
Ici ou ailleurs, vendre des fleurs est un commerce souvent florissant, d’autant qu’il est intimement lié aux évènements. En toute circonstance cérémoniale, mariages, anniversaires, retrouvailles amoureuses ou fêtes de famille, les fleuristes y trouvent une aubaine. Mais, comme tous les secteurs, ce métier n’a pas été épargné par les aléas du temps qui passe. Après la révolution, il a subi les contrecoups d’une récession économique jamais vécue. Aujourd’hui, il continue à payer un très lourd tribut à la pandémie du covid-19. Une crise sanitaire qui a mis tout à genoux, fleuristes compris. Certes, on n’en parle moins que les hôtels, les cafés et les restaurants dont certains ont fermé boutique, mais eux aussi l’ont ressentie de plein fouet. Et leur chiffres ont beaucoup baissé.
Un marché frappé de plein fouet
Deux ans durant, l’impact du covid n’est plus à démontrer. Hichem, quadragénaire, l’un de la quinzaine de marchands de fleurs, jouxtant la gare TGM, a ainsi été durement touché. «Ma recette journalière a diminué de plus de la moitié. Et, je n’arrive plus à joindre les deux bouts», se plaint-il, se demandant si l’Etat pourrait lui venir en aide. Sinon c’est le gouffre d’endettement, sans pouvoir s’en sortir. Toutefois, sa situation n’est nullement une exception. Ses collègues, longtemps installés sur ces vieux rivages de la capitale au TGM, connaissent, eux aussi, le même sort. A des degrés différents.
En plein confinement sanitaire, décrété, début 2020 par les autorités, suite aux recommandations de la commission scientifique de lutte anti-covid, le marché des fleurs fut fortement secoué. A l’instar des hôteliers et artisans, les fleuristes n’ont pu résister à la fermeture obligatoire de leur magasin. Avec un stock de fleurs qu’ils ont dû jeter ou vendre, parfois, à la criée. Un manque à gagner qui a pesé sur leur budget. Covid oblige ! Et là, Hichem se considère, comme les autres, d’ailleurs, comme une grande victime de la crise. Car, «ces vagues épidémiques qui avaient ravagé la Tunisie ont douloureusement affligé les cœurs et plombé les bourses des acheteurs», estime-t-il, indiquant que le confinement aurait aussi impacté le déroulé de toutes nos cérémonies. «Aujourd’hui, on ne célèbre plus nos fêtes comme auparavant», déplore-t-il, poussant un cri de détresse. Aujourd’hui, il n’y a plus de mariages, comme cela se fait habituellement. Des évènements ou séminaires non plus.
L’Etat sollicité
Autant de témoignages qui nous ont édifiés sur un tel métier gravement touché. Le bilan est peu reluisant. Certes, si le confinement prolongé, tout au long du 2e trimestre de 2020, faisait craindre la faillite d’un nombre de fleuristes, le déconfinement ne semblerait pas suffisant pour reprendre de plus belle. Une majeure partie de leur activité demeure encore à l’arrêt. Soucieux de prendre soin de sa devanture, bien garnie de fleurs aux multiples couleurs du printemps, Samir, jeune fleuriste, semble être au four et au moulin. Avec son copain, il s’évertue à donner à sa fleuristerie l’image d’une belle vitrine commerciale. Par tous les moyens, il ne cesse de faire sa promotion. Régulièrement, il se voit ranger ses étalages, tailler soigneusement les touffes des fleurs pour les mieux s’exposer aux passants. Mais, rarement se présente un vrai client. « Nous, les fleuristes, nous continuons ainsi à tout gérer difficilement.
Pire, nous touchons le fond!», avoue-t-il, sur un air désespéré. Il fait appel à l’Etat pour leur apporter le soutien nécessaire.
Prix, pourtant, en hausse
Pour Hatem, fleuriste depuis longtemps, son activité a repris de façon moins intensive. Retour à la normale, loin s’en faut ! Pourtant, les prix qu’il affiche ne sont toujours pas à la portée de toutes les bourses. Ils sont en hausse. Pas moins de 70 dinars pour décorer la voiture des mariés. Alors qu’un joli bouquet de fleurs, censé ajouter au décor d’un mariage, peut dépasser 150 dinars. Pour lui, ces prix ne sont pas assez chers, vu les frais dépensés en termes d’approvisionnement et de transport des produits. Ce dont le client devrait savoir avant de passer la commande. «Sous l’effet ravageur de l’épidémie, on a trop perdu. Personne ne sait ce que nous subissons et combien nous a coûté cette crise sanitaire», ajoute-t-il. Mais l’homme semble prendre son mal en patience. Il cherche désespérément des solutions.
En ces temps de récession, la filière des fleurs n’a plus le vent en poupe. Tous les fleuristes, installés sur l’une des artères principales de Tunis, l’avenue Bourguiba, n’ont pas, semble-t-il, les moyens de relancer leurs activités. Leur gagne-pain demeure ainsi menacé. Ils risquent de se retrouver sur la paille. Fermeture forcée, voilà de quoi s’inquiéter.
Photos : Koutheîr KHANCHOUCH