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Reportage: Kairouan, la rose

Plus qu’un slogan touristique, «Ward Kairouan» est une invitation à découvrir les mille et une facettes de la douceur des roses kairouanaises. Une courte, mais intense virée à Kairouan qui apporte une rosée de fraîcheur, de couleurs et de senteurs. De bien-être surtout.


Traditionnellement connue pour le vert, couleur de l’Islam et de ses lieux de culte, le rose va lui emboîter le pas pour son fort potentiel de culture de roses dans les champs et rosiers de la ville.

La Tunisie regorge de produits du terroir aux valeurs inestimables et au potentiel d’exploitation remarquable, mais sous-estimé. Chaque ville ayant sa symbolique et son produit phare, la capitale des Aghlabides, Kairouan, a célébré jeudi 4 mai 2023 celle qui est devenue au fur et à mesure son emblème, la rose.

Cette journée enrichissante et pleine de découvertes a été marquée par des festivités autour des roses de Kairouan. Avec l’eau de rose, une fois extraite et distillée, on peut tout faire ou presque et l’utiliser dans plusieurs produits, de la pâtisserie à la parfumerie, en passant par les cosmétiques et les crèmes pour la peau.

Au marché de la grande place à Kairouan, près de la grande mosquée Okba Ibn Nefaa, les marchands s’activent à écouler leur marchandise. D’un geste de la main du marchand, une vallée de roses glisse pour attirer le client et lui en mettre plein la vue. Les passants n’hésitent pas à rentrer avec une rose sur le coin de la tête pour s’embellir ou dans la paume de la main pour en renifler l’odeur douce et délicate.

Ainsi, dans le cadre de la journée organisée à Kairouan sur le thème «La Rose de Kairouan, un produit du terroir emblématique», plusieurs visites de sites se sont déroulées en vue de promouvoir ce produit phare. A la rue El Kasba en face de la grande mosquée Okba Ibn Nafaa, un groupe de touristes est venu profiter de son séjour pour découvrir le patrimoine historique de la ville, ancienne capitale du monde musulman. Alors une visite guidée s’impose et débute par les grandes artères du marché extérieur.

Attrait pour les roses

En parcourant les quelques stands de roses, on tombe vite sous le charme des roses exposées. Le kilogramme de roses de Damas est de 10 D pour en extraire notamment l’eau de rose. Mais il faut compter au moins 4 kilos de pétales de roses pour avoir une bonbonne de 2 litres d’eau de rose distillée. Ce qui démontre qu’il faut en produire davantage pour satisfaire la demande croissante en eau de rose.

Sur les étals également, le kilo d’une botte de aterchiya est de 3 dinars. La rose permet à la ville de rayonner sur la Tunisie et d’accroître son attractivité. Toute cette démarche s’inscrit dans le cadre d’une stratégie du projet d’accès aux marchés des produits agroalimentaires et de terroir.

Deux régions ont été sélectionnées : Nabeul et Kairouan, à travers la liste des produits du terroir inventoriés à l’échelle des 24 gouvernorats de la Tunisie. Ce projet pilote a listé 3 produits pour le gouvernorat de Kairouan, à savoir la rose de Kairouan, la figue de Barbarie d’Al Ala et l’huile d’olive Oueslati.

La coordinatrice tunisienne du projet Pampat, Lamia Thabet, ne cache pas sa satisfaction et son ambition grandissante à valoriser les produits du terroir: «Les Tunisiens ne savent pas que Kairouan est une région riche en roses et nous voulons faire partager avec eux cette richesse. Avec toutes les possibilités que cette filière pourra offrir en termes d’emploi et comment ramener une nouvelle clientèle de touristes tunisiens et étrangers à Kairouan. Ce produit est déjà vendu à l’international en tant qu’essence et huile essentielle pour les parfums. Il y a beaucoup de possibilités dans la cosmétique. Dans la gastronomie, la gamme peut s’élargir et créer des produits à base de roses qui feront l’identité de la ville de Kairouan et drainer du monde».

Il s’agit globalement d’améliorer la visibilité et la qualité du produit, d’accroître son attractivité à travers toute une démarche de promotion de l’eau de rose de Kairouan. C’est un potentiel grandissant qui va permettre de fixer les populations dans leurs régions grâce à la création d’emplois et la dynamique économique et freiner les migrations vers l’Europe.

