• Avec le texte corrigé de la Constitution paru au Jort en date du 8 juillet, les modifications suscitent un débat qui n’en finit pas
• Les nouveaux articles modifiés autorisent toutes les interprétations possibles
• La note présidentielle explicative du texte du 30 juin dernier est-elle valable pour le texte du 8 juillet ?
On ne finira peut-être jamais d’épiloguer sur les transformations ou changements introduits par le Président Kaïs Saïed dans le texte de la nouvelle Constitution publié le 30 juin dernier au Journal officiel de la République tunisienne (Jort), texte qui devrait être avalisé ou rejeté par les participants au référendum programmé pour le 25 juillet.
Maintenant que le Président de la République a fait paraître, le 8 juillet, au Jort un nouveau texte de la nouvelle Constitution qu’il présente comme le texte corrigé, rectifié, voire l’authentique de la nouvelle Constitution, dans la mesure où le texte en date du 30 juin comportait des imperfections et des insuffisances auxquelles il était nécessaire de remédier, les experts, les constitutionnalistes et les analystes de tous bords parmi ceux qui soutiennent la dynamique du 25 juillet ou parmi ceux qui l’ont rejetée dès le premier jour de son déclenchement, s’emploient à expliquer, à saisir et à faire comprendre aux Tunisiens les significations des changements apportés par le Président Kaïs Saïed aux articles et aux dispositions contenus dans le texte de la Constitution publié le 30 juin dernier.
Et l’on insiste, de prime abord, sur le nombre de 46 modifications introduites sur le texte initial dans l’objectif d’insinuer qu’il ne s’agit pas de simples rectifications ou de petites corrections d’orthographe ou de grammaire comme l’a souligné le Chef de l’Etat lui-même mais bel et bien de modifications d’une importance capitale au point que l’on est en droit d’affirmer que le texte en date du 8 juillet constitue, en effet, une nouvelle Constitution et que celle en date du 30 juin 2022 a bel et bien vécu.
Reste à savoir dans ce sillage comment ces analystes ont réagi, d’abord, à l’idée même de publier par le Président de la République le nouveau texte de la Constitution et aussi comment ils ont saisi la portée et les objectifs visés par les modifications ou, pour être plus clair, par les nouveaux articles supplantant ceux du texte du 30 juin.
Le Président Kaïs Saïed a-t-il le droit d’introduire les modifications en question qui ont valeur d’amendements substantiels d’une Constitution qui n’a pas été encore adoptée par les participants au référendum du 25 juillet ?
Autrement dit, le texte du 30 juin 2022 publié au Jort appartient-il toujours à Kaïs Saïed ou est-il à considérer comme un texte qui relève de l’Etat tunisien et dont la modification de certains de ses articles ou son annulation relèvent désormais des prérogatives du Parlement une fois ses membres élus ?
Pour le Pr Sghaïer Zakraoui, enseignant de droit, le texte du 30 juin 2022 n’est pas à modifier par le Président Kaïs Saïed dans la mesure où, dès le premier jour de sa publication au Jort, il a accédé au statut d’un document officiel étatique auquel personne n’a le droit d’apporter une quelconque modification quelle que soit sa nature.
Le Pr Zakraoui ne précise pas ce qu’on doit faire maintenant de ce texte qui est pratiquement tombé dans le déni du fait de la publication du nouveau texte en date du 8 juillet considéré par l’Isie comme le texte que les électeurs avaliseront ou récuseront le 25 juillet 2022.
Encore une constation: les experts n’ont pas accordé l’importance qu’il faut à la note explicative qui devait être publiée par la présidence de la République, le jour de la parution de la version corrigée du texte de la nouvelle Constitution.
La note explicative dans laquelle le Chef de l’Etat a appelé les Tunisiens, le 4 juillet à dire oui à la Constitution du 30 juin dernier est-elle à considérer comme suffisante maintenant que la Constitution du 30 juin 2022 est supposée faire partie du passé ?
D’autres interrogations qui restent aussi sans réponses et qui sont à même de susciter toutes les interprétations possibles.
Ainsi, relève-t-on dans l’article 89 relatif à la candidature à l’élection présidentielle qu’il n’existe pas d’âge minimum ou maximum à respecter pour tout citoyen ou citoyenne désirant se porter candidat ou candidate à la magistrature suprême de son pays. De la sorte, un jeune de 23 ans (âge minimum à la députation) ou un citoyen âgé de plus de 90 ans peuvent postuler au Palais de Carthage et s’y installer pour au moins un mandat de cinq ans (qui ne peut être renouvelé qu’une seule fois) au cas où ils emporteraient la confiance des électeurs.
Dans l’article 90 relatif aux parrainages que le candidat à la présidence doit collecter pour que sa candidature soit acceptée, il est indiqué que ce même candidat doit recueillir le parrainage d’un «certain nombre d’élus ou de citoyens» sans préciser s’il s’agit d’une centaine de signatures ou d’une centaine de milliers de signatures.