D’un pays où il faisait bon vivre, la Tunisie s’est transformée en dix ans en un pays où il est plus facile de mourir que de vivre. Cette décennie noire durant laquelle les politiciens qui se sont succédé au pouvoir nous ont rebattu les oreilles par des discours creux et des promesses sans lendemain sur les acquis de la révolution nous ont non seulement légué un pays en ruine après une destruction massive de son tissu économique et après avoir spolié ce qui reste de ses richesses, mais aussi ils ont mis en péril la vie des citoyens.
Conscients de ce mal-vivre, les jeunes générations ont commencé à prendre la poudre d’escampette. En effet, les statistiques sur les départs des Tunisiens à l’étranger ou sur les intentions d’émigration des autres parmi nos hauts cadres, ingénieurs, techniciens et médecins sont à couper le souffle. Hormis les milliers de jeunes qui prennent le large sur des embarcations de fortune et dont la mer nous rejette les corps chaque jour, le taux de suicide pour ceux qui n’ont pas eu la force de quitter le pays frôle des seuils inquiétants. D’autres, livrés au désespoir, se jettent dans les bras des terroristes et meurent dans des attentats perpétrés en Tunisie ou dans des zones de conflits. Mais le plus inquiétant est que de paisibles citoyens qui se rendent à leur travail ou vaquent à d’autres occupations se trouvent parfois confrontés à une mort soudaine sur les routes ou même les autoroutes car on ne prend même pas la peine de leur signaler un épais brouillard. D’autres perdent la vie à cause des crues d’oueds en allant à l’école ou tombent mortellement dans des bouches d’égout sans couvercle. Ceux qui ont la chance d’éviter tous ces dangers se trouvent pris à la gorge par un mal-vivre au point que les maladies mentales ont dépassé le seuil du tolérable. Tunisie, qu’a-t-on fait de toi ? Petit pays, on t’aime beaucoup mais on t’a fait tellement souffrir qu’aujourd’hui on récolte les fruits toxiques de tous les maux qu’on t’a causés.