Transport illicite de migrants, trafic de stupéfiants, piraterie… Ces mots résonnent presque comme des événements ordinaires. Ces activités criminelles se sont toutes intensifiées au cours des dernières années avec un point commun : celui de se dérouler sur les océans. Car la mer, espace de liberté, d’échanges, de communication et de commerce, est aussi celui de tous les trafics. À l’instar des 90 % de marchandises qui inondent les quatre coins de la planète, c’est la voie maritime qui est la plus prisée pour le transport de produits illicites.
Que l’on parle de trafic d’armes, de stupéfiants, de biens de contrefaçon ou encore de traite d’êtres humains, la constatation est la même : les trafiquants savent que la mer offre le meilleur moyen d’accomplir leurs sombres desseins. Noyées dans la masse des quelque 27 millions de tonnes qui sillonnent les océans chaque jour, leurs cargaisons sont ainsi acheminées en toute discrétion.
Une recrudescence criminelle
Et ces activités criminelles ne datent pas d’hier. Qualifiés d’« ennemis communs à tous » par Cicéron, les pirates sévissaient déjà durant l’Antiquité. Très répandue, la piraterie permettait alors d’alimenter les marchés d’esclaves. Jules César lui-même aurait été capturé pendant sa jeunesse au large de Pharmacuse, petite île grecque de la mer Égée. Ce véritable fléau est d’ailleurs à l’origine des premières lois antipirate adoptées en l’an 1011 et 102..
Plus récent, le narcotrafic n’a vu le jour qu’au XIXe siècle.
Il s’est progressivement développé pour acquérir une dimension planétaire et devenir un réel phénomène globalisé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Opium, morphine, cocaïne, cannabis… Tous ces stupéfiants ont emprunté et continuent d’emprunter la mer, véritable « voie royale » dont les avantages sont multiples. Plus rentable, plus sûre, plus discrète, la solution maritime s’impose nettement face au transport par avion ou par être humain. Peu onéreuse, elle offre également l’avantage de permettre l’acheminement d’importantes quantités de stupéfiants sur des embarcations aussi diverses que variées : voiliers, mini-submersibles, go-fast, navires de commerce, cargos, céréaliers, porte-conteneurs…
Ils recèlent tous un nombre considérable de cachettes potentielles pour dissimuler la marchandise prohibée. Et il faut dire qu’en la matière, les trafiquants ne manquent pas d’imagination : double coque, cloisons, faux plafonds, réceptacles étanches soudés sur la partie immergée de la coque… Chaque centimètre carré est susceptible d’être exploité et détourné de sa fonction initiale.
Cette constatation vaut également pour le transport d’armes, véritable fléau contre lequel il est techniquement très difficile de lutter au regard des formidables quantités de marchandises que peuvent transporter les géants des mers au quotidien. Seul un très faible pourcentage de conteneurs peut être inspecté à leur arrivée dans les ports. Ce contrôle étant principalement effectué sur des cargaisons ayant éveillé les soupçons, les trafiquants d’armes ont su de nouveau parer à cette éventualité.
Plutôt que de faire appel à des transporteurs peu scrupuleux qui pourraient susciter la méfiance des agents douaniers et portuaires, ils recourent à des armateurs de renommée mondiale. Les nouvelles technologies peuvent également trouver leur place dans ce marché criminel : entre 2011 et 2013, des trafiquants ont piraté le système informatique du port d’Anvers pour effacer la trace de certains conteneurs au chargement clandestin avant de les soustraire aux transporteurs maritimes en toute discrétion.
Des réponses indispensables
C’est pourquoi les perspectives de développement du transport maritime au niveau mondial dépendent de plus en plus des réponses des institutions et des entreprises aux défis croissants en matière de sécurité. A ce titre, il y a environ deux ans, le Groupe Grimaldi a mis en place un département spécifiquement dédié à la gestion et au développement de sa politique de sécurité : le département Security Intelligence & Law Enforcement (Siled). Sous la direction experte de Paolo Pelosi, brigadier général carabinier à la retraite, Siled mène des activités de renseignement à travers des analyses statistiques et des études des principales tendances à l’intérieur et à l’extérieur du Groupe, tant au niveau national qu’international. Conformément à la forte culture d’entreprise du Groupe en matière de légalité, les activités de répression se traduisent par des opérations visant à garantir des normes de sécurité élevées à bord et à terre, en surveillant l’application des réglementations applicables tout en empêchant toute forme d’activité illégale. Le département travaille également en collaboration avec la Direction sécurité, qualité et environnement du Groupe qui, tout en suivant différentes méthodologies et directives, partage le même objectif de maximisation de la sécurité de l’entreprise. Dans un premier temps, Siled examine les activités du Groupe afin d’identifier les éventuels enjeux critiques susceptibles – à différentes échelles – d’affecter ses opérations, à travers des risques généraux et / ou particuliers et des incidents spécifiques. Plus généralement, de nombreux événements, actualités et informations sont suivis et analysés pour éviter l’apparition de phénomènes tels que la concurrence déloyale, le trafic de drogue, les passagers clandestins à bord des navires, la corruption, le terrorisme, les cyberattaques et l’insuffisance de la sécurité physique des navires et des installations. Chaque besoin de sécurité est analysé et évalué dans une perspective d’interaction avec tous les autres processus développés dans le Groupe. Une grande attention est également portée au choix des outils à acquérir afin d’élever les normes de sécurité. Siled intervient également principalement, mais pas exclusivement, dans l’évaluation des dispositifs de sécurité à bord des navires déployés soit pour le transport exclusif de fret, soit pour le transport mixte de marchandises et de passagers. Le département intervient également sur site lorsque les navires du Groupe sont affectés par des accidents non conventionnels qui, pour quelque raison que ce soit, nécessitent une enquête, car un risque ou un danger pour la navigation peut survenir, ou afin d’évaluer d’éventuelles actions extérieures ayant un incident. Siled dispose d’une structure de supervision fixe et d’une équipe d’intervention comprenant des personnes de contact qui assurent la liaison avec les services répressifs locaux. Le département communique avec les forces de police nationales et internationales dans un cadre de collaboration efficace afin de lutter contre des phénomènes tels que l’immigration clandestine ou, plus généralement, le trafic illégal.
De plus, la même équipe gère les relations avec les différentes agences de sécurité nationales et internationales et évalue le scénario national et mondial sur la base de l’analyse des informations partagées. Cependant, l’impact de toutes les activités importantes de Siled serait sévèrement limité sans une culture d’entreprise profondément enracinée et une forte conscience des questions de sécurité : pour cette raison, le mandat du département comprend également la formation et la sensibilisation de tout le personnel affecté à divers titres à la sécurité. «La sécurité est une composante essentielle de toute organisation. Un organisme dépourvu de légitime défense a tendance à s’éteindre », déclare le chef de Siled, Paolo Pelosi. «Ceux qui assurent la sécurité et la sûreté doivent rapidement alterner entre l’analyse et l’action pour ne pas perdre leur emprise sur la réalité. Il n’y a pas de solution universelle et définitive, seulement une méthode. Tel est l’enjeu et l’attrait de la gestion de la sécurité : l’objectif est d’avoir une méthode cohérente permettant à ceux qui fournissent le service de protéger l’organisation servie, tout en valorisant ses valeurs.