A force de ne pas investir dans l’enseignement, avec, parfois, des conditions de scolarité extrêmes pour les uns, quand d’autres écoliers continuent d’abandonner inlassablement les bancs des écoles, la décadence se poursuit… Pourtant : ‘’Si vous pensez que l’éducation coûte cher, essayez l’ignorance’’, prévenait Derek Bok, ancien recteur de l’Université Harvard.
Le système scolaire tunisien connaît un rythme à double vitesse avec une école publique gratuite, mais en perte de vitesse et en totale perdition et un enseignement privé où l’on compense beaucoup avec de l’investissement permanent, sur les élèves et le savoir. Ce qui s’accentue au fil des ans. Pour précision, l’enseignement par groupes est toujours appliqué, sans raison, comme durant la parenthèse du Covid-19 hormis celle de compenser la surcharge des classes. On apprend de bonne source que certaines classes ont des effectifs de 60 élèves qu’ils ont dû départager en deux groupes distincts… Une situation intenable, aggravée par le manque de ressources de l’Etat, dont les établissements sont directement affectés et pâtissent largement.
Des écoles dans le dénuement total
Une image poignante, récemment publiée, traduit, à elle seule, les conditions de scolarité extrêmement rudes des écoliers de l’école de Sidi Omar Bouhajla à Kairouan car ces derniers sont entassés à l’extérieur sous un soleil de plomb, dans un conteneur avec l’obligation de suivre le cours. « L’enseignant et les élèves sont obligés de s’abriter derrière un mur contre les rayons brûlants du soleil à 40 degrés et de s’échapper de la seule salle d’enseignement représentée par un conteneur en fer (3 x 5 m) qui se transforme en un four en fer à une température de 50 degrés, vu la météo caniculaire. Dans une école sans eau, sans raccordement routier et les conditions les plus simples qui garantissent la dignité de l’élève, de l’éducateur et du pays ». Ce témoin de la scène lance un appel à la solidarité afin de fournir une tente de 3*5 M, pour abriter ces élèves contre la chaleur, faute de salle de classe.
Le manque d’eau, on y revient justement. Les écoles primaires d’Al-Saqdud ont eu droit, très récemment, à une rentrée scolaire sans eau. Cette zone de la délégation de Redeyef souffre du problème de coupure d’eau potable depuis des années, et malgré les appels lancés par la population, avec le soutien du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux et la Direction du bassin minier, pour dénoncer l’atteinte à leur droit constitutionnel à l’eau potable, qui est une composante majeure d’une vie décente, la situation est restée inchangée et l’affaire lettre morte, sans aucune réponse des autorités locales et régionales. Il est à noter que l’administration régionale de l’éducation de Gafsa mise sur la dotation de l’école Al-Saqdud d’un camion-citerne pour approvisionner les élèves en eau, devenue source de maladies, notamment d’hépatites et de dermatoses, considérant que la méthode de conduction de l’eau n’est pas conforme aux normes sanitaires. En outre, l’absence d’eau dans les écoles d’Al-Saqdud représente une double violation du droit constitutionnel des élèves à boire de l’eau propre et salubre.
En attendant, en privant malgré eux les élèves de cours réguliers dans leurs établissements, la baisse du savoir et du niveau d’instruction, on doit craindre le pire. Abandonnés à leur propre sort, ils risquent de sombrer dans la délinquance et constituent une bombe à retardement sociale d’après les délégués de l’enfance en Tunisie qui ne savent plus à quel saint se vouer pour les déloger de la spirale infernale faite de misère sociale et d’abrutissement insoutenables. ‘’Le mal qui est dans le monde vient presque toujours de l’ignorance’’, disait Albert Camus.