Aucun pays ne peut accepter des directives venues d’ailleurs. Les agents locaux infiltrés dans les organisations et les formations politiques sont bien dans leurs rôles. Pourtant, ils pourraient être plus utiles s’ils apportaient des solutions concrètes aux vrais problèmes des Tunisiens et en se rangeant du côté du droit et de l’intérêt du peuple. C’est la mission d’une opposition authentique.
Jusqu’à la dernière minute, Bourguiba n’avait pas admis que le peuple tunisien était mûr pour des élections pluralistes et “démocratiques”. En tout cas, il avait accepté, à contrecœur, d’organiser les premières élections législatives pluralistes en novembre 1981, dont les résultats seront, selon beaucoup, trafiqués. Pouvons-nous prétendre, aujourd’hui, que nous avons réussi à asseoir un système électoral sans failles et sans intervention de l’argent sale et des influences étrangères ?
A franchement parler, on est loin de se trouver dans une posture confortable. Les faits ont montré que ce qui s’est passé chez nous n’était pas exempt de tout reproche. L’apparition soudaine de centaines de partis et de dizaines de milliers d’organisations «défendant» toutes sortes d’idées et de programmes avait ouvert toutes grandes les portes de l’infiltration par l’intérieur de toutes ces formations politico-politiques. Des programmes inavoués figuraient au menu de ces formations qui avaient à leurs têtes des individus qui ne cachaient pas leur allégeance à l’étranger et qui exhibaient deux passeports ou plus et s’affichaient avec des personnes politiques étrangères aux convictions discutables. C’est le résultat de leurs séjours dans des pays qui leur ont donné asile à des moments où ils n’étaient pas les bienvenus sous Bourguiba ou Ben Ali à cause de leur opposition aux politiques du pays et leurs aspirations jugées trop ambitieuses.
Recrutement massif
Certains, et bien entendu pas tous, de retour au pays après les troubles de 2011, s’étaient retrouvés avec une dette à payer pour les pays qui les avaient hébergés. Aussi, ont-ils, toujours, agi avec ce souci d’être bien notés par leurs anciens bienfaiteurs. Qu’ils l’admettent ou non, ils auront sur la conscience d’avoir eu une pensée pour eux lorsqu’ils se sont emparés du pouvoir en Tunisie.
A la fin des années 2010, notre pays affichait une santé économique fort enviable. Les caisses de l’Etat n’étaient pas vides. Les dettes étaient, pratiquement, nulles et les taux de croissance économique élevés.
Dès 2011, c’est le coût d’arrêt total. Tous les mécanismes de production se sont arrêtés. Les nouveaux maîtres du pays ont commencé un travail de sape des édifices de l’économie par le recours à des recrutements en masse dans la fonction publique et en désignant des responsables acquis à leur cause dans les principaux postes de responsabilité. Les compétences nationales étaient, du coup, écartées au profit des intérêts partisans et corporatistes.
Les différentes élections qui ont eu lieu depuis n’ont apporté que plus de destruction du tissu économique et de détérioration de la situation. La paupérisation du peuple s’est enclenchée au point que l’écrasante majorité des Tunisiens est, à l’heure actuelle, dans une situation critique. Le pouvoir d’achat n’a jamais été aussi bas et les crises et pénuries dans toutes les matières sont inédites. On nous dira que la cause n’est pas, nécessairement, interne. Certes. Mais nous savons, pertinemment, que notre pays a traversé bien des crises en 2008, par exemple, et qu’il s’est toujours bien comporté et a réussi à s’en sortir.
Les responsables de l’époque et bien d’autres avant eux se caractérisaient par un minimum du sens de responsabilités et surtout de civisme.
Ils ne mettaient pas leurs intérêts personnels ou ceux de leurs maîtres en premier. Bien qu’on n’aille pas jusqu’à les considérer comme des enfants de chœur ou des chérubins. Toutefois, ils n’avaient pas cette avidité et cette cupidité sans bornes des maîtres du pays depuis 2011.
