Lancée par la Chine depuis 2013, l’initiative «Une Ceinture, une Route» a suscité un vif intérêt en Afrique, où elle est perçue comme une opportunité majeure de développement économique et de renforcement des relations sino-africaines.
La Ceinture et la Route (B&R), une initiative stratégique lancée par le président chinois Xi Jinping, se compose de la «Ceinture économique de la Route de la Soie» et de la «Route de la Soie maritime du XXIe siècle». Annoncée en 2013, cette initiative vise à revitaliser les anciens réseaux de commerce et de communication qui reliaient autrefois l’Asie, l’Afrique et l’Europe.
“En s’appuyant sur les mécanismes de coopération bilatéraux et multilatéraux existants, ainsi que sur des plateformes régionales efficaces, la Ceinture et la Route a pour objectif de favoriser le développement pacifique et la prospérité partagée. En empruntant les symboles historiques de l’ancienne Route de la Soie, l’initiative vise aussi à établir des relations économiques solides avec les pays partenaires, en renforçant les infrastructures, les échanges commerciaux et les investissements”, a indiqué le chercheur économique et spécialiste des affaires chinoises, Rong Huan, dans une déclaration accordée à La Presse.
Rencontré en marge du Forum sino-arabe qui se tient cette année dans la capitale chinoise, Béjing, le spécialiste des affaires chinoises a aussi souligné que l’initiative B&R s’efforce également de construire une communauté d’intérêts, où les bénéfices économiques et les opportunités de développement sont partagés entre tous les participants. En outre, elle cherche à promouvoir une communauté de destin, où les pays impliqués collaborent pour résoudre les défis globaux et régionaux. “B&R vise aussi à mettre l’accent sur la création d’une communauté de responsabilité, où chaque pays assume sa part dans la promotion de la paix, de la stabilité et du développement durable”, a-t-il précisé.
Construire l’avenir ensemble
Rong Huan a aussi affirmé que dans le cadre de l’initiative la «Ceinture et la Route», les échanges économiques et commerciaux entre la Chine et l’Afrique ont été renforcés, les investissements bilatéraux ont été étendus de manière continue, et le partenariat stratégique global entre les deux parties a connu des avancées significatives.
“Aujourd’hui, la Chine occupe une place centrale en tant que principal partenaire d’investissement pour l’Afrique, offrant à ce continent des avantages considérables grâce à ses ressources minérales et naturelles, ainsi qu’à son marché attractif pour les investissements massifs. Et l’initiative B&R a joué un rôle majeur dans la transformation des économies en développement en Afrique, en favorisant le développement dynamique des infrastructures, l’accroissement des opportunités d’emploi, et l’amélioration des échanges commerciaux… En facilitant ces progrès, cette initiative contribue non seulement à l’essor économique de l’Afrique, mais aussi à la solidité et à la durabilité des relations sino-africaines”, a-t-il encore précisé.
Idem pour les relations de coopération entre la Chine et les pays d’Afrique du Nord. Rong Huan a indiqué que cette initiative revêt une importance stratégique majeure, mettant en lumière la construction des infrastructures comme un pilier essentiel de cette collaboration. “Cependant, le renforcement des liens et des partenariats dans le domaine des infrastructures ne se limite pas à améliorer la capacité de transport des pays d’Afrique du Nord, mais s’inscrit également dans une dynamique plus large de développement socioéconomique durable pour la région. Ces réalisations ont non seulement amélioré la connectivité régionale et internationale, mais elles ont également joué un rôle catalyseur dans la transformation des économies locales”, a-t-il souligné, tout en ajoutant que les projets d’infrastructures menés englobent une gamme diversifiée d’initiatives, allant des chemins de fer modernes aux ports et à l’infrastructure énergétique, qu’ils ne se limitent pas à des aspects purement économiques et qu’ils ont également des retombées positives sur le plan social et environnemental.
Sur un autre plan, le chercheur économique a précisé que la Chine, en tant que partenaire commercial majeur des pays d’Afrique du Nord, a constaté une augmentation significative de la demande d’importations en provenance de cette région, stimulant ainsi le développement économique local tout en offrant de nouvelles opportunités de marché pour les entreprises chinoises.
“Cette coopération va bien au-delà du simple échange de biens, englobant également des partenariats stratégiques en matière d’investissement et d’industrie. Les entreprises chinoises ont massivement investi dans les économies nord-africaines, créant ainsi des emplois locaux et contribuant au développement socioéconomique régional. Parallèlement, les deux parties ont renforcé leur collaboration financière, établissant des mécanismes solides dans les domaines de l’investissement, des transactions financières et de la gestion des devises, ce qui constitue un pilier essentiel pour pérenniser la coopération économique et commerciale entre la Chine et les pays d’Afrique du Nord”, a-t-il expliqué.
Qu’en est-il de la Tunisie et de la Chine ?
Les défis rencontrés dans les relations entre la Chine et la Tunisie sont le reflet de profondes différences culturelles, systémiques et traditionnelles. Ces disparités se manifestent non seulement au niveau des pratiques et des valeurs, mais aussi dans les approches politiques et économiques. De plus, ces divergences ont des répercussions qui vont au-delà du domaine strictement politique, influençant également certains pays africains qui sont témoins de conséquences non politiques mais tout aussi significatives sur leur développement et leur stabilité.
