Une conférence intitulée, « Autonomisation des femmes en Méditerranée : une vision tunisienne » a été organisée la matinée du 24 mai en ouverture de l’assemblée générale de l’Alliance des agences de presse méditerranéennes (Aman), qui s’est tenue à Djerba les 24 et 25 mai.
La Tunisie a pris aujourd’hui, les rênes de l’Alliance des agences de presse méditerranéennes (Aman), qui regroupe 19 agences parmi les plus prestigieuses des deux rives de la mer intérieure. Cette nomination avait déjà été annoncée lors de la 30e session de l’Assemblée générale de l’Aman qui s’est tenue à Dubrovnik, Croatie, en octobre 2022. Le Président directeur général de la TAP, NejahMissaoui, occupera donc la présidence de l’Aman pour un mandat d’un an, 2023-2024. Selon les usages, l’agence tunisienne a par conséquent accueilli la 31e Assemblée générale de l’Aman à Djerba les 23 et 24 mai. Avant que l’Assemblée ne démarre ses travaux, une conférence intitulée, « Autonomisation des femmes en Méditerranée : une vision tunisienne » a été organisée la matinée du 24 mai avec pour objectif de donner le ton de la bataille de l’indépendance et du partage du pouvoir, dans toutes ses formes, que les Tunisiennes mènent depuis plusieurs décennies.
L’empowerment rend possible le choix
Le concept de l’autonomisation (« tamkin » en arabe et empowerment en anglais) des femmes et des filles, largement répandu ces dernières années sous l’influence probablement de recommandations, conventions et stratégies onusiennes est pourtant apparu dès les années 60. L’universitaire spécialisée dans le genre, Amel Grami, revient sur la définition du concept en se référant à la langue arabe. « Le « tamkin » vient de la racine « makkana », à savoir rendre capable et renforcer les capacités de quelqu’un. Il s’agit moins d’une guerre des sexes que des possibilités données aux femmes de choisir et de prendre des décisions déterminantes, qui concernent leur vie, dont celles en lien avec l’exercice de responsabilités ».
Amel Grami, qui coordonne le Master Genre, culture et société à l’Université de la Manouba, fait remarquer que l’autonomisation des femmes, qui suppose une redistribution du pouvoir d’une manière plus égalitaire entre les genres, nécessite souvent la mise en place de mécanismes de solidarité entre les femmes.
« C’est pour cela que l’autonomisation représente une valeur, qui doit être renforcée », insiste l’universitaire, qui a balayé lors de son intervention les différentes formes que prend l’empowerment : de son aspect social au psychologique et du religieux au politique. Certes cette valeur a bénéficié en Tunisie d’une législation favorable aux femmes adoptée par le président Bourguiba à la fin des années 50, notamment concernant la scolarisation et la santé reproductives, or, constate Grami : « Nous ne sommes plus satisfaites aujourd’hui des acquis du Code du statut personnel ». Appelant les autorités à engager des études d’impact sur les retombées de la Loi 58 du 11 août 2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, sur la vie des femmes victimes de violences, Amel Grami a par ailleurs fait remarquer que la vulnérabilité touchant les femmes autant que les hommes, on parle de plus en plus aujourd’hui de renforcement des capacités des deux sexes pour garantir un développement durable et pérenne.
Former les femmes renforce leurs capacités
Thouraya Belkahia, Directrice générale du Centre de recherches, d’études, de documentation et d’information sur la femme (CREDIF), a de son côté présenté une intervention sur : « L’approche du CREDIF dans l’autonomisation des femmes ». Elle y a focalisé sur le travail du CREDIF quant à l’objectif de l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et en premier lieu les violences sexistes. Ce travail étant soutenu par des recherches et des recommandations destinées au ministère de tutelle, à savoir le ministère de la Femme, de la Famille, de l’Enfance et des Personnes âgées. Le CREDIF a parmi ses missions également la formation et le plaidoyer pour l’autonomisation des femmes.
« En 2014 a été lancée la première étude sur ce sujet, elle a traité plus spécifiquement de l’autonomisation économique. En 2019 a été engagée une recherche sur l’autonomisation politique des Tunisiennes accompagnée d’une Académie politique pour la sensibilisation et le plaidoyer ». Des formations organisées par le Centre ont visé les fonctionnaires de l’administration et des différents ministères afin de les initier à l’approche genre. Le recyclage des agents de police et de la garde nationale dans la lutte contre les violences faites aux femmes est un autre volet de la stratégie présentée par Thouraya Belkahia quant à la thématique de l’autonomisation des femmes. Un programme de lutte contre la cyber violence destiné aux magistrats, aux responsables des centres d’accueil des femmes violentées et aux femmes engagées dans la vie publique a également été produit par le Credif.
Les deux intervenantes ont par ailleurs beaucoup insisté sur l’image de la femme dans les créations audiovisuelles et littéraires. Puisqu’une image favorable au genre ne peut que rendre le processus d’autonomisation des femmes plus fluide et moins jalonnée d’embuches et de difficultés.
Une table ronde réunissant journalistes, et militantes pour les droits des femmes a conclu cette première matinée de l’Assemblée générale de l’Alliance des agences de presse méditerranéennes.