Désirant à tout prix s’imposer sur le marché, des fabricants de produits alimentaires forcent un peu trop sur les ajouts, les conservateurs et toutes sortes d’additifs alimentaires dans le but d’améliorer le goût, la texture et la qualité de leurs produits. L’ajout de ces additifs ne constitue pas le seul problème. Certains de ces produits sont stockés et conservés dans de mauvaises conditions, ce qui altère leur qualité. Faut-il s’en inquiéter ?
Il y a peu de temps, une vive polémique a été soulevée sur les réseaux sociaux sur la qualité de la pâte aux pignons de pin d’Alep (Zgougou) utilisée pour la préparation de la crème de pin d’Alep (assidat zgougou), un entremets que l’on prépare à l’occasion du Mouled du prophète Mohamed qui a été célébré, cette année, le 15 septembre dernier.
Ces dernières années, plusieurs sociétés agroalimentaires se sont mises à acquérir de grandes quantités de graines d’Alep vendues en vrac, afin de les transformer en une pâte plus facile à cuisiner, et éviter, ainsi, aux ménagères les longues files d’attente devant les petites minoteries pour moudre les graines de pin d’alep, ingrédient de base pour la réalisation de la traditionnelle recette de «assidet zgougou». Mais, d’une année à l’autre, le décalage entre la célébration du mouled et la période de la collecte des pignons de pin s’est traduit par une perte de fraîcheur et une détérioration progressive du goût et de la saveur des graines, dues très probablement à un défaut de stockage et de conservation des stocks de l’année dernière.
Goût de moisi !
Le goût amer et terreux qui a été observé, cette année, par des ménagères pour certains pots de pâte de pignons de pin d’Alep serait dû à un problème de stockage et de séchage des graines de pin d’Alep par les petits exploitants agricoles, ainsi qu’à plusieurs autres niveaux de la chaîne de production et de distribution de ce produit alimentaire, relève un commerçant, en notant, en effet, qu’il ne s’agit pas forcément d’un défaut de fabrication de la pâte dans les unités de production comme on pourrait le supposer. Cependant cela n’exclut pas le fait que des sociétés de fabrication et de conditionnement de ces préparations alimentaires ont recours à des subterfuges pour améliorer la qualité et la saveur de ces préparations. Ceci n’est pas passé inaperçu, du côté d’un petit nombre de ménagères qui, ont, non seulement, remarqué cette année que les pots qu’elles avaient achetés ont un goût de moisi, mais elles ont, par ailleurs, relevé qu’il y a une quantité assez importante d’huile dans le pot.
Plusieurs préparations à base de pâte de pignons de pin ont fini, ainsi, à la poubelle. Une autre préparation alimentaire a également suscité de vives critiques : il s’agit de la pâte de pistache qui sert de base pour la préparation de nombreux entremets sucrés dont la crème de pistache (assidet fozdok).
Présence d’huile de palme
Des ménagères ont exprimé leur préoccupation quant à la présence de quantités importantes de colorants alimentaires, doublées de petits pois réduits en poudre et qui auraient pour but d’accentuer la saveur et de conférer une belle couleur à cette pâte. Quant à la pâte de pignons de pin, de petites unités de production auraient recours aux graines de tournesol pour raviver la couleur noir foncée et rehausser le goût des pignons de pin dans la pâte.
L’huile de palme, qui figure, également, parmi les principaux composants des préparations industrielles alimentaires, constitue un sujet de préoccupation pour les consommateurs, au regard des effets néfastes qu’elle pourrait avoir sur la santé à moyen et à long terme. Or, cette huile à forte teneur en acides gras saturés, ajoutée aux ingrédients des différentes pâtes alimentaires industrielles servant à la réalisation de crèmes, ne doit pas dépasser 10% du poids de ces préparations. En réalité, le grammage de cette huile végétale serait plus élevé notamment dans la pâte de graines de pin d’Alep «ce qui permettrait de lui donner plus de poids et de consistance», nous explique un commerçant grossiste dans l’un des quartiers du centre-ville.
Contrôle sanitaire
De son côté, l’Institut national de la sécurité sanitaire des produits alimentaires (Insspa) procède, périodiquement, à l’analyse physico-chimique et microbiologique des produits et des denrées alimentaires, explique son directeur général Mohamed Rebhi. Il s’agit, en prélevant des échantillons, de détecter la présence de microbes, de bactéries, de parasites, de résidus de pesticides et de l’aflatoxine qui est à l’origine des moisissures observés dans les denrées alimentaires mal conservées et qui les rendent toxiques pour la santé du consommateur.
Durant le mois qui a précédé le Mouled, l’Insspa a effectué 1.700 opérations de contrôle sanitaire au cours desquelles 9,6 tonnes de denrées alimentaires impropres à la consommation ont été saisies dont deux tonnes de différentes pâtes à base de fruits secs. «Plusieurs produits alimentaires que nous avons saisis étaient stockés dans de mauvaises conditions», a-t-il relevé. Et de poursuivre, «il s’agit de denrées qui sont sensibles. De mauvaises conditions de stockage et de conservation en altèrent la qualité et entraînent l’apparition de moisissures qui rendent ces produits toxiques. Notre rôle est de veiller essentiellement à la sécurité sanitaire des denrées alimentaires, en vérifiant qu’il n’y a pas d’aflatoxine, de bactéries, de microbes… Par ailleurs, Rebhi a démenti certaines allégations et idées véhiculées : «L’huile de palme ne présente pas particulièrement de danger pour la santé du consommateur». Il résume, somme toute, en ces termes : «Nous nous préoccupons surtout des mauvaises conditions de stockage et de conservation, ainsi que de la présence de substances toxiques telles que l’aflatoxine qui rendent les produits alimentaires impropres à la consommation. Tant que les additifs alimentaires que nous trouvons dans les préparations alimentaires que nous analysons ne présentent pas de danger pour la santé du consommateur, il n’y a pas de problème».