Se maintenir à flot, coûte que coûte. C’est le défi auquel est confrontée la classe moyenne tunisienne face à la dégradation du pouvoir d’achat et de la situation socioéconomique. Depuis des années, le fossé se creuse dangereusement entre revenus salariaux et pouvoir d’achat. De même, les prix à la consommation n’ont cessé de progresser sous l’effet d’une inflation quasi permanente couplée à une dérive continue du dinar. Le différentiel entre les salaires et les prix est aujourd’hui si grand qu’il a totalement laminé le pouvoir d’achat des Tunisiens.
De ce fait, le pouvoir d’achat des Tunisiens en sera affecté de manière grave et durable, dans un contexte de crises multidimensionnelles qui font craindre le pire. Pour réduire l’acuité du problème, le Président de la République a appelé récemment à la baisse des prix des produits de consommation de base. Plusieurs organisations nationales (Utica, ODC…), syndicats, grandes surfaces et autres ont répondu à cette initiative en affichant des réductions pour certaines denrées alimentaires de base.
Ce soutien, qui sera apporté aux prix de certains produits de première nécessité, ne suffira pas à contenir l’inflation dans une proportion acceptable, tant l’envolée des prix affectera tout le panier de produits auxquels se réfère l’INS pour calculer les taux d’inflation. Selon les indicateurs du mois de juillet 2021, le taux d’inflation a augmenté fortement pour passer à 6,4% après un taux de 5,7% le mois précédent et une stabilité à 5,0% durant les deux mois d’avant. Cette importante hausse est principalement due à l’accélération du rythme des augmentations des prix des produits alimentaires (8,0% contre 7,2% en juin).
Par ailleurs, les prix à la consommation ont augmenté de 0,9%. Ceux des produits alimentaires ont augmenté de 0,5% après un repli de 0,7% le mois précédent. Cela est dû à la hausse des prix des volailles de 2,9%, des viandes ovines et moutons vivants de 1,6% (en lien avec la fête de l’Aid Idha), mais aussi à la hausse des prix des fruits et légumes frais de 0,9%.
Ainsi, pour éviter la grogne sociale, le Président de la République a affirmé qu’il s’attellerait à faire le maximum pour mettre en place des réformes et améliorer les conditions de vie à une période où la population est fortement appauvrie, nonobstant les défis économiques auxquels nous sommes confrontés.
La classe moyenne se rétrécit
La crise sociale de ces dernières années a mis en avant un acteur économique souvent oublié : le consommateur. Bien que le cadre juridique et réglementaire de protection du consommateur existe, il reste dans les faits très peu appliqué, et le citoyen n’est pas assez protégé contre les pratiques frauduleuses de certains fournisseurs, circuits de distribution … le constat est mitigé et le contrat de la protection effective du consommateur, loin d’être rempli.
Dans le dernier baromètre d’Emrhod Consulting (juin 2021), 78 % des personnes enquêtées pensent que la situation économique se détériore alors que 76 % ont déclaré avoir plutôt peur du covid-19. En effet, la pandémie du covid-19 n’a fait qu’aggraver la situation économique en Tunisie, déjà en berne depuis 2011. L’envolée des prix, l’inflation, le chômage, les pertes d’emplois et l’endettement ont eu des retombées lourdes surtout sur la classe moyenne tunisienne et d’autres couches vulnérables de la société, ces dernières années. Le pouvoir d’achat des Tunisiens en général a régressé de 4% environ entre 2011 et 2018 et la classe moyenne s’est rétrécie et a perdu 40% de son pouvoir d’achat.