Ça y est, sitôt parti, ce championnat tunisien a élu son premier entraîneur déchu, Ratko, l’ex-entraîneur du CAB. Seulement deux journées et, bien sûr, deux défaites qui ont condamné un technicien de métier issu d’une grande école, et qui a passé deux mois à travailler, avant de voir tout s’effondrer. Du côté bizertin, on lui fait porter le chapeau : mauvaise qualité des joueurs, défaites face au CSS et l’USM et, bien sûr, c’est l’entraîneur qui doit tout payer, comme si les dirigeants n’ont aucune responsabilité dans tout ce qui se passe, et comme si les joueurs ne sont pas fautifs. Bref, Ratko s’en est allé et c’est Kanzari qui ressurgit, lui qui sort d’une expérience ratée en sélection olympique.
Ce qui s’est passé au CAB va se produire dans d’autres clubs. Il suffit de deux ou trois journées pour que l’on s’aperçoive que l’entraîneur est un «loser» ou qu’il est incompétent. Est-ce qu’en deux ou trois journées d’un début de saison, on peut vraiment conclure que le mal vient de l’entraîneur ? Qui, en fait, décide que c’est un bon ou un mauvais entraîneur ?
Généralement, c’est une nouvelle frange du public qui s’installe derrière un écran et un clavier, sans être connaisseur (la plupart sont des adolescents ou des jeunes qui n’ont aucun vécu en foot) et qui matraque l’entraîneur. Un effet et une ampleur grandissants qui altèrent l’ambiance et qui finissent par désigner un bouc émissaire, l’entraîneur, bien sûr. Tout cela, parce que la barrière qui sépare la sphère de l’équipe de celle des supporters est tellement basse et franchissable. Parce que les dirigeants, à faible personnalité et frileux, cèdent au «populisme» d’un public virtuel et pas courageux. Saïd Saïbi et Mouîne Chaâbani sont, en ce moment, la cible de la colère d’une partie du public sur les réseaux sociaux. Les deux savent que la machine est lancée et que des résultats moyens dans les prochaines journées vont leur coûter cher. On ne fait que commencer, et, comme d’habitude, une tendance et une idée reçue se construisent sur les réseaux sociaux, pour que l’on soit convaincu que le mal vient de l’entraîneur. Limoger un entraîneur et un staff avant même que l’on comprenne pourquoi ça n’a pas marché est une absurdité. Et ce que font nos dirigeants de clubs n’est pas moins absurde, du moment qu’ils s’alignent sur ce que des supporters fanatiques, passionnés, déchaînés, décident sur un coup de colère. Les grands dirigeants défendent leurs entraîneurs quand ils sont conscients qu’ils font du bien parce qu’en les défendant, ils se protègent eux-mêmes et, avec eux, le club. Le bal du limogeage des entraîneurs a commencé et risque de se poursuivre d’ici le retour de trêve. A qui le tour maintenant ?