Elévation des températures et évaporation de l’eau dans les barrages : En Tunisie, les réserves en eau s’amenuisent !

717

 

Alors que la situation de l’eau est difficile en Tunisie,  les réserves en eau continuent à diminuer dans nos barrages à cause du manque de pluie et de l’élévation des températures qui dépassent les normales saisonnières

L’évaporation constante des réserves en eau dans les barrages, due à la hausse des températures supérieures à la normale, rend la situation de l’eau critique en été. Le 4 juillet dernier, le taux de remplissage était estimé à uniquement 29.2% soit un volume qui ne dépasse pas 685 millions de m3 pour l’ensemble des ouvrages répartis sur tout le territoire.

Selon l’experte en eau Raoudha Gafrej, les réserves en eau contenues actuellement dans les ouvrages hydrauliques ne suffiraient pas à satisfaire les besoins en eau potable de la population, dès lors qu’elles ne peuvent pas être mobilisées dans leur totalité pour plusieurs raisons. En effet, 10 à 15% du volume de ces retenues en eau représente de la vase (eau boueuse) et environ 10 à 15% doivent rester dans l’ouvrage pour garantir sa sécurité, tandis qu’une partie importante de ces retenues a tendance à s’évaporer (environ 10%), souligne Dr  Gafrej. Si on fait le calcul, près de 30%, si ce n’est plus de ces réserves en eau, ne sont pas mobilisables pour l’approvisionnement de la population en eau potable.

Taux de salinité élevé et coupures d’eau

Outre l’accès à un volume restreint des retenues des barrages, il existe, par ailleurs, d’autres restrictions à la fourniture de l’eau de surface pour l’alimentation en eau potable. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, tous les barrages ne sont pas destinés à la production d’eau potable. Réellement, le volume qui pourrait être mobilisé pour alimenter le système d’alimentation en eau potable s’élève entre 130 et 150 millions de m3, estime l’experte.

Une autre contrainte pèse, par ailleurs, sur ce réseau ; même si les barrages de l’extrême nord du pays atteignent leur capacité maximale, les conduites qui relient le barrage de Sejnene au canal de Medjerda Cap Bon ne peuvent véhiculer que 800.000 m3 par jour, soit 72 millions de m3 en l’espace de trois mois, ce qui ne suffit pas à satisfaire les besoins en eau des zones alimentées par le réseau de la Sonede, explique l’experte en eau.

Au problème de la capacité limitée du réseau de transfert vient s’ajouter celui de la salinité de l’eau, note Raoudha Gafrej, à l’instar de l’eau du barrage de Sidi Salem dont le taux de salinité élevé pourrait dépasser cet été 2 grammes par litre, « avec un risque d’eutrophisation de l’eau due à la chaleur et à la pollution des retenues d’eau par les eaux usées », ajoute-t-elle encore.

« Il risque d’y avoir des coupures d’eau du fait que la Sonede ne disposerait pas du volume d’eau brut journalier nécessaire pour un fonctionnement optimal du réseau afin de satisfaire les besoins en eau potable des 14 gouvernorats qui sont alimentés essentiellement par les eaux de surface et pour lesquels il n’y a aucune autre alternative. Le deuxième risque est lié à la baisse du débit des forages voire l’assèchement de certains dû à la surexploitation des eaux souterraines et au déficit de recharge naturelle de ces nappes pour le reste des gouvernorats qui sont alimentées essentiellement par ces nappes », explique notre experte. Et de poursuivre, sur sa lancée, « les agriculteurs, qui ont été privés de l’eau de surface, ne disposent pas de suffisamment d’eau pour irriguer leurs périmètres agricoles risquent d’utiliser illicitement l’eau de la Sonede  pour abreuver leur cheptel et irriguer leur capital formé par les arbres fruitiers.

C’est la qualité du service de la Sonede qui va se dégrader d’autant plus que  des coupures d’électricité peuvent survenir pendant les périodes de forte chaleur à cause de l’utilisation excessive de la climatisation».

Entrée en exploitation de la station Zarat

Si l’élévation des températures se poursuit et s’il ne pleut pas au cours des mois de septembre et octobre, les quatorze gouvernorats surtout le Grand-Tunis, le Cap- Bon et une partie du Sahel alimentés à partir du réseau de la Sonede pourraient vivre un rationnement d’eau plus sévère avec des risques de ruptures de plusieurs conduites qui ne pourraient pas supporter les nouvelles manœuvres, note-t-elle, par ailleurs.

D’un autre côté, l’entrée en exploitation récente de la station de Zarat à Gabès va, certes, améliorer l’accès à l’eau potable dans les régions de Tataouine, Gabès et Médenine et devra satisfaire les besoins en eau de 1.2 million de personnes, sauf que le rendement réel du réseau de distribution risquerait d’être en deçà des attentes, dès lors que la Sonede continue à enregistrer des fuites et des pertes importantes au niveau de son réseau en raison de la vétusté de certaines conduites.
« La réalisation d’une station de dessalement est une très bonne alternative au problème de la pénurie d’eau dans certaines zones. Toutefois, il faut accorder une priorité absolue à la protection des eaux souterraines, en tant que ressources stratégiques, mais également à la réhabilitation et la rénovation des conduites et les canalisations vétustes du réseau de la Sonede dans lesquelles va être transférée l’eau de mer dessalée, afin d’éviter les pertes au niveau de ces dernières, d’autant plus que le processus de dessalement est très coûteux », conclut Dr Raoudha Gafrej.

Laisser un commentaire