Après l’accueil à la rue El Kasba en face de la Mosquée Okba, c’est l’Espace Nakcha qui a abrité l’événement. Plusieurs visites de producteurs locaux de roses fraîches et de produits à base de rose de Damas ont eu lieu à Dhraa Ettammar. Mais également une visite d’une parcelle de rosier à Dhraa Ettammar, puis un peu plus loin dans une unité de distillation de rose faisant partie du groupe SEBRI. S’ensuit une expo-vente de produits à base d’eau de rose qui s’est tenue dans l’espace Nakcha.

Objectifs des organisateurs

L’événement a pour objectif de faire découvrir Kairouan comme l’une des principales zones de production de roses de Damas en Tunisie et de promouvoir davantage les roses de Kairouan réputées pour leur parfum envoûtant et plébiscité par les parfumeurs. L’accent sera mis aussi sur les potentialités touristiques offertes autour de ce produit phare.

La valorisation des produits du terroir vise à augmenter l’attractivité de Kairouan comme destination incontournable pour le tourisme alternatif. La stratégie tunisienne de promotion et de valorisation des produits du terroir et sa mise en œuvre à Kairouan sont réalisées avec l’appui du projet Pampat mis en œuvre par l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi) avec un financement du secrétariat d’Etat à l’Economie de la Confédération suisse (SECO).

Farouk Ben Salah, expert de l’Onudi, rappelle le contexte du projet Pampat depuis 2022 axé sur les deux régions, Kairouan et Nabeul, en vue d’assurer, notamment, l’essor des produits du terroir  à l’international et leur nouvelle notoriété nationale.

La nécessité de développer et d’accroître cette filière de la rose a été avancée afin d’exploiter au mieux son fort potentiel de production et de commercialisation.

Selon lui, les deux zones de culture de la rose de Kairouan de grande qualité que sont Khazazia et Dhraa Ettammar sont peu connues de la population. Il révèle que beaucoup d’actions commerciales autour des roses seront entreprises avec la programmation d’une foire ou d’un festival de la rose sur le plan local.

A l’échelle internationale, des intérêts à l’exportation sont dégagés afin de développer et augmenter les ressources économiques et financières de la Tunisie. La rose accapare la part du lion et occupe toutes les tables de Kairouan et devient une priorité régionale. Pour goûter des macarons, de la glace ou encore les délicieux makroudhs à l’eau de rose de la ville, les consommateurs en auront pour leur argent.

Avec son parfum unique, la rose de Kairouan, cultivée dans les localités de Khazazia et Dhraa Ettammar, est l’un des produits phares de la région. Sa culture est très répandue dans la région où chaque printemps s’installent des marchés quotidiens autour des remparts de la médina pour l’exposition et la vente au détail des roses fraîches destinées à la distillation artisanale.

La rose de Kairouan appartient à l’espèce Rosa Damascus ou la rose de Damas qui est l’espèce la plus recherchée au monde, pour la production d’huile destinée à la parfumerie. Ses qualités apaisantes et anti-inflammatoires lui permettent d’agir contre les irritations et inflammations de la peau comme l’eczéma et les rougeurs en général.

Elle est aussi souvent utilisée comme rééquilibrant nerveux et hormonal, pour calmer les tensions nerveuses dans le corps. Finalement, ses actions antioxydantes et astringentes font d’elle une huile pour les peaux sèches et matures et permettent de limiter le vieillissement de la peau. La Rose de Damas est souvent retrouvée en cosmétique, grâce à son large spectre de bienfaits. On l’utilise, également, pour la préparation de confitures, de pâtisseries, d’infusions ou de pots-pourris.

Cette fleur typique a été sélectionnée comme l’un des trois produits phares de Kairouan qui sont en train d’être promus dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie nationale de valorisation et de promotion des produits du terroir. La Stratégie a été lancée en 2022 par le ministère de l’Agriculture, en collaboration avec l’Apia et d’autres ministères et les gouvernorats de Kairouan et de Nabeul. Elles ont été choisies comme régions pilotes pour la mise en œuvre des différents axes d’intervention.

Enfin, la visite de l’usine de production de l’eau de rose distillée du groupe Sebri, qui va entrer bientôt en exploitation grâce à la coopération chinoise et allemande, va devenir le poumon économique de la ville grâce aux 1.000 ha de surface, aux centaines d’emplois générés et aux gains de productivité tirés en millions de dinars… La visite guidée a permis de connaître également les méthodes de production artisanale et ancestrale de l’eau de rose distillée.

Kairouan et ses industriels voient désormais grand. Merci la Rose qui arrose la ville de la joie de travailler et de vivre.

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