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ANALYSE: La bénédiction grecque…

Je voudrais revenir pour tirer une réflexion, à défaut d’un plan, sur la queue d’une comète qui ne finit pas de faire couler l’encre à flot : la crise de dette souveraine (la comète) et la traînée qui s’ensuivit : la crise «à la grecque»… et celles qui se profilent, actuellement, sur fond de covid-19 à épisodes.

De fait, le financement du déficit public structurel grec (2007-2009) s’était amplifié pour doper une relance d’une économie déjà léthargique, qui a été éprouvée par une crise mondiale (2006-2008). Mais à bien regarder, bon nombre de pays de l’Union européenne étaient dans la même situation : Portugal, Irlande, Italie, Grèce et Espagne. Des pays européens (et non européens) qui ont un endettement public excessif, qui faisait craindre une récession mondiale plus profonde au moment où la reprise redémarrait et où les tensions font leur réapparition dans la zone euro (et ailleurs).

Fondamentalement, les problèmes des impasses budgétaires de la Grèce et bien d’autres pays similaires, structurellement, ne sont que l’épiphénomène bien plus lancinant et plus «discret» : l’augmentation du risque souverain dans les pays qui dopent leurs systèmes bancaires, durement éprouvés, par un financement public et donc un endettement public de plus en plus important. Ce qui revient, tout compte fait, à collectiviser les pertes financières privées générées par la crise mondiale. En d’autres termes, les pertes des banques privées sont financées par les contribuables, soit par le bâton fiscal, soit par l’inflation… soit par les deux.

Bien sûr, la leçon «grecque» aura comme conséquence, non encore reconnue, une fragilisation de la monnaie nationale. Fortement ébranlée, cette dernière aura tendance à céder en quelques mois par rapport au dollar et autres devises bien en vue. Ce qui, soit dit en passant, fait bien l’affaire des exportations des principaux partenaires. Une décote de cette ampleur c’est l’aubaine, au moment où ces derniers avaient émis le vœu de renforcer leur propre monnaie, jugée «sous-évaluée». D’ailleurs, la plupart des économies de la zone euro voyaient leurs exportations baisser au profit de pays asiatiques à bas salaires.

Du point de vue de l’optique orthodoxe, une croissance dopée par un boom des dépenses d’infrastructure et de l’immobilier résidentiel, au détriment de l’épargne intérieure et de l’investissement productif, génère des effets d’éviction et accroît les déséquilibres extérieurs en réduisant la capacité compétitive de l’économie. D’autant plus qu’une politique monétaire trop rigoureuse d’une Banque centrale, ardent défenseur d’une monnaie «stable», pourrait définitivement achever la compétitivité des entreprises structurellement poussives.

Implicitement, au-delà des mesures palliatives d’ajustement budgétaire, on serait tentés de plaider pour «une restauration structurelle de la compétitivité nationale».

Question à un dinar : comment ?

Par une déflation à moyen terme, et une stagnation économique, politiquement inacceptable ?

Une accélération des réformes structurelles avec une limitation des hausses des salaires serait judicieuse mais socialement tout aussi inacceptable.

Par une monnaie moins forte ?

Ce qui impliquerait que la Banque centrale devrait lâcher du lest au niveau de sa politique monétaire et déprécier la monnaie en termes réels ? La résurgence des tensions inflationnistes rend le scénario aussi inacceptable.

Reste le protocole «mixte» implicitement suggéré par les tenants de la nouvelle politique monétaire : une monnaie nationale moins «vigoureuse» et des réformes structurelles «appropriées» seraient une thérapeutique judicieuse pour «restaurer la compétitivité de l’économie par une baisse relative du coût réel de la main-d’œuvre», améliorer la crédibilité politique publique et améliorer la visibilité des marchés financiers. Ce qui prendra du temps.

Bien sûr, les pays qui avaient déjà entrepris des réformes structurelles en seraient les premiers bénéficiaires.

A la condition que l’entreprise tunisienne puisse rationaliser sa production et comprimer ses coûts (financier, salariaux…) pour doper son potentiel de compétitivité.

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