Non, la Tunisie n’ira pas au deuxième tour du championnat du monde qui se déroule actuellement en Espagne. Non, le rêve de réaliser cet exploit historique (c’aurait été une première dans les annales de notre hand féminin) ne deviendra pas réalité, après la lourde défaite subie, avant-hier soir, devant le Congo. Plus que lourde, elle est frustrante et sans doute inattendue. Frustrante, car, au vu de leur superbe sortie, 48 heures plus tôt, face à la formidable machine coréenne qui avait écrasé (par 14 points d’écart) cette même équipe congolaise, et au vu aussi des riches potentialités dont elles se prévalent, nos filles ne méritaient pas ce triste sort qui les a bêtement privées d’un exploit retentissant et prometteur pour leur jeune carrière. Inattendue, écrivions-nous, car se faire corriger de la sorte (33-24) n’était franchement ni dans le calepin de l’entraîneur Moez Ben Amor, ni dans les prévisions des observateurs les plus avertis, ni même dans les rêves enchanteurs de l’adversaire. Que s’est-il passé ? Comment la maison tunisienne a pris feu ? Y avait-il un pilote aux commandes de la Gazelle de Carthage ?
Admirables Congolaises
Si l’on se fie au film de la rencontre retransmise en streaming, un étrange et frappant constat se dégage :on n’a vu qu’une seule équipe sur le terrain, à savoir la troupe de Brazzaville. Celle-ci, qu’on soit neutre ou… tunisien, il faut avouer qu’elle nous a offert un vrai régal handballistique : vivacité, jeu fluide, vitesse d’exécution, rapidité endiablée sur les contres, buts inscrits de toutes les positions et, comme bouquet doublement beau et exotique, une extraordinaire puissance physique illustrée notamment par les trois lionnes Nkou, Okabanga et Ymga. Cette dernière, un spectacle à elle seule et auteure d’un merveilleux récital, a été d’ailleurs élue le plus logiquement du monde meilleure joueuse du match. La mainmise des Congolaises sur la rencontre est telle qu’elles ont pris, dès la première mi-temps, un incroyable avantage de huit points qu’elles sauront, à la reprise, préserver, avant de s’amuser à le creuser jusqu’à, tenez-vous bien, onze points d’avance !
Faillites
Et la Tunisie, où était-elle entre-temps ? Ce qu’on peut retenir est tout simplement impensable. En effet, au milieu de ce «bal des vampires» amené par ce célèbre fleuve du Congo qu’est l’Uele, nos joueuses étaient méconnaissables, proprement pantoises et étourdies :lenteur criarde , passes à l’adversaire à l’envi, tirs mal cadrés, gâchis monstre en phase de conclusion des offensives, jets de sept mètres ratés, et puis ce handicap non moins pénalisant, à savoir une défense passoire et guère aidée par deux gardiennes en méforme totale. Le tout doublé de choix tactiques généralement improductifs. Et là, inévitablement, surgissent les interrogations suivantes : le coach Ben Amor a-t-il été trahi par des éléments sur lesquels il avait placé aveuglement sa confiance ? Regrettera-t-il le fait d’avoir laissé à Tunis des joueuses jugées unanimement selectionnables? L’équipe souffrait-elle, avant-hier, d’un manque de préparation psychologique d’avant-match ? A-t-on, par hasard, «miniaturisé» l’adversaire après la sortie héroïque devant la Corée ? Cette même sortie a-t-elle laissé ses séquelles sur les jambes des camarades d’Eya Masri qui n’auraient pas pu récupérer en dépit de la volonté de leur préparateur physique ? Bref, aucune note gaie dans ce sombre tableau noirci de faillites incalculables!
Dédramatiser
Pour conclure, et au risque de déplaire à ceux qui, pour une raison ou une autre, se sont employés, depuis, à… crier au scandale et à faire de cette défaite un drame, nous estimons humblement que ce Mondial ibérique nous a fait, bien au contraire, découvrir une belle sélection d’avenir où les potentialités prometteuses ne manquent pas. Avec des éléments comme Zelfani, Ben Abdallah, Hachana et Masri, pour ne citer que celles-ci, nous parions que l’investissement est lourd et sûr et que, par conséquent, l’avenir du sept national est à voir sous des lendemains florissants. Oui, oserions-nous écrire, cette jeune génération ne nous décevra pas au futur, après avoir, au préalable, déjà valu au pays le titre africain des cadettes et une autre grande performance, sous forme de qualification, pour la première fois dans l’histoire de notre handball féminin, au second tour du championnat du monde des juniors.
Autant dire que non seulement il faut absolument dédramatiser et redonner confiance à cette bande, mais aussi et surtout il va falloir lui donner les moyens de progresser et de devenir plus compétitive sur les scènes africaine et mondiale. Bien évidemment, ce message on ne peut plus clair et net s’adresse au ministère des Sports et à la fédération, le premier étant appelé à mettre le paquet au profit de ladite sélection en lui finançant une participation fréquente aux tournois internationaux comme le fait si généreusement son homologue d’Egypte. Quant à la fédération, elle doit redoubler d’effort et de sacrifice en matière d’encadrement par la multiplication des stages, tout en assurant à ces starlettes qui percent un meilleur suivi de carrière au sein de leurs clubs respectifs.