Il n’y a pas si longtemps, la Tunisie et la Chine viennent de fêter, en janvier dernier, 60 ans de leurs relations diplomatiques mutuellement bénéfiques. Soit six décennies et pas une ride.
Cela remonte à 1964 où une telle coopération multisectorielle avait pris corps, dans un contexte national marqué par un semblant d’Etat tunisien post- indépendance qui commença, alors, à émerger lentement et se faire une image de soi. A l’époque, le pays, à peine sorti du giron de l’occupant, avait besoin d’une stratégie globale de planification et du développement. L’œuvre n’était pas aussi facile, mais l’ambition d’un jeune Etat vers la renaissance, pour être bien reconnu, fut aussi plus grande. Et c’était dans cette optique qu’il cherchait, inlassablement, à se faire entourer d’amis et de partenaires étrangers.
La Chine venait, parmi les premiers, à avoir répondu à l’appel, avec qui la Tunisie avait des liens solides, basés sur une coopération solidaire aboutie. En vertu de quoi une légion de mégaprojets figurait sur l’ordre du jour des deux pays, dont certains déjà réalisés, d’autres sont encore en plein chantier. D’ailleurs, tant de marchés conclus, suite aux divers accords signés en matière d’infrastructures, de technologies et de tourisme. Le dernier en date est celui relatif aux travaux de construction du viaduc principal du nouveau pont qui sera érigé au-dessus du canal de navigation à Bizerte. Pas plus tard que mercredi dernier, la société chinoise «Sichuan Road & Bridge» a remporté ce marché pour une valeur de 750 MD. Et ce n’est pas tout.
La rénovation de la maison des jeunes d’El Menzah, la construction d’un centre culturel à Ben Arous, de cinq hôpitaux au Nord-Ouest du pays font aussi partie des réalisations chinoises en Tunisie.
A cela s’ajoute une armada d’investissements, censés transfigurer le visage du sud du pays et booster son développement, à savoir «la transformation du port de Zarzis en un centre économique et commercial s’étalant sur 1.000 hectares regroupant un pont de Boughrara à l’île de Djerba, un pôle technologique, un projet d’une ligne ferroviaire Médenine-Zarzis, une zone logistique à Ben Guerdane et un parc d’activités économiques à Zarzis».
Cela va sans dire que le géant asiatique, présent sous nos cieux depuis longtemps, n’a cessé de faire don de fonds et d’assistance technique et logistique.
Ceci étant, il y a lieu de mettre en avant l’intérêt commun des deux pays pour le progrès et le développement sur les différents plans d’ordre diplomatique, socioéconomique, culturel et écotouristique.
«Entre la Tunisie et la Chine, une histoire deux fois millénaire, où nos ancêtres et prédécesseurs avaient eu à vendre et échanger sur la mythique route de la soie. Ils nous ont, pour autant, tracé des chemins croisés aux objectifs communs. Et jusqu’à ce jour, à cette ère nouvelle, nos relations bilatérales d’amitié et de coopération ne cessent de s’enrichir et se développer, à bien des égards», c’était, en ces termes, que M. Tshui Ching Chan, membre du Comité central du Parti communiste chinois (PCC) avait tout dit, à l’ouverture du congrès «dialogue de civilisation, du Pékin à Carthage», en juin dernier. Des chemins croisés longuement parcourus. Et jusque-là, les rapports bilatéraux demeurent au beau fixe.
De l’Afrique au Maghreb, passant par la Tunisie, l’ouverture de la Chine s’inscrit dans sa nouvelle «Initiative de civilisation mondiale», lancée au début de l’année passée, avec en toile de fond la réalisation du progrès et du bien-être des peuples à travers le monde. Aussi, s’agit-il d’un nouveau modèle du développement essentiellement socialiste qui soit global et inclusif aux caractéristiques chinoises, sous une approche humaniste, sans conflits armés. Il y a là une nouvelle vision du monde, où le capital humain serait à la fois le moyen et la finalité de tout plan d’action. Certes, «l’invasion» tranquille du marché africain, sur la base des flux d’investissement si colossaux et généreux, a hissé la Chine au rang d’un partenaire privilégié du continent noir. Ceci étant, son taux de croissance national a atteint, au cours de ces dix dernières années, une moyenne de 6,6%, soit trois fois plus le taux mondial situé à 2,6%, et a dépassé de loin celui réalisé aux USA, en Europe ou au Japon. D’autant plus que sa contribution à l’économie mondiale s’élève à 30%. Ce qui lui a balisé la voie du développement.
D’ailleurs, ces choix chinois nous rappellent, à vrai dire, ceux adoptés à l’aube de l’Indépendance, en comptant sur le capital humain et la promotion sociale et sanitaire du Tunisien.
Cette similitude de vues et cette tendance à la mondialisation ont dû renforcer le rapprochement entre les deux nations. Et la récente ouverture de l’Académie diplomatique internationale de Tunis, à la faveur d’un don chinois d’environ 72 millions de dinars, est perçue comme une première au monde jamais réalisée dans l’histoire de la Chine. Elle vient également traduire dans les faits la profonde relation d’amitié et de solidarité tissée, il y a maintenant 60 ans. Voire un symbole fort puissant.
Et là, l’on ne peut qu’applaudir un tel haut niveau d’échange et de coopération sino-tunisienne. Evoquant les dernières mesures préférentielles prises par le gouvernement tunisien, tout porte à croire à de nouvelles perspectives prometteuses qui se profilent à l’horizon. C’est que les touristes chinois sont, désormais, exemptés de visa pour la Tunisie, ce qui va les stimuler davantage et fidéliser encore plus notre destination de choix.
Soit, à titre individuel ou en groupe, les touristes chinois, qu’ils viennent de Chine ou d’autres pays, n’auront plus besoin de payer leurs frais visa. «Le marché touristique chinois est stratégique pour la Tunisie», avait déclaré le ministre du Tourisme, Mohamed El Moez Belhassine, lors de l’ouverture des travaux de la conférence régionale africaine de l’Union internationale des villes touristiques à Hammamet, tenue, en novembre dernier, sous le signe «perspective d’une nouvelle coopération touristique sino-africaine».
Voulant passer à l’acte et réaliser ce qui a été promis, la compagnie nationale Tunisair prévoit d’ouvrir, au cours de cette année, une ligne aérienne directe entre la Tunisie et la Chine. Cette nouvelle desserte devrait permettre de doubler le nombre de touristes chinois de 30.000 à plus de 60.000.
Cette intention, faut-il le noter, germait depuis 2012, mais sa concrétisation avait beaucoup tardé pour qu’elle ne refasse surface qu’après la pandémie du Covid-19. Un contexte où le tourisme tunisien, comme celui du monde entier, s’enlisait dans une crise jamais connue. Gratifier ainsi le tourisme chinois de nouvelles mesures de promotion est une façon de relancer le tourisme tunisien, et donc l’économie de notre pays.
La Chine, de son côté, n’a pas laissé passer aucune occasion pour réaffirmer son soutien constant à la Tunisie. Et les multiples projets réalisés ou ceux déjà en cours de finalisation, à ciel ouvert, ne font que nous assurer que les relations établies entre la Tunisie et la Chine s’annoncent toujours de bon augure.