Le lys de mer est une plante menacée, d’autant qu’en Tunisie aucune mesure de conservation spécifique n’est prise. Elle est menacée dans la plupart des plages par la pression touristique, le piétinement, la cueillette des fleurs ou l’arrachage dû à la méconnaissance des vacanciers.
Le constat a été fait lors du dernier Sommet sur la biodiversité, tenu à Marseille en septembre, la biodiversité se porte mal, aussi bien dans le monde, qu’en Tunisie. Cependant, rien n’empêche d’espérer qu’un jour des plantes, tel que le lis ( ou lys) maritime peu connu en Tunisie, puisse trouver plus de soin et de protection, à l’instar de ce qui se passe ailleurs notamment chez les voisins du Nord.
Cette plante aux propriétés médicinales intéressantes à plus d’un titre, y compris dans le traitement des infections émergentes au coronavirus, ne figure pas dans le Registre national des espèces sauvages (Regnes), réalisée en 2010, dans la cadre d’une initiative appuyée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (Uicn). Le Lis maritime également appelé lis de mer, ou lis des sables, est une plante vivace bulbeuse qui se rencontre sur les côtes sableuses ensoleillées (héliophile) ; il supporte la sécheresse souvent sévère (xérophile) et les embruns salés (halophile). Son appellation scientifique (Pancratiummaritimum) provient d’une étymologie grecque : le préfixe pan signifie «tout», la racine cratys veut dire «puissant». Le lys de mer, sans être d’une toute-puissance, était réputé chez les anciens peuples latins pour ses nombreuses propriétés médicinales. Maritimum vient du latin et signifie “du bord de la mer”. Pancratiummaritimum a été cultivé dès l’Antiquité dans le pourtour méditerranéen. Originaire de Crète, et plus particulièrement, de l’île de Chania, le lys de mer a été trouvé, également, en Bretagne, dans le nord-ouest de France. En Tunisie, cette plante se développe sur les plages sableuses de Tabarka à Zarzis et dans les îles de Jalta, Kerkenah et Djerba. Elle est associée à une végétation typique des plages. Des sources anciennes mentionnent qu’elle se trouve également à Carthage, Tunis, Hammam-Lif, Hammamet, Sousse et Mahdia. Le lys de mer est une plante menacée, d’autant qu’en Tunisie aucune mesure de conservation spécifique n’est prise. Elle est menacée dans la plupart des plages par la pression touristique, le piétinement, la cueillette des fleurs ou l’arrachage dû à la méconnaissance des vacanciers.
Caractéristiques botaniques
Le Pancratiummaritimum appartient à la famille des Amaryllidacées (ou des Liliacées selon la classification classique). C’est une plante herbacée, de 30 à 60 cm de haut, à magnifiques et grandes fleurs blanches agréablement parfumées.
La tige mesure environ 30 cm, et émerge d’un gros bulbe enterré dans le sable, permettant la survie de la plante pendant la saison sèche estivale.
Les feuilles longues et étroites (de 5 à 20 mm de large et jusqu’à 75 cm de long), poussent en lanières tordues en spirales. Les feuilles disparaissent pendant l’été, et repoussent en septembre. Les fleurs sont blanches intérieurement et veinées de vert extérieurement. Elles sont très longues (jusqu’à 15 cm), et sont composées de 3 sépales et 3 pétales. Elles sont réunies en ombelle de 3 à 15 fleurs, et sont entourées de 2 grandes bractées (petites feuilles qui recouvrent la fleur avant son développement et qui sont situées à la base du pédoncule). Ces fleurs délicates et éphémères s’ouvrent à la tombée de la nuit et dégagent un parfum exotique et fruité. Le lys de mer est également appelé Lys étoilé, car sa fleur ressemble à une étoile.
Usages médicinaux
Le lys de mer est connu pour les propriétés médicinales suivantes :
– Hypotenseur : diminue la tension et la pression artérielle
– Purgatif: il serait également utilisé dans le traitement de l’asthme et comme fongicide externe. Le bulbe et les feuilles contiennent une quarantaine d’alcaloïdes (galanthamine, pancracine, lycorine, etc.) ayant des activités purgatives, insecticides et fongicides.
La plante permettrait aussi de lutter contre la malaria. Les alcaloïdes présents dans le bulbe seraient également utilisés, par exemple en Turquie, pour prévenir et lutter contre les tumeurs, et plusieurs types de cancers.
Des chercheurs coréens ont étudié la lycorine comme inhibiteur de l’ARN polymérase non nucléosidique dépendant de l’ARN, il s’agit d’un traitement potentiel pour les infections émergentes au coronavirus.
Menace(s) et protection(s)
Il y a lieu de noter que le Registre national des espèces sauvages (Regnes), réalisée en 2010, englobe un premier noyau constitué de 213 espèces terrestres animales et végétales. La flore de Tunisie est constituée d’une grande diversité de plantes d’affinité principalement méditerranéenne : elle compte 2.828 espèces et sous-espèces. Le Pancratiummaritimum appartient, au patrimoine végétal et culturel de la Tunisie ou à sa biodiversité, le but demeure une mise en avant des richesses tout en garantissant leur préservation. Car si la Tunisie est témoin d’une hausse considérable de son nombre des vacanciers tunisiens, qui fréquentent les plages, et de touristes, venus admirer les trésors qu’offrent le pays, il n’en demeure pas moins que l’impact environnemental dû à cette augmentation devrait être pris en considération par les autorités, outre les dommages provoqués par les autres activités humaines, notamment industrielles et provoquant des dégâts immesurables à l’environnement du pays Alors qu’en France, cette espèce fait partie de la liste des espèces protégées en Pays-de-Loire, Bretagne, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Aquitaine, Poitou-Charente. Ces espèces sont interdites de destruction, coupe, mutilation, arrachage, cueillette ou enlèvement, colportage, utilisation, mise en vente, vente ou achat sur tout le territoire de ces régions. En Turquie, elle est protégée par une réglementation stricte qui en interdit la cueillette. Elle demeure visible, notamment, dans la province de Mugla, dans le sud-ouest du pays.
Jusqu’à présent, ces plantes vivaient en paix, protégées par leur isolement. C’est dommage qu’on ne puisse, faute de représentant de l’autorité dans les régions côtières, protéger par l’interdiction de la cueillette, le lys de mer.
Pour conclure ce rapide tour d’horizon, je crois qu’il y aurait essentiellement à défendre dans ce pays les groupements des plantes menacées qui doivent faire l’objet d’une liste qu’on actualiserait et qu’on réviserait régulièrement. Ces mesures ne peuvent être obtenues que par des interventions ponctuelles et régulières des pouvoirs publics.
Hédi SOUISSI | Pharmacien