A vrai dire, il n’y a pas cette adhésion attendue à l’égard de la baisse des prix. Il y a les récalcitrants ou ceux qui acceptent à contrecœur. D’autres jouent le jeu en concédant des baisses insignifiantes.
Jusqu’à preuve du contraire, le Tunisien n’a rien vu de palpable au niveau de l’application des mesures appelant les divers acteurs économiques à opérer des baisses dans les prix. Tout juste si l’on entend parler d’une petite réduction de … 5 % par-ci par-là.
Cercle vicieux
Pour le citoyen tunisien, ces agissements dilatoires montrent la mauvaise volonté de nombreux intervenants dans le monde du commerce de mettre en œuvre des mesures qui ne leur sont pas favorables. Ils ne sont pas prêts à lâcher un pouce de terrain. Chacun y va de son explication. Selon certains, de telles dispositions constitueraient des sacrifices très importants puisqu’ils seront faits unilatéralement. Pour eux, il faut impliquer toute une chaîne d’opérateurs pour réaliser un tel objectif. Les baisses devraient commencer en amont et concerner des réglementations douanières en lien avec les taxes, les coûts des matières premières entrant dans la fabrication des produits de consommation, etc.
Pour les œufs ou les viandes, par exemple, on invoque les prix des produits de nutrition animale. En somme, on nous fait pénétrer dans un cercle vicieux pour nous persuader que de telles réductions ne sont pas des solutions applicables dans les conditions actuelles.
Même si on suppose que ces arguments ont une certaine logique, on ne peut prendre pour argent comptant les idées qui soutiennent qu’il y a des sacrifices de la part de ceux qui les consentent. Offrir des baisses symboliques de 5% (et pour une période limitée) serait-ce considéré comme un sacrifice ?
L’eau : un commerce juteux
Si on prend le cas de l’eau qu’on appelle minérale, une telle baisse semble ridicule. Tout simplement parce que son coût actuels est exorbitant. D’ailleurs, ce marché laisse planer beaucoup de doutes et l’on aimerait qu’il y ait une véritable réorganisation de ce secteur. L’eau de la Sonede doit bénéficier de plus d’intérêt pour devenir plus buvable et ne plus laisser le champ libre devant ces marchands qui nous refilent des produits dont on ne sait vraiment pas la provenance. En effet, il y a des circuits parallèles qui naissent tout le temps sans que l’on comprenne s’il s’agit d’un commerce contrôlé ou anarchique et, par conséquent, clandestin. Et on tend, bien entendu, vers la seconde thèse. Il n’y a qu’à voir ces nombreuses camionnettes anonymes chargées à ras bord de packs d’eau en bouteilles décharger leurs cargaisons dans des dépôts douteux. En revenant quelques années en arrière, on note à quelle vitesse les prix des bouteilles ont augmenté. Et, aujourd’hui, on ne manque pas d’être sidéré de voir que des sociétés nous proposent des promotions «inouïes». Elles nous offrent des baisses de plus de 40% ! C’est ainsi que le pack de 6 bouteilles est cédé à 7d500 au lieu de 11d250. Autrement dit, la bouteille revient à 416 millimes au lieu de 625. Si un tel prix (416 millimes) est possible, pourquoi ne pas l’adopter ? Ne serait-il pas le plus proche du prix réel ?
Qui croit aux soldes ?
Quant à nous parler de soldes, personne n’y croit plus. Les commerçants ont beau afficher des discounts alléchants de plus de 70%, le client n’est pas au rendez-vous. La question n’est, donc, pas du côté du client. C’est, avant tout, une question de crédibilité. Le consommateur n’a plus confiance en le commerce tunisien. Ce dernier n’a pas su conquérir le public et su bien utiliser les outils mis à sa disposition. Nos commerçants sont, malheureusement, perçus par le consommateur comme des profiteurs qui ne cherchent que leur propre intérêt. Ils sont prêts à tout faire, y compris à emprunter des voies illégales.
Ce comportement est en train de se généraliser car, même les commerçants honnêtes, commencent à se laisser faire à cause de la concurrence déloyale que leur livrent d’autres opérateurs sans scrupules. Si on touche, maintenant, au secteur des fournitures scolaires (c’est, justement, l’heure d’en parler), on s’étonne du communiqué de la chambre syndicale de ce secteur. Celle-ci annonce une réduction de 5% sur les produits non subventionnés. En se mettant à la place des parents, on ne peut que rester sur sa faim. Vu les prix affichés dans toutes les librairies, un tel taux ne peut avoir aucune incidence sur la bourse des ménages. C’est une baisse insignifiante. Les cahiers non subventionnés sont vendus à des prix incroyables et quelles que soient les baisses consenties (réelles ou artificielles) elles n’arrangeraient en rien le budget des familles tunisiennes.
Coût des manuels
Il suffit, simplement, de voir le coût des manuels scolaires pour s’en convaincre. Et là on sait que ce sont des produits subventionnés. Si on calcule le montant des achats en manuels scolaires pour chaque élève pour chaque niveau scolaire, on verra qu’il y a un sacré budget à mobiliser. Les autres affaires (sacs à dos, chaussures, fournitures scolaires diverses, tabliers …) atteignent des sommets. Pour avoir une petite idée, rien que pour les manuels, nous avons fait un petit calcul pour trois niveaux scolaires. Nous avons pris, de façon empirique, la première année primaire, la septième année et la première année secondaire.
On constate que, pour un élève de première année primaire, il faut 3 livres. Leur coût global n’est que de 8D100. Un élève de septième année (première année collège), le besoin est de 12 manuels. Coût total 40D200. En première année secondaire, il faut 13 manuels dont le coût est de l’ordre de 38D300. A cela il faudra ajouter d’autres dizaines de dinars pour l’achat des autres fournitures.
Pour terminer, il faut revenir à la réalité des prix C’est la clé de tous les problèmes. Aujourd’hui, la fourchette utilisée est incompatible avec toutes les dispositions logiques. Le libraire, l’épicier, le boucher, le marchand de légumes, le quincaillier, le marchand de matériaux de construction, le réparateur d’appareils électriques ou électroniques etc…) pratiquent des prix échappant à tout contrôle et n’obéissent qu’à une règle unique : amasser le plus de profits aux dépens du consommateur.