Ces derniers ne se sont pas contentés de se remplir les poches mais ont distribué à gauche et à droite les richesses du pays à leurs amis et ont accordé des privilèges et des avantages à leurs anciens protecteurs étrangers sous diverses formes. Les recrutements massifs dans la fonction publique ont connu des pics de 22.000 personnes/an. Les dépenses occasionnées par les dédommagements des «victimes du despotisme» ont ruiné l’Etat. Mais, malgré tout, on continue de demander encore des dédommagements pour au moins 30.000 présumées victimes. Les montants exigés s’élèveraient jusqu’à… 3.000 milliards de nos millimes.
C’est pourquoi, il y aurait lieu de concentrer les affaires de corruption et de dilapidation des biens publics, entre autres, sur ces dossiers. Leurs prolongements ne sont pas encore connus comme il se doit mais on devine bien qu’ils ne manqueront pas d’avoir des retentissements au-delà de nos frontières.
Application stricte de la loi
La lenteur constatée au niveau du traitement de ces affaires a de quoi étonner. Durant toute la dernière décennie, rien n’a été fait pour s’attaquer à la corruption. De vaines tentatives ont été entreprises, mais elles sont mortes-nées. Le fait de commencer à les exhumer effraie, à n’en point douter, plus d’un. Ceux qui se sentent impliqués de près ou de loin vont tout faire pour que le processus ne soit pas enclenché. Ils dresseront tous les obstacles possibles (politiques, économiques, sociaux…) pour que rien n’avance.
On comprend mieux, donc, cette effervescence de l’opposition qui se permet tous les excès pour essayer de détourner l’attention de l’opinion publique.
Alors on voit que le débat est plutôt axé sur les aspects politiques et des droits et libertés. Ce qui est une façon comme une autre de noyer le poisson. Le vrai débat n’est pas celui que soutiennent ces «défenseurs» des droits et des libertés. La liberté ne permet pas tout. Il ne faut pas faire l’amalgame entre application stricte de la loi et règlement de compte. C’est à la justice de trancher et non aux politiciens.
Personne ne peut accepter que l’Etat ou n’importe quel autre organisme foule aux pieds les acquis du peuple. Aucun citoyen ne peut être injustement condamné (qu’il soit homme politique, avocat ou, surtout, simple individu). Ce n’est pas parce que les personnes arrêtées jouissent d’une certaine renommée que l’on ne doit pas les juger. Il est vrai, toutefois, que la justice doit se faire dans le respect de la présomption d’innocence. Tout comme pour le simple Tunisien qui ne bénéficie d’aucun comité de défense composé d’une armada d’avocats !
Des milliers de Tunisiens sont arrêtés chaque année et ne bénéficient pas d’un tel intérêt. Et on ne va pas affirmer qu’ils sont tous coupables.
L’arrestation de quelques personnes ces derniers jours ne doit pas servir d’alibi pour certains qui ne s’empêcheront pas de demander le secours de leurs «amis» étrangers facilitant, ainsi, une ingérence éhontée de gouvernements étrangers et de personnalités suspectes.
Notre pays n’est pas obligé de suivre des consignes venues d’ailleurs. Bien sûr, ces pays auraient dû comprendre depuis longtemps que ces politiques d’ingérence ne mènent à rien. Quant aux libertés et aux droits qu’ils nous demandent de respecter, il vaudrait mieux qu’ils commencent, eux-mêmes, à les respecter. Au nom de ces « valeurs », ils devraient respecter les pays qui cherchent à tracer leur propre voie et à appliquer leur propre politique.
Aucun pays ne peut accepter des directives venues d’ailleurs. Les agents locaux infiltrés dans les organisations et les formations politiques sont bien dans leurs rôles. A savoir faciliter davantage l’interventionnisme étranger dans nos affaires.
Pourtant, ces gens pourraient être plus utiles s’ils apportaient des solutions concrètes aux vrais problèmes des Tunisiens et en se rangeant du côté du droit et de l’intérêt du peuple. C’est la mission d’une opposition authentique.