Le défi de la décentralisation du traitement est à prendre en compte, car actuellement seuls quatre centres de prise en charge sont présents sur l’ensemble du territoire : Tunis, Monastir, Sousse et Sfax.
A l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le Sida, célébrée le 1er décembre 2022, la Direction des soins de santé de base (Dssb) ainsi que le Programme national de lutte contre le Sida, en collaboration avec Onusida, ont organisé une conférence de presse ce jeudi à la Cité de la culture de Tunis. Le slogan choisi est «Mettre fin aux inégalités, mettre fin au Sida» pour mettre en exergue les enjeux de l’inclusion dans la maladie et renforcer les programmes de prévention.
650.000 décès
Le VIH, virus de l’immunodéficience humaine, cible les lymphocytes T, des cellules essentielles au bon fonctionnement du système immunitaire. En l’absence de traitement, le VIH affaiblit ce système et les personnes infectées développent de graves maladies sur le long terme. Ces maladies sont qualifiées de «maladies opportunistes» car elles sont causées par des micro-organismes inoffensifs pour les personnes dont le système immunitaire fonctionne normalement.
En ce sens, le syndrome de l’immunodéficience acquise (Sida) est le dernier stade de l’infection par le VIH. Il correspond au développement d’une ou de plusieurs maladies opportunistes chez les personnes infectées. Sans traitement, la maladie apparaît plusieurs années après l’infection et le cœur devient plus vulnérable.
Il existe uniquement trois modes de transmission du VIH : la voie sexuelle lors de rapports non protégés, la voie sanguine lorsqu’il y a échange de sang et la transmission de la mère à l’enfant pendant la grossesse, l’accouchement et l’allaitement.
Selon les dernières données de Onusida, pour la fin de l’année 2021, le monde comptait 38,4 millions de personnes porteuses du Sida et 650.000 décès enregistrés en relation avec la maladie. Sur la totalité des séropositifs, seulement 85% ont recours à un traitement, un taux en dessous de la cible des 95% espérés pour 2025. Au niveau de la région nord-africaine et du Moyen-Orient, le nombre de cas augmente continuellement. En effet, c’est plus de 30% de cas qu’en 2010, soit 5.400 personnes selon les estimations, pour lesquelles seulement 29% bénéficient d’un traitement.
Le dépistage et la sensibilisation pour tous
Aujourd’hui, les tendances actuelles de l’épidémie nationale de VIH laissent indiquer que les programmes de prévention, de soins et de traitement devraient être renforcés, notamment en faveur des populations clés et vulnérables. Deux enjeux sont en ce sens primordiaux dans la lutte contre l’épidémie en Tunisie : le dépistage et la sensibilisation pour un plus grand nombre de séropositifs sous traitement et en connaissance de leur statut, ainsi que le suivi et l’observation des patients pour la sûreté d’une adhérence pérenne au traitement, jusqu’à la suppression virale.
Selon le Directeur pays du programme commun des Nations unies sur le Sida, M. Mohamed Lassaâd Soua, la question de la stigmatisation et de la discrimination des populations plus exposées ou vivant avec le VIH dans la région est un des points à éradiquer. L’égalité d’accès aux droits, aux services de dépistage, de prévention et de prise en charge doit être vulgarisée et accessible à tous afin de contrer l’épidémie dans sa globalité.
Aussi se pose la question de l’accès aux nouvelles technologies vis-à-vis de la médecine, en matière d’approche comme de traitement, dans une Tunisie qui essaie de se mettre au niveau des standards internationaux. Finalement, le défi de la décentralisation du traitement est à prendre en compte, car actuellement seuls quatre centres de prise en charge sont présents sur l’ensemble du territoire : Tunis, Monastir, Sousse et Sfax.
De l’espoir grâce aux initiatives diverses
En ce qui concerne les actions menées dans le pays, il y a tout de même du positif à tirer. Entre autres, la présence d’une société civile dynamique et forte, qui œuvre et se positionne comme ancrage sur le terrain et dans les populations, ajoutée à une implication communautaire importante qui influe sur la planification, l’évaluation et la mise en œuvre des projets. Divers points qui aident à mettre à l’échelle la riposte nationale.
Concernant la riposte justement, on observe là aussi plusieurs acteurs. Au niveau de la coordination, elle est gérée par le Programme national de lutte contre le Sida, hébergé par la Direction des soins de santé de base, au ministère de la Santé. Pour les questions de financement, l’Etat se charge des traitements, quant à la prise en charge des patients, la prévention, le dépistage et les études, ils sont fournis par les partenaires techniques et financiers tels qu’Onusida, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) et surtout le Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme.
Vis-à-vis des campagnes et des plans d’actions au-delà du travail quotidien, plusieurs projets sont en lancement à l’échelle nationale, coordonnés notamment par l’OMS, la Dssb ou encore le Fonds des Nations unies pour la population. De la revue à mi-parcours des plans stratégiques nationaux 2021-2025, le lancement de la phase pilote de la PrEP (prophylaxie pré-exposition) en passant par l’élaboration d’un guide de formation des agents communautaires pour le dépistage, bon nombre d’initiatives sont en effet au programme, des efforts qui doivent désormais être mis en pratique, pour aboutir à contrer davantage l’épidémie dans la région.
Rappelons que, même si aucun traitement ne permet pour l’instant d’éliminer complètement le VIH de l’organisme, les traitements adaptés permettent aux personnes séropositives de bloquer la multiplication du VIH dans leur organisme et, ainsi, de garder un système immunitaire opérationnel. Dans le monde aujourd’hui, 95% des personnes sous traitement arrivent à cette charge virale à des niveaux indétectables, un résultat prometteur pour l’avenir de la lutte contre le Sida.
Inès Zarrouk