Pourquoi Sfax ?

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Editorial La Presse

 

LE nombre d’arrivées de migrants irréguliers ne cesse de croître à Sfax. Le phénomène pose problème aux habitants mais aussi aux autorités qui ne savent plus à quel saint se vouer pour expliquer les raisons qui poussent des milliers de subsahariens à mettre le cap sur cette ville précisément. Or, sans comprendre le mécanisme de fonctionnement des routes migratoires, sans comprendre les nouvelles techniques de recrutement des migrants par les passeurs et les trafiquants et en ignorant le rôle que jouent les nouvelles technologies et les nouveaux « services » qu’elles offrent aux migrants, la riposte reste vaine et sans effet. Mais avant d’analyser le phénomène, il faut admettre que derrière les recruteurs, il y a des forces obscures qui manipulent l’orientation des migrants vers Sfax, cette ville qui répond aux critères recherchés par les migrants : la forte densité pour pouvoir se confondre dans la foule, une ville côtière, une ville industrielle pour construire des barques, une ville où avec l’argent on peut facilement passer entre les mailles du filet et enfin une infrastructure numérique qui répond à leurs besoins technologiques.    

C’est que les réseaux sociaux et la technologie jouent tous deux un rôle de plus en plus important dans la migration. Pour recruter les candidats à l’immigration, les passeurs leur proposent des destinations sûres à travers des publicités comme le font les agences de voyages.

Ils placent un contenu basé sur des témoignages ou d’expériences réussies d’anciens migrants. En effet, les migrants utilisent également de plus en plus les médias sociaux pour la préparation pour le départ (par exemple pour entrer en contact avec des passeurs) et pendant les voyages (par exemple pour communiquer et recevoir des informations sur les itinéraires de migration). De nombreuses applications mobiles existent sur internet dont l’objectif est de soutenir les migrants tout au long de leur parcours, y compris comme moyen de soutenir une migration sûre, régulière et ordonnée. Mais il y a aussi d’autres applications pour partager des informations en temps réel, y compris pour soutenir les passages clandestins des frontières, ainsi que pour connecter des groupes géographiquement dispersés afin de permettre aux migrants d’éviter les rafles. En effet, partout où ils arrivent, les immigrés recherchent tous des codes d’accès au wifi et des bornes électriques.

Leur smartphone fait partie de leurs biens les plus précieux. A chaque arrivée dans un nouveau pays, ils font acquisition d’une carte SIM pour bénéficier d’offres d’itinérance. Ils se repèrent sur Google Maps, traduisent les panneaux sur Google Translate, reçoivent de l’argent sur leurs téléphones, communiquent avec leurs proches grâce à WhatsApp, Skype ou Viber et surtout suivent les indications laissées par leurs compatriotes sur les réseaux sociaux. Voilà comment la circulation de l’information accentue la pression migratoire sur les routes les plus sûres et les plus empruntées.

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