Il faut dire que les débats n’ont pas cessé depuis quelques années déjà, avec la hausse du nombre de cas de victimes d’erreurs médicales, que certains considèrent comme des fautes, voire des bavures, aux conséquences lourdes, parfois fatales, puisqu’elles peuvent entraîner des séquelles à vie, voire carrément le décès du patient. En outre, le débat fait suite aux tournures prises dans certaines situations avec l’arrestation de praticiens maintenus en garde à vue.
Une séance plénière a démarré hier, mardi 4 juin, à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) à partir de 10h, pour se poursuivre, en principe, aujourd’hui, mercredi. A l’ordre du jour, la suite de l’examen du projet de loi organique relatif aux droits des bénéficiaires des services de santé et à la responsabilité médicale.
Composé de 6 chapitres et de 55 articles, le texte de loi est censé protéger, une fois promulgué, les droits des bénéficiaires des services de santé en général. Mais en y regardant de plus près, on constate qu’il porte, également, sur les mécanismes de prévention des risques et des dommages liés aux traitements, ainsi que sur le régime de responsabilité des professionnels de santé exerçant dans les structures et établissements de santé publics et privés.
Il faut dire que les débats n’ont pas cessé depuis quelques années déjà, avec la hausse du nombre de cas de victimes d’erreurs médicales, que certain‹s considèrent comme des fautes, voire des bavures, aux conséquences lourdes, parfois fatales puisqu’elles peuvent entraîner des séquelles à vie, voire carrément le décès du patient. En outre, le débat fait suite aux tournures prises dans certaines situations avec l’arrestation de praticiens maintenus en garde à vue, dans l’attente des résultats de l’enquête, des expertises et des tests effectués par les laboratoires concernés.
Un projet censé établir un cadre juridique conciliant les droits des patients et ceux du personnel médical
C’est donc dans cet esprit que les dispositions ont été introduites par le texte devant s’appliquer aux professionnels de santé, aux établissements de soins, et aux centres de diagnostic, de traitement, de recherche et d’expérimentation fournissant des prestations de santé dans les secteurs public et privé, ainsi qu’aux laboratoires de fabrication de médicaments et aux fabricants et fournisseurs de dispositifs et équipements médicaux.
Ainsi, après avoir examiné et approuvé en Conseil des ministres, le projet de loi, censé établir un cadre juridique spécifique conciliant les droits des patients et ceux du personnel médical, en comblant un vide juridique en matière de responsabilité médicale, a été finalement soumis à l’ARP. Les élus qui ont pris la parole ont préconisé une définition de l’«erreur médicale» de manière globale, comme cela est mentionné dans l’article 3 du projet de loi et établir «les conditions de la responsabilité médicale.
D’autres députés ont, toutefois, relevé que cette loi n’est pas applicable dans l’état actuel des choses, dans la mesure où il y a une absence d’équipements et d’outils médicaux appropriés en plus de l’insuffisance des moyens de transport médicalisé. Et d’enchaîner que les autorités sanitaires régionales sont responsables de la dégradation des établissements de santé, appelant les responsables à se pencher sur l’état des hôpitaux, notamment à l’échelle régionale.
Une déclaration significative que celle du président de la commission de la santé, des affaires de la femme et de la famille et des affaires sociales, Nabih Thabet, qui, dans une adresse aux médias, a révélé que «bon nombre de médecins ont quitté, selon lui, le pays en raison de l’absence d’une législation qui assure leur protection en cas d’erreur médicale involontaire ou de négligence grave…».
C’est dire que les débats s’annoncent houleux et que l’on peut s’attendre à des rebondissements dans un sens comme dans l’autre.
Qu’en pense le Conseil de l’Ordre des médecins ?
Au milieu de tous ces tiraillements, du reste, attendus au vu de la délicatesse de la question, nous avons contacté Dr Alaeddine Sahnoun, vice-président du Conseil national de l’ordre des médecins, qui a bien voulu nous accorder la déclaration suivante :
«Avec les progrès enregistrés par la médecine et les technologies ainsi que les grands succès pour éradiquer nombre de maladies graves, les exigences des patients sont devenues plus grandes pour avoir les meilleurs résultats possibles. A cela s’ajoutent les développements en matière de communication et de prolifération des réseaux sociaux pour amplifier toute information aussi dans le sens du succès que celui de l’échec…
Pour toutes ces considération, le Conseil de l’ordre des médecins a toujours appelé, notamment depuis 2015, l’autorité de tutelle et l’institution législative à mettre en place un cadre juridique adéquat, en s’inspirant des expériences de la plupart des pays à travers le monde en vue de définir, d’un côté, les terminologies juridiques telles que l’aléa thérapeutique, la faute, la négligence caractérisée, etc.
Sans oublier que la délimitation des devoirs du prestataire de services sanitaires et les devoirs du patient et son droit à l’information et à l’obtention de son dossier médical, sachant que l’obligation de la responsabilité civile des médecins et des structures sanitaires privées et publiques sont de nature à faciliter les remboursements du malade ayant subi des préjudices suite à des erreurs médicales…
Il est attendu que cette loi devait délimiter la responsabilité pénale du prestataire de services sanitaires, en cas de négligence grave, tout en permettant aux médecins d’exercer dans un climat de sérénité pouvant contribuer à faire reculer la fuite des cerveaux, si des garanties étaient accordées aux patients, tout en facilitant les compensations en cas de faute médicale…».
En tout état de cause, il était temps d’en finir avec ce débat touchant à des aspects sociaux, sanitaires et humains dans tout exercice d’une profession noble et d’appeler à ce que les médecins travaillent dans un cadre serein.