De plus en plus de citoyens se détournent de l’eau de la Sonede pour s’approvisionner auprès des vendeurs d’eau de différentes sources, alors que cette vente est illégale et n’est soumise à aucun contrôle. Un marché informel de l’eau a émergé dans plusieurs régions.
Le manque d’eau, ayant pour conséquence la détérioration de la qualité de l’eau du robinet, a donné un coup d’accélérateur à la vente illégale d’eau de source dans plusieurs localités et régions du pays. L’engouement des citoyens, qui la préfèrent à l’eau du robinet imbuvable aux dires de certains, a donné lieu à la naissance d’un marché florissant de l’eau, qui emploie plusieurs personnes qui ont flairé le bon filon pour se faire de l’argent. Il y a ceux qui remplissent les bidons à partir des sources d’eau qui coulent en permanence et ceux qui les acheminent vers les régions voisines pour les vendre aux citoyens, relate Raoudha Gafrej, experte en ressources en eau. Le m3 d’eau de sources diverses est vendu à 100 dinars, alors que celui de la Sonede varie entre 200 et à 1.620 millimes. Les citoyens préfèrent s’approvisionner en eau de source beaucoup plus douce et présentant un taux de salinité moins élevé. Le bidon de dix litres est vendu à un dinar, soit 160 fois plus cher que celui de la Sonede. Toujours selon l’experte en eau, ce créneau permet de générer des revenus confortables pour ceux qui se sont lancés dans ce filon en or, ce qui a conduit des propriétaires de forages destinés à l’irrigation à vendre l’eau pour les besoins de l’eau potable. Certains ont même installé de petites unités d’osmose, que ce soit sur un forage ou même le réseau d’eau de la Sonede, pour produire une eau de salinité réduite. Or, cette eau osmosée ne peut être consommée et surtout stockée pendant plusieurs jours en l’absence d’un contrôle du Ph et de stérilisation. « Les revenus de vente de l’eau d’un forage de 15 litres par seconde peuvent générer un revenu compris entre 6.000 et 10.000 dinars par jour ! Un revenu qui ne pourra en aucun cas être assuré par l’usage de cette eau pour la pratique de l’agriculture irriguée », affirme Mme Gafrej.
Au niveau de la source d’eau de Sidi Medyen du gouvernorat de Zaghouan, il faut environ 20 heures pour remplir 1.680 bidons de dix litres, ce qui permet de générer un revenu moyen journalier de 1.680 dinars, selon l’experte en ressources en eau, ajoutant, par ailleurs, «qu’un vendeur peut faire trois voyages par jour avec en moyenne 80 bidons par voyage, ce qui rapporte 240 dinars par jour pour au moins sept personnes». Ceux qui achètent cette eau savent très bien qu’elle n’est soumise à aucun contrôle et qu’elle peut présenter des risques pour leur santé. Etant donné que ce marché ne relève d’aucune structure, personne n’assumera la responsabilité si des citoyens sont contaminés.
Selon Mme Gafrej, si les citoyens se sont détournés de l’eau de la Sonede, lui préférant le marché informel et illicite de l’eau, c’est à cause de la qualité de l’eau, en termes, de salinité conjuguée à la qualité des réseaux vétustes, et ce, dans la plupart des régions et des gouvernorats. L’Etat, à travers toutes ses structures (ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, ministère de la Santé publique, ministère des Affaires locales et de l’Environnement, ministère du Commerce, etc.), n’a pu faire face à ce marché illégal et de privatisation de l’eau qu’il a lui-même créé par son incapacité à répondre aux besoins en eau du citoyen.
D’après l’experte en ressources en eau, compte tenu du manque d’eau qui va s’accentuer dans le futur, la Sonede ne pourra pas fournir une eau de salinité inférieure à 1,5 g/l. Aussi du fait que la consommation humaine journalière (l’eau seulement pour la boisson) s’élevant de 2 à 3 litres en moyenne par jour, il n’est pas nécessaire d’adoucir toute l’eau fournie par la Sonede, surtout que cela va tripler le coût actuel de production de l’eau potable.
Trois solutions se profilent à l’horizon pour que la Sonede puisse redorer son blason: bénéficier d’un appui financier pour combler le déficit budgétaire qu’elle traîne depuis des années, réhabiliter les réseaux et attribuer à un opérateur public ou privé l’autorisation de produire en fin de chaîne du système d’eau de la Sonede, de l’eau de table emballée dans des conteneurs de 5 et 10 litres rechargeables et cela bien entendu sur la base d’un cahier des charges bien établi.
Ahmed
3 septembre 2021 à 18:55
Cette journaliste ne fait pas son travail correctement. Pour traiter un tel sujet, il serait nécessaire d’ecouter plusieurs points de vue et pas se faire la porte-parole d’une seule personne.
Les problemes que rencontrent les citoyens avec l’eau potable ont de nombreuses causes. Irresponsabilité sociale de ceux qui cassent les tuyaux de la SONEDE pour faire des branchements illegaux … Irresponsabilité du pouvoir central et regional qui ne donnent pas a la SONEDE les moyens d’une politique efficace d’acces a la l’eau potable. Irresponsabilité de la SONEDE qui gere parfois tres mal les ressources dont elle dispose.
Donc avant de donner plus de subventions a la SONEDE, il faut la reformer serieusement en la soumettant a une evaluation reguliere et transparente suivie de decisions solides envers les incompetants et les corrompus.
Attribuer a un operateur privé la mise en bouteille n’est pas une solution efficace, puisqu’elle existe deja et l’eau en bouteille est chere et parfois de piètre qualité.
En revanche donner plus de responsabilités aux acteurs sociaux au niveau local et notamment aux communes – comme dans la pluspart des pays dans le monde, serait une avancée institutionelle certaine.