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Tribune | L’Ordre des architectes aura cinquante ans, et après ?

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Par Ilyes BELLAGHA*

Le 22 mai marque le cinquantième anniversaire de la naissance de l’Ordre des architectes. Pendant ce demi-siècle, cette institution a été régie par un texte aussi ancien qu’elle-même. Il s’agit d’un Ordre qui a émergé, à l’époque, de la centralité et de l’unicité, associé à un parti unique et à une centrale ouvrière.

Cette structure persiste jusqu’à nos jours, demeurant unique dans son fonctionnement. Ainsi, l’évolution de cette organisation reflète les dynamiques politiques et sociales de son temps.

De nos jours, ce sont les membres de l’institution elle-même qui semblent s’attacher à maintenir sa rigidité, malgré les appels à la modernisation.

En 1974, l’institution comptait environ 200 membres concentrés dans la région du Grand Tunis. En 2024, ce nombre a augmenté de manière significative, dépassant désormais les 3.000 membres répartis sur l’ensemble de la République.

Si un vrai sondage était réalisé, il est fort probable qu’une grande proportion d’architectes considèrera que leur adhésion à l’Ordre se résume principalement au paiement de leur cotisation obligatoire. Ce sondage révélerait également une confusion importante entre la nature d’un Ordre et celle d’un syndicat professionnel parmi les membres de la profession.

À mon sens, deux problèmes rongent cette institution. Tout d’abord, sa soumission totale à un État qui semble mépriser l’architecture, voire la craindre. L’Ordre, en tant qu’agent du cadre démocratique, propose au citoyen un environnement de vie optimal, ce qui devrait être sa mission principale. Cependant, cette mission est compromise par une soumission excessive à des instances gouvernementales qui agissent de manière illicite par rapport à la loi, incitant le citoyen à violer les règles établies. Cette situation engendre un cadre de vie urbain particulièrement déplorable.

Le secteur du bâtiment représente 25 % des investissements totaux du pays, regroupant 2.800 entreprises, dont 100 emploient plus de 100 employés permanents. De plus, ce secteur est dynamique en termes d’échanges, et comme dit l’adage, «quand le bâtiment va, tout va». Ainsi, il est facile de comprendre que la corruption dans ce secteur se propage, affectant également les agents publics.

En termes de centralité, sur le plan culturel et à quelques exceptions près, l’objectif est souvent de parvenir au pouvoir pour y accéder. Cependant, une fois en place, rares sont ceux qui sont disposés à le partager. Le pouvoir, même s’il ne mène à rien de concret, reste une sphère réservée et convoitée.

Bien fréquemment, être membre du conseil de l’Ordre s’apparente à être un oligarque en difficulté financière, ou à un jeune ambitieux qui recherche cette carte de visite pour étendre son influence dans d’autres secteurs d’affaires. Cela reflète une perception erronée de ce que signifie être membre, en particulier pour les présidents de l’Ordre.

Face à ces défis, plusieurs mesures peuvent être envisagées : comme consolider l’indépendance de l’Ordre. Il est crucial de faire comprendre à l’État qu’il est un client comme les autres et que les affaires de l’Ordre doivent rester les affaires de l’Ordre.

Deuxièmement, il faudra passer d’une centralisation à une régionalisation. Plutôt que de simplement décentraliser, il convient de mettre en place une véritable régionalisation, en tirant parti de la nouvelle découpe administrative en districts. Cela permettra une meilleure prise en compte des spécificités régionales et une gestion plus efficace des activités de l’Ordre à l’échelle locale.

Troisièmement, mettre en place un mandat non renouvelable de six ans. Il serait judicieux de fixer des mandats de six ans non renouvelables pour les membres du conseil national ainsi que pour les conseils des districts.

Cela favorisera la rotation des membres et évitera des dérives de toutes sortes au sein des instances dirigeantes.

Quatrièmement, augmentation des ressources de l’Ordre. Pour assurer le bon fonctionnement de l’Ordre et garantir une indemnité juste et équitable pour chaque membre mobilisé, il est nécessaire d’augmenter les ressources financières de l’Ordre. Cela peut passer par une révision des cotisations, la recherche de financements supplémentaires, ou d’autres sources de revenus.

En mettant en œuvre ces mesures, l’Ordre des architectes pourrait surmonter ses défis actuels et renforcer son efficacité et sa légitimité.

I.B.

* Ancien président de l’Ordre et président de l’association «Architectes; Citoyens»

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