De nouvelles conventions de coopération entre différents intervenants du secteur privé ont été signées hier en attendant une meilleure implication du secteur public…
C’est le premier forum du genre en relation avec le système d’alternance qui a fait l’objet d’une loi lancée en 2018. Le constat des différents intervenants, dont les universités, notamment privées, et les entreprises, à l’instar de celles spécialisées dans le recrutement des jeunes talents ou celles des nouvelles technologies et de l’informatique, est plutôt encourageant.
D’une part, il a été prouvé que les étudiants bénéficiaires de ce système d’alternance se forgent un cursus universitaire compétitif leur permettant d’accéder à des emplois en CDI dans les entreprises avec lesquelles les universités dont ils sont issus sont en contrat. Un fort taux d’employabilité qui pourrait être l’une des options à renforcer afin de pallier la migration des jeunes talents, notamment du secteur des TIC. Ainsi, les entreprises recrutantes de ces « alternants » se permettent ainsi d’avoir une durabilité et productivité de leurs ressources humaines en ces temps de pénurie de certaines spécialités à cause de l’exode des jeunes diplômés.
Un levier d’employabilité
Les organisateurs de ce premier forum de l’alternance en Tunisie, en l’occurrence Express FM et le chercheur universitaire Dr Kaïs Mabrouk, semblent chercher à renforcer cette tendance d’alternance, qui, selon l’avis des différents intervenants, est porteuse pour les différentes parties concernées. Le forum, qui a été ouvert lundi au Lac de Tunis, a concocté des panels, des workshops et des rencontres B2B. Ainsi, plusieurs universités et une vingtaine d’entreprises ont été représentées lors de ce forum, outre la participation d’une centaine d’étudiants et chercheurs, notamment du secteur des TIC. Lors du débat autour de cette question d’alternance, qui fait bénéficier les étudiants d’une formation académique tout en pouvant travailler chez l’une des entreprises conventionnées avec son institution universitaire, les intervenants ont appuyé l’idée de renforcer la coopération et le rapprochement entre universités et entreprises. En marge du forum, plusieurs contrats et précontrats de coopération ont été signés entre universités et des entreprises relevant de divers secteurs économiques, mais aussi des entreprises de recrutement de ressources humaines pionnières en Tunisie. Selon Kaïs Mabrouk, l’alternance s’est imposée en solution mutuellement intégrée par les différentes parties. Mabrouk a précisé qu’après cinq ans de son instauration en Tunisie avec un cadre légal bien défini, il est temps de renforcer cette expérience, qui a prouvé son efficience sur plusieurs fronts, et d’élargir les secteurs touchés au-delà des TIC pour englober les métiers de la comptabilité, le génie civil, le marketing…
Minimiser l’exode des cerveaux
Tahar Ben Lakhdhar, président-fondateur de l’école supérieure privée Esprit, qui a signé, en marge du forum, deux contrats de coopération avec le pionnier régional du recrutement des talents, Manpower, et l’entreprise « Sagem Com », a loué les bonnes retombées de l’alternance depuis son lancement en 2018. Ben Lakhdhar précise que son école avait dès lors commencé avec 75 postes de formation avec Vermeg, et «aujourd’hui, on est à 960 postes d’alternants pour le compte de 90 entreprises partenaires». D’après lui, le système de l’alternance a bien remplacé le système des cours du soir applicable il y a longtemps, et a permis aux alternants de poursuivre leurs études avec des conditions plus favorables. «Actuellement, explique-t-il, ce sont les entreprises qui paient pour la formation de leurs employés alternants. Cela leur permet de pérenniser leur capital humain en ces temps de crises. Nos partenaires sont des domaines des TIC, du génie civil, de la mécatronique, et du «business school» avec plusieurs disciplines. Mais une bonne majorité poursuit des études d’ingénieur en IT, vu la demande mondiale croissante sur cette spécialité.
L’alternance est une formule choisie intelligemment par les entreprises et qui est bénéfique aux employés aussi». Ben Lakhdhar a souligné l’absence de l’Etat de ce processus alors qu’il devrait, selon lui, prendre le devant de ce processus, entre autres pour minimiser la migration des cerveaux…
Pour ce qui est des avantages de l’alternance, la directrice générale de « Manpower Tunisie », Chirine El Aiech, a énuméré l’augmentation de la productivité, le cumul des compétences, l’augmentation des chances d’employabilité des jeunes. Quantitativement parlant, El Aïech a précisé qu’une étude a démontré que, sur le long terme, l’alternance fait gagner 1% au PIB d’un pays ! Par la même occasion, elle a évoqué l’interdiction par le législateur des Contrats à Durée Déterminée (CDD).
Sur ce point, certains des intervenants et chefs d’entreprise ont affiché leur appréhension à une telle décision au vu des transformations que connaît le secteur de l’emploi dans le monde entier.
Pour sa part, Fadhel Kraïem, de Kpmg, a souligné l’importance du volet social dans l’adoption de la formule alternance en Tunisie qui facilite l’accès à l’emploi et réduit l’écart entre offre et demande. Toujours selon Kraïem, l’entreprise, de son côté, peut stabiliser son effectif. «Côté législation, je pense que nous devons être une force de proposition pour faire évoluer les choses et je pense que, sur le plan gestion des ressources humaines, il faudra intégrer l’alternance comme outil durable et non comme option lors des périodes de crises…», a-t-il conclu.
A en croire certains chefs d’entreprise, les employés recrutés en tant qu’alternants ne comptent que 20% de la totalité des employés. Un appel a émané de certaines parties qui incitent l’Etat à instaurer un cadre législatif incitateur à l’investissement dans ce processus.