Parallèlement, le paysage international est marqué par des conflits entre grandes puissances et des tensions géopolitiques complexes. Ces dynamiques en rajoutent une couche de complexité aux relations bilatérales entre la Chine et la Tunisie, nécessitant des stratégies et des approches équilibrées pour naviguer dans ce contexte mouvant.
“Cependant, la solution réside dans l’amélioration de l’équilibre stratégique et politique, tant au niveau régional que mondial. En garantissant une approche équilibrée et transparente dans la mise en œuvre des projets, notamment dans le cadre de l’initiative la Ceinture et la Route, les deux pays peuvent surmonter ces défis et renforcer leur partenariat. Cette initiative, en favorisant les échanges culturels et économiques, contribue à l’interconnexion des peuples chinois et du monde entier, créant ainsi un terrain propice à une confiance politique accrue entre les nations impliquées”, a indiqué Rong Huan.
Dans le même sillage, il a ajouté que l’initiative B&R, en particulier, illustre comment ces collaborations stratégiques peuvent non seulement stimuler le développement économique et social, mais également renforcer les liens politiques et la compréhension mutuelle entre les partenaires.
“L’initiative la Ceinture et de la Route revêt une importance cruciale pour la Tunisie. Elle offre de nombreux avantages, capables de contribuer à l’amélioration de l’économie du pays. Elle favorise également l’accessibilité des entreprises chinoises au marché tunisien et stimule le commerce entre les deux nations ainsi qu’avec le reste du monde. Cette initiative renforce les liens culturels et technologiques entre la Tunisie et la Chine, favorisant ainsi le partage de connaissances et de technologies. En outre, elle soutient des projets innovants dans le domaine des infrastructures routières en Tunisie, tels que la construction d’hôpitaux, de bâtiments, de ponts, de ports, de stations électriques… Ces initiatives ont un impact significatif sur la vie locale en améliorant les infrastructures et en stimulant l’économie”, a-t-il souligné.
Le Centre sino-arabe BeiDou, pour une agriculture innovante
Rong Huan a également souligné que l’investissement et la coopération sino-tunisienne s’étendent à d’autres secteurs tels que l’agriculture, le numérique, l’intelligence artificielle, le transfert de technologies avancées…
« En plus de ces domaines stratégiques, la coopération sino-tunisienne inclut les technologies et services de navigation par satellite. Inauguré le 10 avril 2018 au Parc Technologique El Ghazala en Tunisie, le Centre d’excellence sino-arabe pour le système BeiDou (BDS/GNSS Centre-Aicto) représente une avancée majeure dans le renforcement des relations sino-arabes. Ce centre a pour vocation de servir de plateforme ouverte aux utilisateurs arabes, leur permettant d’acquérir une compréhension approfondie des technologies et services de navigation par satellite BeiDou (BDS/GNSS) », a-t-il expliqué.
Rong Huan a ajouté que ce centre est un projet technologique unique dans le monde arabe, et même au-delà et que la Chine attache une grande importance à renforcer sa coopération internationale avec les pays arabes dans des secteurs clés tels que la navigation par satellite et les sciences de l’espace. Le centre propose une variété d’activités, y compris des formations, des expositions, des tests et évaluations, ainsi que des recherches conjointes. Ces initiatives visent à développer les compétences locales et à promouvoir la coopération technologique dans divers secteurs, notamment l’agriculture intelligente.
« Ce projet est un succès en Tunisie, et les exemples ne manquent pas. Grâce au système BDS, un tracteur équipé a été capable de réaliser diverses activités agricoles à distance, sans conducteur. Les services du BDS ont permis de rendre les activités agricoles, qui nécessitaient auparavant d’importantes capacités humaines, plus efficaces et plus rentables », a-t-il indiqué, tout en ajoutant que le centre joue un rôle crucial en offrant une vitrine complète et une plateforme de collaboration ouverte, non seulement pour les pays arabes, mais aussi pour les nations africaines.
Interrogé sur les attentes de ce forum sino-arabe, Rong Huan a souligné que cette année marque le 20e anniversaire de cet événement, offrant ainsi une opportunité unique pour poursuivre et renforcer la collaboration entre la Chine et les pays arabes, y compris la Tunisie, dans divers domaines. Ce sera également l’occasion de découvrir des potentiels inexplorés, de renforcer la confiance politique et de consolider le soutien mutuel, dans le but de construire une société sino-arabe unie. L’objectif principal est de mettre en œuvre les accords signés entre le président chinois et les différents dirigeants arabes lors du sommet sino-arabe tenu à la fin de l’année 2022.
« Nous cherchons également à créer de nouveaux mécanismes et outils, à mettre en place de nouvelles procédures et à introduire des idées novatrices pour améliorer la coopération dans des domaines émergents tels que l’intelligence artificielle, la croissance verte et le développement durable. Nous explorons constamment de nouvelles opportunités de collaboration entre les deux parties. Enfin, nous visons à travailler ensemble pour améliorer la situation internationale, en promouvant la diversité, la justice et l’équité », a-t-il assuré.