L’apport de «Saragolla» dans la récolte céréalière 2024 : La variété qui a battu tous les records !

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Finie la moisson, l’heure étant au bilan ! Mais, quel bilan ? Cette année, la récolte céréalière est, encore une fois, moins bonne que souhaité, avec une légère augmentation par rapport à la saison dernière.

La production collectée ne dépasserait pas les 5,2 millions de quintaux au total. Bref, une récolte mi-figue, mi-raisin ! Et pourtant, Imed Jamazi, céréaliculteur et membre l’Utap de Jendouba, issu de Sidi Ali Jebini, localité de Roumani à Boussalem, a battu tous les records : «Plus de 83 quintaux, avec 304 balles de paille de blé, par hectare, soit un total de plus de 415 quintaux de blé dur de variété «Saragolla» récoltés, cette année, dans une parcelle de seulement 5 ha». Cela dit, il a récolté beaucoup plus  que ce qu’il a semé. Et contre toutes les difficultés et les carences ayant jalonné la saison 2023-2024, qui avait mal commencé, Jamazi a pu résister. «Ni de DAP ni d’ammonitrate, il n’y avait plus de ces engrais au début des semis, auxquels s’ajoutaient la pénurie d’eau et les mauvaises conditions climatiques…», nous fait-il savoir, comblé de joie.

Incroyable, mais vrai !

Car, aboutir à de tels résultats plus que satisfaisants, Imed n’y croyait plus. Avec 83 quintaux par hectare, ses estimations dépassaient les prévisions. Incroyable, mais vrai! «A titre expérimental, j’ai dû exploiter une parcelle de 5 ha de blé dur cultivés en régime pluvial dont la semence utilisée n’est autre que «Saragolla», une de nos variétés locales assez prolifique et mieux adaptée aux caprices du climat. Ce qui m’intéressait le plus, c’est qu’elle fait preuve d’une forte résistance à la sécheresse et au stress hydrique, deux défis majeurs universellement incontournables», nous a confié Jamazi, deux mois avant la moisson.

Peut-être bien qu’il était, au début, craintif et sceptique quant au rendement, vu les conditions qui avaient entouré le démarrage tardif des préparatifs, mais il n’a jamais douté de la haute qualité de ces variétés. «J’ai estimé pouvoir produire en moyenne 50 quintaux de blé dur par hectare, ce qui pouvait me rapporter, dans l’ensemble, quelque 300 quintaux. Et même cette quantité, si elle était aussi réalisée, elle serait, certes, considérée beaucoup plus  intéressante que celle produite par d’autres variétés telles que «Karim» que j’ai, d’ailleurs, semée en 2022 sur la même superficie (5 ha)», révèle-t-il, en toute confiance. A titre comparatif, poursuit-il, «Saragolla» gagnerait en rentabilité et capacité de résilience aux aléas du climat, soulignant la grande valeur ajoutée que présente cette variété, à bien des égards.

Il n’y a pas qu’un seul témoin

Mieux encore, Imed Jamazi n’est pas le seul céréaliculteur qui a défendu cette variété d’origine italienne, déjà inscrite, depuis 2010, dans notre catalogue officiel des variétés, et dont les meilleures caractéristiques, au niveau aussi bien de la quantité que de la qualité, ont été parfaitement testées. Kamel Beddouihech, céréaliculteur, à Beja-Nord, a, lui aussi, été pris à témoin : «Cette variété est en mesure de fournir de 60 à 80 quintaux de blé dur par hectare, sous un régime pluvial. En irrigué, elle est encore plus prolifique qu’elle pourrait rapporter jusqu’à 90 quintaux/ha».

Pour tous les deux, Jamazi et Beddouihech, cette expérience pilote «réussie», faut-il le noter, a été effectuée dans le cadre d’un champ de multiplication de «Saragolla» cultivé en régime pluvial, en guise d’essais sur la qualité et la quantité données. Cela fait suite à un projet multiplicateur de ladite variété, élaboré depuis 17 ans dans un esprit de partenariat public-privé, à l’initiative de M. Abdelmonom Khelifi, gérant de la Stima. L’objectif étant de soutenir l’effort de l’Etat dans la réalisation de l’autosuffisance en blé dur. «Cette année, environ 400 ha de blé dur ont été semés de la variété «Saragolla» en régime pluvial et dans des périmètres répartis sur les régions de Bizerte, Beja et Jendouba, considérées comme terrain favorable et beaucoup plus adaptées à cette variété», indique M. Khelifi.

Autre avis favorable, c’est celui de Mondher Gharbi, agriculteur à Amdoun, un des fondateurs du groupement des producteurs des céréales à Beja, en 2006. Il était, ce alors, très satisfait et fort impressionné du niveau de rendement de cette variété. Il l’est encore aujourd’hui : «Saragolla est une variété qui gagne en qualité et quantité, comme en témoignent les résultats jusque-là aboutis». 

Blé dur : l’importation n’est pas une solution

Toutefois, il semble comme on avait pris l’habitude de ne pas réaliser ce qu’on prévoit : le ministère de l’Agriculture avait annoncé, en septembre dernier, que tous les moyens allaient être mobilisés, en vue de réaliser l’autosuffisance en matière de blé dur, misant sur une production de 12 millions de quintaux. Neuf mois après, on est loin du compte, ne pouvant, finalement, en avoir que moins de la moitié. Est-ce dû à la qualité des semences utilisées, aux techniques culturales adoptées ou, tout bonnement, aux facteurs climatiques liés à la sécheresse et au stress hydrique? Tout s’est réuni, semble-t-il, pour causer des effets sur la rentabilité. N’en déplaise aux céréaliculteurs qui ne voient pas, jusque-là, le bout du tunnel. Pour eux, le recours à l’importation du blé n’est guère une ultime solution. C’est pourquoi ils en ont plein le dos.

Ces variétés à revoir

Et si l’impact climatique pesait lourd sur toute la campagne agricole, la bonne ou mauvaise moisson est imputée, ce alors, au choix des semences utilisées. C’est là où l’on peut comparer les variétés du blé et distinguer ainsi le bon grain de l’ivraie. «Karim», «Maâli», «Dhahbi», ou autres de nos traditionnelles variétés semblent, aux dires de certains, être sur le point d’arriver à leurs limites. Leur adaptation à ce changement climatique menaçant demeure un défi redoutable difficile à relever, d’autant qu’elles ne sont plus prolifiques.

Avec, tout au plus, une moyenne de 20 quintaux par hectare, ces variétés, comme l’affirment les céréaliculteurs eux-mêmes, ne sauraient atteindre l’autosuffisance, et encore moins la sécurité alimentaire. Cette bataille des variétés se joue, aujourd’hui, dans l’arène des lobbies. Sans scrupules !

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