A chaque projection budgétaire, c’est toujours les mêmes enjeux qui reviennent à la charge : remise en ordre du déficit budgétaire et stabilité économique. Belles ambitions somme toute.
Mais encore faut-il se donner les moyens de ses ambitions. Une exigence qui fait toujours défaut. On est même très loin du compte.
Les derniers pointages confirment, en effet, que le déficit budgétaire serait toujours très conséquent pour pouvoir espérer une remise en ordre rapide, alors que le reste des indicateurs macroéconomiques sont au rouge. Et tout laisse croire qu’ils le seront pour longtemps.
Les dépenses énergétiques, les subventions pour les produits de base, les budgets alloués au maintien des équilibres financiers des entreprises publiques et la masse salariale continuent à maintenir une forte pression sur le budget de l’Etat.
Face à ce tableau complexe, il est très difficile de se prononcer avec certitude sur les priorités de nos décideurs. L’expert Ezzeddine Saïdane disait tout récemment sur les ondes d’une radio locale que «personne n’a une idée précise sur les caractéristiques du projet de budget de l’État pour 2024 : serait-il un budget de sauvetage économique, de développement ou juste un document comptable comme les dernières années». Pour lui, le dispatching est totalement flou.
Cela est d’autant plus vrai que «les budgets des trois dernières années n’ont pas été totalement clôturés, et que certaines dépenses et autres programmes n’ont pas été non plus opérés».
On apprend d’ailleurs que la Tunisie s’apprête à contracter, début 2024, un prêt syndiqué de 3,5 milliards de dinars en devises pour le remboursement d’une ancienne dette !
On parle également d’un besoin urgent de 10,3 milliards de dinars pour équilibrer le budget du prochain exercice. La pression est donc trop forte, alors que la marge de manœuvre est très réduite. Du moins à court terme.
Cette situation délicate nous autorise à penser que sans un soutien financier international, il serait miraculeux d’honorer les engagements de la prochaine étape. Car on voit mal le secteur financier local assumer à lui seul cette responsabilité.
Certes, l’approche du compter-sur-soi qu’on ne cesse de prôner est importante, mais elle reste peu fiable dans le contexte actuel. Le recours aux ressources propres suppose justement une économie performante reposant sur un volume d’investissement assez conséquent. Ce qui n’est pas le cas malheureusement. Bien au contraire, le rythme est, depuis plus de 10 ans, en perte de vitesse préoccupante.
Les dernières statistiques relèvent en effet que le volume d’investissement représentait tout au long de la période 2000-2011 environ 25% du PIB. Aujourd’hui, ce taux est de 15% seulement. Une moyenne trop timide pour prétendre pouvoir servir les exigences socioéconomiques nationales.
Le recours donc au financement extérieur reste, plus que jamais, d’actualité. Et la Tunisie est en mesure de reconquérir le capital-confiance des bailleurs de fonds internationaux et même se présenter aux marchés financiers extérieurs en position de force pour peu qu’elle s’appuie sur des programmes de développement fiables.
A défaut de cette orientation, du reste incontournable, la Tunisie serait contrainte d’opter pour la compression des dépenses et la surimposition. Un scénario qui risque de compromettre l’objectif prioritaire fixé pour 2024, celui de réinstaurer l’Etat social.