La santé pour tous est une priorité politique et sociale autant qu’un devoir moral pour tous les intervenants. Cependant, le problème d’accès aux soins dans les régions de l’intérieur n’est pas nouveau, même si le contexte dans lequel il s’inscrit change.
La Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) prend en charge des médicaments particulièrement coûteux, dont la plupart ne sont pas disponibles dans les hôpitaux ou vendus en pharmacie. Ce sont essentiellement les traitements de chimiothérapie, de maladies neurologiques rares, de stérilité et d’autres affections lourdes.
Qu’entend-on par médicaments spécifiques ?
Selon une déclaration du ministre des Affaires sociales, Malek Zahi, la Cnam compte pour les traitements carcinologiques, à eux seuls, 1.400 bénéficiaires pour un coût d’environ 73 millions de dinars.
Ces médicaments sont dits spécifiques, car les demandes déposées ne passent pas par les circuits ordinaires de l’administration. L’accord se fait via des commissions médicales spéciales, ce qui permet aux assurés d’avoir des bons d’octrois de ces produits. La durée du traitement prescrit ne peut pas excéder 6 mois et le renouvellement d’un médicament ne peut avoir lieu qu’après un délai déterminé résultant de la posologie et des quantités précédemment accordées.
La Cnam a gagné ses lettres de noblesse en travaillant intensément sur le raccourcissement des délais d’attente. Les commissions de médicaments spécifiques se sont multipliées et siègent désormais au niveau des régions, alors qu’elles étaient avant uniquement dans les districts de la Cnam à Tunis, Sousse et Sfax. Cependant, la délivrance des ordonnances pour les malades originaires de Kasserine ne peut être faite qu’aux pharmacies des policliniques de la Cnss à Sousse ou à Tunis. L’accès à ces médicaments importants et vitaux reste donc un problème important dans cette région et constitue un sujet majeur pour la santé.
Pourquoi Kasserine ?
La santé pour tous est une priorité politique et sociale autant qu’un devoir moral pour tous les intervenants. Cependant, le problème d’accès aux soins dans les régions de l’intérieur n’est pas nouveau, même si le contexte dans lequel il s’inscrit change. Deux obstacles majeurs s’opposent à la distribution équitable des médicaments spécifiques pris en charge par la Cnam. Tout d’abord, le problème de disparités géographiques qui est flagrant et celui de la disponibilité. Pour l’expliquer, il faut imaginer le malade devant se déplacer très tôt le matin et qui fait des heures de route et des centaines de kilomètres pour récupérer son traitement de Sousse ou de Tunis. La peine de cette catégorie vulnérable déjà anéantie par la maladie s’alourdit, ainsi par le long trajet fatigant et coûteux.
Cet éloignement peut générer un renoncement au traitement. De plus, certains produits pharmaceutiques doivent être stockés à une température basse et nécessitent des glacières ou des sacs de glaçons. Ils perdront leur efficacité s’ils sont transportés dans des conditions inadéquates.
Cette inégalité dans la distribution de médicaments se double d’une autre iniquité car, parfois, le médicament n’est pas disponible et le malade doit revenir une ou plusieurs fois pour le récupérer en totalité ou par tranches. En effet, des pénuries sont notées, puisque la chaîne d’approvisionnement dépend étroitement des sociétés de production étrangères. L’enjeu est donc de taille, surtout que le retard ou l’arrêt de traitement pourraient entraîner un préjudice important pour les patients. Par conséquent, il importe qu’un système de distribution efficace de ces traitements essentiels accordés par la Cnam soit mis en place à Kasserine.
Des solutions en cours
La dispensation des médicaments spécifiques à une unité régionale spéciale d’approvisionnement et de délivrance s’annonce comme une solution efficace pour garantir l’accessibilité continue aux traitements et mettre fin à la souffrance des malades de Kasserine.
Le ministère de tutelle, conscient de ce problème, a tracé des objectifs pour l’année en cours. Un premier texte est paru en décembre 2023, indiquant un projet de création d’un système de délivrance des médicaments spécifiques dans les villes de Kasserine, Gabès, Médenine et Jendouba. Au-delà des engagements théoriques, nous sommes face à deux réalités tangibles. Premièrement, une plus forte implication des structures de la santé publique est non seulement possible, mais indispensable. Elles occuperont une position clé dans cette transformation du système de délivrance des médicaments et doivent collaborer étroitement avec la Cnam pour rapprocher et améliorer les services au profit des bénéficiaires.
Deuxièmement, il faut déterminer les modalités de conditionnement, d’étiquetage ainsi que de traçabilité de ces produits, afin d’assurer la sécurité et la qualité des soins tout au long du processus.
A Kasserine, la concrétisation des mesures prises par le ministère des Affaires sociales est suivie de près par le pharmacien de la Cnam, le directeur régional de la santé et un député de la région. Ayant une vision commune, ils font des efforts pour éviter et éliminer les obstacles et les freins à l’avancement de ce projet pour qu’il soit finalisé dans les plus brefs délais.