Ils étaient 3,2 millions d’Algériens à avoir visité la Tunisie en 2023. Un chiffre appelé à progresser, parient des professionnels des deux pays. De bon augure.
Sur les 9,4 millions de touristes ayant séjourné l’année dernière en Tunisie, 3,2 millions étaient des Algériens qui, avec les 2,3 millions de Libyens, constituent 57% du total des arrivées, toutes nationalités confondues, indiquent les statistiques du ministère du Tourisme et de l’Artisanat. Une preuve irréfutable du poids stratégique que représente le tourisme maghrébin dans le fonctionnement du secteur en Tunisie. C’est que l’amour et la fidélité que vouent nos frères algériens à notre pays et qui reflètent la solidité des relations et tant d’affinités inaliénables sont demeurés intacts, intouchables.
Au point que, selon les chiffres éventés par le département algérien du Tourisme pour le mois de mai dernier, la Tunisie a, en dépit d’une farouche concurrence, conservé la quatrième place (derrière successivement la Grèce, la France et l’Espagne) au hit-parade des destinations internationales les plus prisées par nos voisins. «Je vous assure que je me sens chez vous comme chez moi», s’exclame Miloud Kermani, touriste algérien qui affirme être un habitué de nos hôtels. «Quand je pense, explique-t-il, que je suis aujourd’hui ici à mon 26e séjour, et que je peux me permettre des évasions de rêve à Miami ou en Thaïlande, je me dis que votre pays m’a anesthésié par ses charmes». Venu en Tunisie en famille et par voie terrestre, M. Kermani, qui dirige une société commerciale en informatique basée à Tlemcen, se dit «fidèle aux stations balnéaires de Sousse et Hammamet dans lesquelles je reviens chaque été, attirés que nous sommes, mon épouse, nos enfants et moi, par la bonne qualité des services et la gentillesse des employés de l’hôtel».
Ensemble pour améliorer le score
A la rue El Jazira, au cœur de la capitale, où les voitures de louage algériennes sont à perte de vue, le constat est aussi à l’admiration. «Cela fait 25 ans, lance Miloud Boukraa, louagiste algérien, que je pratique ce métier sur la ligne Annaba-Tunis, et ça marche comme sur des roulettes tout au long de l’année, sans compter évidemment l’habituel pic de l’été. D’ailleurs, je compte augmenter incessamment le nombre de mes navettes hebdomadaires, étant donné l’accélération du rythme de la demande». A ses côtés, se trouve son concitoyen Hedi Boulejnah, propriétaire d’une agence de voyages à Oran. «Si l’on se référe, rapporte-t-il, aux dernières statistiques officielles publiées chez nous, on constate que la destination Tunisie a accusé, durant le mois de mai écoulé, une baisse de 6% par rapport à mai 2023, mais elle est, en revanche, en progression de 1% en valeur moyenne des tarifs des voyages réservés. Cependant, je peux dire que nous tablons sur une belle reprise pour les quatre prochains mois». Tout en rendant hommage à ses collègues tunisiens «pour leur professionnalisme et leur sens de la collaboration», M. Boulejnah ne put s’empêcher d’évoquer un hic : «Ce qui nous inquiète, nous les acteurs de ce secteur, c’est cette éternelle histoire d’allocations touristiques annuelles fixées par l’Etat. Savez-vous que, chez nous, le montant de l’allocation ne dépasse pas 111dollars par personne, contre 6 mille dinars pour la Tunisie et, tenez-vous bien, trente mille dollars pour le Maroc ? Ce montant ridicule qui n’a pas évolué chez nous depuis 1997 dissuade de plus en plus d’Algériens de voyager à l’étranger, notamment pour les longues destinations. Pourvu que votre pays n’en pâtisse pas un jour». Serait-ce là un moyen parmi d’autres pour encourager le tourisme local en Algérie ? Il est vrai que notre voisin peut s’enorgueuillir de posséder de belles plages, des sites paradisiaques et une infrastructure hôtelière en perpétuelle expansion. «Tout ça est vrai», réagit notre interlocuteur qui évoque «un début d’embellie touristique dans les régions de Tipaza, Jijel, Tizi Ouzou, Chlef, Skikda, Alger, Oran, Annaba, Béjaïa et autres Tlemcen et Constantine. Toujours est-il qu’on a quand même le droit de passer ses vacances à l’étranger».
Campagnes de séduction non-stop
Par ailleurs, les professionnels du tourisme tunisien font état d’une tendance de plus en plus poussée des Algériens au tourisme alternatif. «Si la Tunisie, estime M. Boukraa, est forte par son tourisme balnéaire, je crois qu’il est temps pour elle de promouvoir les tourismes saharien, culturel, médical et de croisière. Et cela dans le but de drainer davantage d’étrangers parmi lesquels je peux justement citer les touristes algériens de plus en plus férus d’originalité. Faites-le, chers frères, et vous ne le regretterez pas». L’idée est bonne et mérite qu’on y revienne un jour.
En attendant, au QG de notre ministère, désormais transformé en ruche d’abeilles en prévision de la haute saison, on nous assure que le tourisme algérien demeure une des priorités du département. En effet, l’Ontt espère, d’après son directeur central de la commercialisation, Lotfi Mani, attirer cette année 9,6 millions de touristes, compte tenu des promesses de plusieurs, dont celui de l’Algérie. Et ce n’est pas un hasard si ce dernier a fait, ces mois-ci, l’objet d’une percutante campagne promotionnelle lancée par ledit office, avec la participation d’un grand nombre de professionnels algériens du secteur. Dans la foulée, la Tunisie a pris part, avec une forte délégation, à la 27e édition du Salon international du tourisme tenue récemment à Alger. Et puis, l’on sait que la décision prise par l’Etat d’imposer de nouvelles augmentations des tarifs d’hébergement touristique est appliquée à tous les touristes, à l’exception de ceux des pays du Maghreb.
Certes, comptablement, on ne dispose pas encore de chiffres, mais on prévoit des côtés des deux frontières une bonne progression de l’afflux de touristes algériens par rapport à 2023.