En 2019, peu avant l’éclatement de la pandémie Covid-19 et à la faveur de la nouvelle législation régissant la vie associative dans le sillage des événements de janvier 2011, était créée l’association «Ajyèl Ksar Hellal», à l’initiative d’un groupe d’amis, natifs de cette localité. Ils entendaient par cette démarche créer une synergie dans un but philanthropique en faveur de leurs concitoyens tout en resserrant leurs liens d’amitié à travers des activités diversifiées à caractère culturel et ludique, sans la moindre arrière-pensée idéologique ou politique.
Plus, ils inscrivent leur action dans un ancrage régional et, surtout, national et patriotique en partant du principe que servir sa localité est bénéfique à la région et au pays tout entier de par les retombées directes ou indirectes qui peuvent profiter à toute la communauté nationale.
Avant d’examiner de plus près le bilan de cinq années d’activité — deux années de paralysie covidienne comprises—, arrêtons-nous à l’appellation «Ajyèl Ksar Hellal ». Des générations (ajyèl) de Hillaliens sont convoquées pour présider aux destinées de l’entreprise mise sur pied par ce groupe de bienfaiteurs. Qu’est-ce qui justifie une telle interpellation ? Une tradition locale de mécénat, dont la figure emblématique s’appelle Haj Ali Soua. Hillalien de condition modeste et travailleur acharné, il a réussi, au début du siècle dernier, à se constituer une petite fortune qui est allée grandissante et grâce à laquelle il a engagé dans la plus grande discrétion de multiples actions de bienfaisance, notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé, dans sa ville mais également à Sousse et à Tunis, en particulier.
Education, santé et culture
Moncef Felli, président en exercice de Ajyèl pour un deuxième mandat, tient à préciser que pas un sou de l’argent public ni de subvention d’origine étrangère n’entre dans le budget de l’association. Toutes les actions sont financées par des fonds provenant des contributions des adhérents qui agissent de concert ou individuellement à des réalisations dont le coût peut varier de quelques milliers de dinars à plus de deux millions et demi.
Ces actions sont très diverses. Elles couvrent les domaines de l’éducation, de la santé et de la culture, sans compter les activités en direction des adhérents pour en consolider les liens d’amicales et fructueuses convergences.
Au chapitre de l’éducation, l’association organise, en fin d’année scolaire, la remise de prix substantiels en espèces aux plus brillants des élèves des deux établissements d’enseignement secondaire de la ville. Ces prix allant de 2 à 7 mille dinars sont décernés chaque année aux lauréats du baccalauréat ayant obtenu la meilleure note dans chaque matière.
Dans le domaine de la santé, il a été procédé à l’acquisition d’un scanner up to date au profit de l’hôpital régional et à l’extension de celui-ci en le dotant d’un centre de dialyse et d’un grand laboratoire d’analyses médicales devant rayonner sur toute la région. Grâce à la générosité des donateurs qui tiennent à garder l’anonymat, on a enregistré cette année dans cet hôpital l’entrée en service, en génie civil et en équipements, de quatre nouveaux services : médecine physique, ophtalmologie, médecine du travail et unité de soins du cancer. Un mécène s’est engagé à reconstruire et équiper le service d’urgence dont l’état laisse à désirer. Bien entendu, ces actions sont menées sous la bienveillante tutelle des autorités concernées et dans le cadre de la carte nationale de la Santé.
Effet d’entraînement
L’activité culturelle revêt la forme de conférences, de représentions théâtrales aussi bien à Ksar Hellal où se produisaient deux troupes jusque dans les années 50 du siècle dernier, de financement de l’impression de deux ouvrages de l’éminent archéologue M’hamed Hassine Fantar, traitant de sujets historiques. En direction de ses adhérents, l’association organise des déjeuners-débats et des excursions de découverte du patrimoine national sur site et dans les musées.
Tant de réalisations font, évidemment, chaud au cœur. Ceux qui ont bénéficié directement ou indirectement de l’œuvre de Haj Ali Soua, de l’exemplarité de ses actions, eux-mêmes parfois partis de rien ou presque et qui ont réussi dans la vie, entendent «renvoyer l’ascenseur» en ressuscitant la tradition du mécénat si ancrée dans l’âme tunisienne. Et de belle manière. Et dans la discrétion de leur immense modestie. Ceux-là trouvent probablement déjà un grand motif de satisfaction dans la mesure où leur œuvre suscite la même vocation chez leurs voisins.