Passés ces moments, l’heure est aux jeux des prévisions. Quel sera le mode de fonctionnement du nouveau Chef du gouvernement ? Comment fera-t-il pour s’acquitter de ses lourdes charges ? Sera-t-il enclin à communiquer peu ou prou, selon la méthode de sa discrète prédécesseure ? Comment dirigera-t-il son équipe? Est-ce la continuité à La Kasbah ou bien place à la rupture ?
Passés les premiers moments de surprise suite à la décision présidentielle de remplacer Najla Bouden par Ahmed Hachani, les observateurs ont donné libre cours à leurs analyses, leurs interprétations, voire leurs extrapolations quant aux tenants et aboutissants de ce remaniement opéré à la tête de l’exécutif. Un changement perçu comme brusque, alors qu’il était annoncé, attendu depuis plusieurs mois. Le timing de l’annonce, il est vrai, tard dans la soirée, a incité les interprétations les plus tendancieuses à fleurir. Une quasi-unanimité pour qualifier la décision de mettre fin aux fonctions de la Cheffe du gouvernement de limogeage pur et simple, en usant parfois de qualificatifs bien pires.
Alors que lors de la cérémonie de passation à laquelle le Président de la République a assisté, les formes, outre le protocole, ont été bien respectées. Le Chef de l’Etat a fait l’éloge de la responsable sortante. L’ambiance était plutôt cordiale. Mme Bouden a quitté ses fonctions avec les honneurs, la tête haute et le sourire aux lèvres.
Passés ces moments, l’heure est aux jeux des prévisions. Quel sera le mode de fonctionnement du nouveau Chef du gouvernement ? Comment fera-t-il pour s’acquitter de ses lourdes charges ? Sera-t-il enclin à communiquer peu ou prou, selon la méthode de sa discrète prédécesseure ? Comment dirigera-t-il son équipe ? Est-ce la continuité à la Kasbah ou bien place à la rupture ?
Or, et selon les dispositions de la Constitution, les pouvoirs sont concentrés entre les mains du Chef de l’Etat. En effet, la Constitution de 2022 dispose que l’exécutif est exclusivement entre les mains du Président de la République qui trace les grandes orientations de la gestion des affaires quotidiennes et courantes du pays.
Assainissement de l’administration, le grand test
Et comme le nouveau « patron » de La Kasbah n’a pas de qualifications reconnues en matière de politique et d’économie, on s’attend à ce qu’il soit, comme sa prédécesseure, un accompagnateur des décisions de Kaïs Saïed. Cela étant dit, et compte tenu de son expérience dans l’administration, on suit de près et non sans curiosité, comment il compte lancer les grands chantiers tels que la campagne « d’assainissement de l’administration » annoncée et promise par le Chef de l’Etat.
Il faudra donc espérer voir la mise en place d’une bonne équipe d’experts pour venir à bout de ces grandes réformes, sans parler des conseillers en communication qui seront chargés d’en expliquer la pertinence auprès de l’opinion.
A son actif, Najla Bouden, et rien qu’au mois de juillet, a supervisé, au moins, une dizaine d’activités touchant aux différents domaines de la vie socioéconomique, mais qui n’ont jamais été révélées aux médias.
Qui reste et qui partira ?
Après l’annonce erronée de la mise en place d’une équipe chargée de la communication à La Kasbah, et qui s’est avérée une fake news, les observateurs, a fortiori, les journalistes s’attendent donc de voir le nouveau cabinet soutenu par des conseillers.
L’autre question fatidique concerne l’équipe gouvernementale. Qui reste et qui partira ? Qui est rassuré de garder son maroquin et qui se sait déjà sur le départ et est en train de faire ses cartons à l’heure qui l’est ?
Pour ne pas nous perdre en conjectures, nous avons retenu entre autres hypothèses, celles émises par Kaïs Karoui, ancien membre de la campagne électorale de 2019 du Président de la République, et activiste politique, passant pour être un des plus fidèles interprètes des idées et autres conceptions du Chef de l’Etat.
En effet, s’exprimant pas plus tard que mercredi sur les ondes d’une radio de la place, Karoui a estimé que ce remaniement ministériel devait conduire à une refonte du cabinet au sein duquel certains ministres doivent être maintenus. Et il les a nommés. Il s’agit, selon lui, du ministre de l’Intérieur, Kamel Fekih, du ministre des Affaires sociales, Malek Ezzahi, de la ministre de la Justice, Leila Jaffel, du ministre des Affaires étrangères, Nabil Ammar, et de la ministre de la Famille, Amel Moussa Belhaj. Kaïs Karoui a considéré que les autres devraient partir. Quel est le vrai du faux ? Attendons voir !
Bon à savoir, en outre, que depuis octobre 22, le même Kaïs Karoui affirmait que 150 mille bénéficiaires de l’amnistie générale ont rejoint la fonction publique, les considérant comme « des grains de sable bloquant la machine » administrative et le bon fonctionnement de l’Etat.
Le Président de la République vient de réitérer les mêmes idées devant le nouveau chef du Gouvernement qui sera appelé à ouvrir ce grand chantier des nominations « illégales ». Il s’agirait, alors, du premier test grandeur nature pour Ahmed Hachani qu’il doit réussir coûte que coûte pour espérer entamer son mandat sous les meilleurs auspices.
Il va de soi que le nouveau chef du Gouvernement aura d’autres challenges à relever. Faut-il s’attendre, alors, à ce qu’il prenne des initiatives, mêmes limitées, ou pas du tout, dans un «navire » où les commandes resteront, vraisemblablement, entre les mains du maître de Carthage ?