Accueil A la une Tissu industriel tunisien | Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières : La transition verte n’est plus un choix

Tissu industriel tunisien | Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières : La transition verte n’est plus un choix

 

Aujourd’hui, la décarbonation est une question de vie ou de mort pour les entreprises tunisiennes exportatrices. L’entrée en vigueur du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, aussi dit taxe carbone aux frontières, peut léser les PME si ces dernières persistent dans l’inaction.

Forte de ses avantages concurrentiels, tels que la proximité avec l’Europe, le riche réservoir du capital humain, l’intégration du secteur privé dans les chaînes de valeur mondiales…, la Tunisie s’est longtemps reposée sur ses lauriers. Or, sur le plan économique, beaucoup de choses ont évolué au cours de ces dernières années.

La transition vers une économie verte et durable, motivée par la lutte contre le changement climatique, est, en ce sens, l’une des mutations les plus profondes que les diverses économies ambitionnent de réussir sur le moyen terme. En effet, pour atteindre la neutralité carbone, plusieurs actions ont été engagées à l’échelle planétaire. Il s’agit, par exemple, d’accélérer la transition énergétique, de développer l’économie circulaire, de mettre en place des politiques RSE… Mais aussi de pénaliser les pollueurs, notamment les entreprises polluantes, l’objectif étant de les inciter à adopter de nouveaux modèles respectueux de l’environnement. Parmi les outils adoptés dans le cadre du principe «pollueur payeur», figure le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (Macf), aussi dit « taxe carbone européenne », qui a été instauré par l’Union européenne, fin 2022. 

Comment la taxe carbone aux frontières fonctionnera-t-elle? 

Perçue par certains observateurs comme étant une manœuvre protectionniste visant à protéger le marché européen de la concurrence des pays émergents, cette nouvelle taxe va permettre à l’Union européenne d’étendre ses normes environnementales aux entreprises exportant sur son territoire.

Concrètement, l’instauration de ce mécanisme va imposer aux importateurs de l’Union européenne d’acheter des certificats «carbone» correspondant au prix du carbone qui aurait été payé si les marchandises avaient été produites conformément aux règles de l’Union européenne en matière de tarification du carbone.

Le prix des certificats sera calculé en fonction du prix moyen hebdomadaire des quotas du Système d’échange de quotas d’émission de l’UE (Seqe) vendus aux enchères. Il est à rappeler, ici, que le Seqe est le système de quotas d’émission de l’Union qui définit un plafond pour la quantité d’émissions de gaz à effet de serre pouvant être rejetées par les installations industrielles en Europe et qui permet aux producteurs de vendre et d’échanger des quotas d’émission. 

Selon les législateurs européens, le Macf va contribuer à réduire le risque de «fuite de carbone», un phénomène traduisant le déplacement des industries émettrices de gaz à effet de serre en dehors de l’Union européenne  pour éviter des normes environnementales strictes. 

Cette nouvelle taxe carbone s’appliquera, dès le 1er octobre 2023, à certains produits, tels que le ciment, le fer, l’acier, l’aluminium, l’engrais, l’électricité, les composants automobiles et l’hydrogène, et devrait être étendue, par la suite, à d’autres secteurs, tels que le textile et l’agroalimentaire. Elle n’entrera, réellement, en vigueur qu’à la fin de la phase de transition (2023-2025),  au cours de laquelle, les importateurs devront déclarer les émissions carbones des marchandises importées  sans devoir payer le surcoût. 

Les entreprises exportatrices lésées ? 

En effet, l’entrée en vigueur de ce mécanisme ne sera pas sans effet sur le secteur tunisien des exportations  puisque le marché européen s’accapare 75% des exportations tunisiennes. En d’autres termes, l’application de la nouvelle taxe aux produits tunisiens exportés vers l’Europe  se traduira par un surcoût qui affectera la compétitivité des entreprises tunisiennes, déjà petites et fragilisées par la succession des chocs exogènes. 

Aujourd’hui, la transition verte du tissu industriel tunisien n’est plus un choix. Les unités de production sont désormais contraintes de réduire leurs empreintes carbone, à travers l’accélération de leurs transitions énergétiques ou encore  l’adoption de nouvelles technologies moins polluantes dans le seul espoir  de ne pas perdre des parts de marché et parfois, le seul marché qui leur permet de croître.

Pour aider les entreprises à se préparer à ce grand changement, certes vertueux, mais qui nécessite des investissements conséquents, le ministère de l’Industrie, de l’Energie et des Mines s’est penché sur un programme baptisé «SOS décarbonation» qui va accompagner les entreprises bénéficiaires à assurer leur transition énergétique et écologique. Son objectif est de baliser la voie pour une mise à niveau des processus industriels. Un travail qui n’est pas, cependant, de tout repos et qui nécessite du temps, de l’argent et des compétences. Aujourd’hui, la décarbonation est une question de vie ou de mort pour les entreprises tunisiennes exportatrices. C’est pourquoi il est important d’accélérer cette transformation qui peut être, paradoxalement, génératrice d’opportunités pour la Tunisie. 

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