Une proposition de loi quelque peu insolite a été présentée à l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP).
Destinée à mettre un frein à la migration des compétences tunisiennes à l’étranger, cette initiative législative propose que les diplômés en médecine ainsi que ceux des écoles d’ingénieurs et des spécialités scientifiques et techniques qui veulent quitter le pays pour aller exercer en Europe ou ailleurs, doivent au cours des cinq années qui suivent leur cursus universitaire s’acquitter de 50% des frais de leurs études universitaires, financés par l’argent du contribuable, sous forme d’échéances annuelles dont le montant et le nombre seront définis ultérieurement. Ceux qui, par contre, auront fait le choix de rentrer au pays au cours de ces cinq ans, seront automatiquement dispensés de cette obligation.
Le Président de l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens, Kamel Sahnoun, qui s’est exprimé sur cette question au micro d’une radio privée a expliqué que cette proposition qui fait plutôt office « de buzz » risque d’entraîner le contraire du résultat escompté.
En effet, les diplômés qui ont choisi de s’installer sous d’autres cieux en quête de meilleures conditions de vie et de travail risque de ne plus retourner du tout en Tunisie afin de se soustraire à cette mesure contraignante.
« La Tunisie n’a jamais été une prison, a relevé le Président de l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens. Les ingénieurs représentent 80% des compétences tunisiennes qui quittent le pays pour aller exercer à l’étranger. Cette proposition de loi semble les cibler directement ».
Il sera, en outre, difficile de mettre en application une telle mesure dès lors que ce n’est pas par le biais de l’octroi de bourses ou de concours sur dossier mais par leurs propres moyens que les diplômés quittent le pays afin de décrocher des contrats de travail à l’étranger.
Il est, par conséquent, difficile de les identifier, de les comptabiliser afin de les contraindre ainsi à rembourser à l’Etat une partie des frais de leurs études universitaires.
Les solutions destinées à encourager les diplômés tunisiens à mettre leurs compétences au profit du développement social et économique de leurs pays existent pourtant. Elles ont été proposées par l’Institut tunisien des Etudes Stratégiques qui préconise non seulement de promouvoir les conditions de travail et d’améliorer les salaires en les alignant sur les compétences des diplômés qui ont fait de longues études dans des spécialités pointues et à forte valeur ajoutée mais d’encourager par ailleurs un climat d’investissement propice à la création de startups innovantes qui arrivent à concurrencer les plus grandes entreprises internationales.