentiellement à la culture et je parle d’une chaîne de télévision par exemple quantique, la création d’un fonds national qui englobe tout le patrimoine musical et qui soit accessible à tous les intéressés, chercheurs, journalistes, etc.