Sur les bancs des accusés, il y a plus de mille inculpés encore en liberté. Livrées à elles-mêmes, environ 541 victimes de sévices et supplices n’ont pas eu gain de cause. Au grand jour, leurs tortionnaires courent toujours.
Quatre ans après leur installation, les 13 chambres criminelles spécialisées en justice transitionnelle n’ont pas avancé d’un iota. Leur bilan est jugé peu reluisant, d’autant plus qu’aucun procès n’a été, depuis, tranché. Alors que les difficultés rencontrées étaient d’ordre judiciaire et politique. C’est ce qui a été, d’ailleurs, révélé par la coalition civile pour la défense du processus de la justice transitionnelle, neuf ans après son lancement, en vertu de la loi organique le régissant. Une conférence de presse, tenue hier au Snjt, a fait le point de la situation.
Les tortionnaires courent toujours
D’emblée, Hamza Ben Nasr, de l’ONG Avocats sans frontières (ASF), membre du collectif, a déploré un si long parcours judiciaire qui aurait dû tourner la page et en finir avec l’état d’impunité. Deux ans après la publication au Jort du rapport définitif de l’Instance vérité et dignité (IVD), rien n’a été effectivement engagé. L’État n’a pas prêté oreille aux différentes recommandations émises par sa présidente Sihem Ben Sedrine et ses lieutenants. Au terme d’un mandat mi-figue, mi-raisin, l’IVD avait, alors, auditionné 62 mille victimes et transféré 205 dossiers aux chambres criminelles spécialisées chargées de poursuivre pénalement les auteurs des violations de droits humains et de crimes économiques. Dévoiler la vérité, punir les coupables et rendre justice aux justiciables, c’est bien l’objectif primordial pour lequel ces chambres ont été créées. Toutefois, elles ont failli à cette mission. «Tout ce qu’on peut retenir comme résultat, quatre ans après leur installation, c’est qu’on n’a abouti à rien. Aucun verdict n’a été, jusqu’ici, prononcé», commente Ben Nasr. Pourtant, sur les bancs des accusés, il y a plus de mille inculpés encore en liberté. Livrées à elles-mêmes, environ 541 victimes de sévices et supplices n’ont pas eu gain de cause. Au grand jour, leurs tortionnaires courent toujours. Sans scrupule !
Ces facteurs bloquants !
Mission non accomplie ! De son côté, Mme Oula Ben Nejma, avocate et ex-membre du comité d’enquête et d’investigation au sein de l’IVD, a dénoncé le projet de réconciliation administrative initié, en 2015, par feu Béji Caïd Essebsi, ancien Président de la République, le considérant comme étant un facteur bloquant. Elle a insisté sur la reddition des comptes et le dédommagement des victimes. En lien avec la révocation de 57 magistrats, Mme Ben Nejma avait déclaré que le dernier décret-loi présidentiel y afférent est de nature à compromettre l’indépendance de la justice et mettre tout le secteur à genoux.