La 58e édition du Festival international de Carthage a été inaugurée ce jeudi 18 juillet par un concert évènement de Lotfi Bouchnak. Ce show aussi nostalgique qu’innovant conçu par ses deux fils, Hamza et Abdelhamid, et intitulé «Ayech leghnayati » (Je vis pour mes chansons) est un véritable cadeau à son public fidèle, l’occasion de célébrer à ses côtés et en chansons cinq décennies de musique.
Un retour sur la carrière impressionnante et jalonnée de succès de ce grand Monsieur qui ne cesse de se réinventer.
Une plongée dans l’univers intime de Lotfi Bouchnak
Lotfi Bouchnak s’est imposé depuis ses débuts comme l’un des artistes les plus influents de sa génération. Star de la chanson arabe depuis les années 90, oudiste et compositeur de talent, il continue de marquer l’industrie musicale avec ses compositions et ses performances.
Cette expérience unique et intimiste, au plus près de l’artiste, fut une occasion de découvrir, ou plutôt redécouvrir, quelques détails biographiques.
Des séquences en noir et blanc ont défilé sur les écrans géants pour raconter sa carrière en photos et en vidéos documentaires ou jouées par des acteurs. Depuis sa naissance en 1954, son enfance dans les ruelles de la Médina, bercé par la musique, ses années à l’Institut Rachidia de la musique tunisienne, ses influences musicales, particulièrement son attachement au Oud, et autres scènes marquantes… Un récit de rencontres et d’émotions savouré par son public avec lequel il a développé une relation tout particulière à travers ses projets, ses chansons, ses spectacles qu’il fait toujours avec le cœur. D’ailleurs, au milieu du concert, une vidéo de son studio d’enregistrement a complété ce moment de partage bienveillant et généreux.
Les ingrédients d’un grand show sont réunis
L’évènement a été à la hauteur de la carrière exceptionnelle de l’icône de la chanson. Dans une complicité avec ses deux fils devenus ses compagnons de route, le talent indéniable de Lotfi Bouchnak est venu se joindre à la créativité débordante des deux jeunes artistes pour ce show dont ils ont le secret. Qualité musicale, répertoire, chorégraphies, écrans géants : tous les ingrédients étaient réunis pour le succès de la soirée ! Sur scène, une trentaine de musiciens ont joué sous la baguette du chef d’orchestre Fadi Ben Othman, un grand nom de l’Orchestre symphonique tunisien. Lotfi Bouchnak qui chante d’habitude en concert en tenue traditionnelle est apparu en costume noir, exceptionnellement ce soir, avec une cravate imprimée aux motifs de la koufia palestinienne. Les danseurs contemporains ont été situés à une altitude un peu plus haute, juste sous les écrans, pour ne pas encombrer la scène. Du Sefsari au flamenco, en passant par la danse orientale, les chorégraphies et les costumes ont incarné, tout au long du spectacle, les différents univers des mélodies.
Le point fort de ce show unique a été les photos, les séquences documentaires, les extraits d’émissions et les témoignages des collaborateurs de Lotfi Bouchnak qui ont meublé la soirée. Diffusés tout au long du concert, ils ont raconté ses « coups de foudre » artistiques, depuis 1982, donnant les grands titres qui ont accompagné des générations. Nous avons vu défiler Slaheddine Bouzayane, Ali Louati et bien d’autres. En hommage au grand musicien feu Taoufik Zguenda, une séquence filmée l’a montré jouant au qanoûn. Notons également que des vidéos du fameux créateur de contenu « The dreamer » ont été diffusées en arrière-plan des chansons patriotiques.
Un répertoire riche et varié
Le programme proposé pour cette soirée inaugurale a été concocté avec soin pour que la fête soit totale, offrant une soirée envoutante par sa variété et sa richesse. « Ayech leghnayati » est une véritable fresque musicale où Lotfi Bouchnak nous a offert un voyage mélodique intense, de Halfaouine à La Palestine. Le spectacle démontre l’évolution artistique de la grande vedette et sa capacité à toucher les âmes avec ses thèmes variés.
Le show a débuté par une reprise de Ali Riahi pour rappeler ses influences musicales. Il a retracé par la suite des moments phares du répertoire de Lotfi Bouchnak, comme « Nassaya » ou encore « Enti chamsi enti » inspirée d’un classique mexicain. Le prestigieux amphithéâtre a également vibré aux rythmes de Halfaouine, une collaboration avec Anouar Brahem qui date de 1988, avec le public en chorale, et en arrière-plan des scènes du film éponyme.
Cet énorme artiste s’est montré fidèle à ses amis de longue date. Des retrouvailles et un duo particulier ont fait chavirer les cœurs : la star libanaise Micheline Khalifeh a rejoint Lotfi Bouchnak sur scène pour leur fameux tube «El ain elli matchoufekchi ». Les fans l’ont accueillie par des applaudissements en cascade. « Je vous ai dans le cœur », a-t-elle lancé vers la fin, toute émue. Hamza Bouchnak a également accompagné son père à la guitare pour l’interprétation de « Nawara Hzina ».
La soif de nouveaux défis a mené Lotfi Bouchnak à reprendre des morceaux de musique classique revisités avec une touche tunisienne pour ses chansons humanistes. Lors de ce spectacle, il a interprété un tout nouveau morceau à côté de ses précédents succès.
Avec sa voix de ténor, il a chanté sur un air de Chopin et des paroles de Adam Fathi, son partenaire de longue date, une mélodie intitulée « Ayech Leghnayati ». La rencontre de deux univers que rien ne semblait réunir a été un moment suspendu dans le temps dans l’amphithéâtre archi-comble. Les spectateurs, touchés par l’intensité de l’interprétation, l’ont longtemps applaudie. D’ailleurs, Lotfi Bouchnak n’a pas hésité à remercier le public entre les morceaux et à plaisanter.
D’autres grands moments ont été l’interprétation de « Sophia », un hommage à sa propre mère qui l’a encouragé et a cru en lui et de « Khouya Al Insan », hommage aux victimes de la guerre de Gaza, composé par l’artiste lui-même sur des paroles de Adam Fathi. Après la bande originale du feuilleton Ghada, le show de deux heures et demie s’est terminé en fête, avec amour, sur les titres de Nouba.
Une clôture dansante de la soirée inaugurale du Festival international de Carthage où Lotfi Bouchnak a charmé le public par sa voix unique et son énergie captivante. Conçu avec convivialité et émotions, ce concert qui s’est joué à guichets fermés témoigne du poids de ce grand artiste qui continue à séduire les oreilles de ses innombrables fans après 50 ans de carrière.
Rappelons que le Festival international de Carthage se poursuit jusqu’au 17 août avec 6 autres soirées tunisiennes, 6 soirées arabes et 5 soirées du monde dont des spectacles de cirque de glace.