Bien que le marché africain ne représente qu’une faible part des exportations tunisiennes, il continue de susciter l’intérêt des opérateurs économiques nationaux. C’est qu’il s’agit d’un marché prometteur avec d’importantes opportunités commerciales. Même si de nombreux programmes ont été mis en place pour faciliter l’accès des entreprises tunisiennes à ce marché, bien des obstacles restent à surmonter pour lever les difficultés qui freinent leur expansion.
Le marché africain, qui continue d’attiser la convoitise des entreprises et des pays à travers le monde, reste une priorité pour la Tunisie, qui cherche depuis des années à diversifier ses débouchés à l’exportation. Les obstacles sont bien connus, mais toutefois difficiles à surmonter : ils relèvent principalement de défis logistiques et financiers. Il convient de souligner que les efforts se poursuivent, tant au niveau national, bilatéral que multilatéral, pour lever ces barrières et faciliter l’accès à l’un des marchés les plus prometteurs au monde.
La Tunisie résiste mieux aux chocs extérieurs
Ce sujet a été récemment abordé lors d’un webinaire organisé par « Connect’Innov », une structure d’accompagnement spécialisée dans la « Health Tech ». Lors de son intervention, Hichem Radoine, cofondateur de « Connect’Innov », a rappelé que les exportations tunisiennes suivent depuis deux ans une tendance haussière, et ce, malgré un contexte économique mondial marqué par l’incertitude.
Fakhri Bouzayane, sous-directeur au ministère du Commerce, a confirmé cette tendance en précisant que la croissance des exportations tunisiennes a dépassé les 23 % en 2023, et s’est poursuivie en 2024, avec une augmentation de 8 % à ce jour. Cette croissance est portée par des secteurs clés, notamment l’agroalimentaire à travers principalement l’huile d’olive dont les prix à l’international ont explosé, les produits semi-transformés, ainsi que le textile et l’habillement. Cette hausse a bénéficié à plusieurs pays, notamment européens, arabes, et à la Russie.
« Ce qui est également important, c’est que nos exportations sont très diversifiées », a ajouté Bouzayane. Et de poursuivre : « Contrairement à d’autres pays qui exportent beaucoup en termes de valeur mais peu en termes de variété, la Tunisie résiste mieux aux chocs extérieurs grâce à cette diversité. ». Mazen El Kassem, chef de projet et expert technique international à « Expertise France », a abondé dans ce sens, expliquant que la robustesse du commerce extérieur tunisien s’explique en grande partie par l’historique des échanges avec les pays européens. « Il y a une longue tradition d’échanges commerciaux importants avec ces pays. De plus, le savoir-faire tunisien est de plus en plus valorisé à l’international», a-t-il précisé.
Plus de 41 pays africains destinataires
En ce qui concerne le marché africain, Bouzayane a indiqué que ce dernier ne représente encore que 2,4 % des exportations totales de la Tunisie. Cependant, la bonne nouvelle est que ce chiffre concerne exclusivement des produits fabriqués en Tunisie, destinés au marché tunisien, et non sous le régime offshore. Les principaux partenaires sont le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Cameroun et la Guinée. Avec plus de 41 pays africains destinataires, la Tunisie est le pays du continent qui possède le plus grand nombre de partenaires commerciaux en Afrique. Cette dynamique est régulièrement mise en lumière dans les études réalisées par diverses institutions internationales, soulignant les opportunités offertes par ce marché.
Par ailleurs, Bouzayane a affirmé que, malgré son potentiel, le secteur des services à l’export demeure sous-exploité en Tunisie. Une récente étude, menée par le ministère du Commerce et dont les résultats seront bientôt publiés, met en avant les opportunités pour l’exportation des services tunisiens vers l’Afrique, ainsi que les actions à entreprendre pour exploiter ce potentiel.
Il a également souligné deux facteurs clés pour réussir dans ce domaine : premièrement, l’harmonisation des réglementations, qui peut se faire aux niveaux bilatéral, continental ou régional, afin de faciliter l’accès des opérateurs à des activités spécifiques. Deuxièmement, le traitement équitable des entreprises, qu’elles soient nationales ou étrangères. « Par exemple, les prestataires de services tels que les experts-comptables, les avocats, les architectes, nécessitent une homologation de leurs qualifications pour pouvoir exercer dans un autre pays africain. Nous travaillons de manière multilatérale avec d’autres pays, en collaboration avec le ministère de l’Enseignement supérieur et celui de la Formation professionnelle, pour mettre en place un cadre facilitant l’accès des opérateurs tunisiens au marché africain », a-t-il précisé. Bouzayane a aussi évoqué la nécessité de mettre en place des garde-fous pour protéger les secteurs sensibles, comme la pêche, dans le cadre des accords de libre-échange panafricains. Enfin, Sihem Mahjoub, conseillère en exportation, a évoqué les mécanismes mis en place par la Tunisie avec ses partenaires, comme le programme « Pema », qui soutient les entreprises tunisiennes ciblant le marché africain. Selon elle, ces initiatives ont contribué à stimuler les exportations tunisiennes vers des marchés peu familiers avec le « made in Tunisia », tels que les pays anglophones et notamment le Kenya, qui, après l’ouverture d’une ambassade et la signature de l’accord Comesa, est devenu parmi les partenaires africains émergents de la Tunisie. « Le Centre de promotion des exportations a ouvert un bureau régional au Kenya, ce qui a permis aux opérateurs tunisiens d’accéder à l’information. Le bureau essaie, également, d’organiser des rencontres avec les hommes d’affaires, afin de voir les opportunités sur ce marché et les produits demandés, tout en ayant un retour d’informations pour le Cepex et pour les opérateurs privés », a-t-elle conclu.