Accueil Culture Chroniques de la Byrsa: Le forfait prend de la hauteur à Carthage

Chroniques de la Byrsa: Le forfait prend de la hauteur à Carthage

Il fut un temps, sous l’ère Ben Ali, où le régime voulait faire figurer le pays en tête de classement dans tous les domaines, plus particulièrement dans celui de la protection. La protection de quoi ? De tout : de l’enfance aux handicapés, en passant par les personnes âgées, les femmes battues, la faune en voie d’extinction, etc. Tout y passait, appuyé sur un solide arsenal juridique. Et gare à celui qui outrepassait la réglementation. Les peines les plus sévères lui étaient promises. Cela, sur le papier. Dans la pratique, on voyait, par exemple, des gamins en bordure de l’autoroute brandir au bout de perches suspendues au-dessus de l’asphalte de pauvres caméléons qui se tortillaient au bout d’une ficelle. Il paraît que leur sang est tout indiqué contre certaines pathologies. Et ce n’est là qu’un exemple parmi tant d’autres.

 Dans un tout autre domaine, je voudrais évoquer le cas de certains paysages. Oui, des paysages ont été déclarés protégés pour leur valeur esthétique ou historique. Et je m’arrêterai à celui de la colline de la Byrsa.

Le berceau du plus vieil Etat à l’ouest du bassin méditerranéen: le berceau de la Tunisie actuelle

Site naturel emblématique s’il en fut, la colline de la Byrsa, à Carthage, est au cœur de l’histoire du pays et du parc archéologique de Carthage-Sidi Bou Saïd, au beau milieu d’une zone dite jaune qui couvre pratiquement toute la commune et dans laquelle toute construction est strictement réglementée. Il y est, par exemple, interdit que les constructions dépassent le niveau de R+1 afin de maintenir la colline visible de tous côtés. Or, dès avant la glorieuse révolution, des tricheurs se sont ingéniés à contourner l’obstacle en profitant de la dénivellation des lieux pour aménager des entresols. Puis on n’a même pas cherché à maquiller le forfait. On s’est mis à grimper jusqu’à atteindre, ces toutes dernières années, R+3+buanderie sur la terrasse. Et la colline de commencer par être enveloppée presque de toutes parts, sans que cela ne provoque la moindre réaction des autorités de tutelle, la mairie et les Affaires culturelles en premier lieu.

La colline de la Byrsa est un lieu de mémoire hautement symbolique. C’est le berceau du plus vieil Etat à l’ouest du bassin méditerranéen ; le berceau de la Tunisie actuelle.  Il devrait être l’objet d’un pèlerinage des écoliers tunisiens et le passage obligé de tout visiteur de la métropole antique qui devrait pouvoir en embrasser la vue de partout et en saisir ainsi de loin l’enjeu stratégique en tant que place naturellement fortifiée et en tant que point de contrôle du trafic maritime et terrestre à l’approche de la ville.

En attendant, le rideau rampant masquant le site poursuit son déploiement comme si de rien n’était.

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