Depuis les poursuites judiciaires et les arrestations d’influenceurs, tout le monde s’est tu, ou presque. Les internautes font de plus en plus attention avant la publication de contenus sur les réseaux sociaux.
La Presse — Compte tenu de la propagation de contenus jugés indécents sur les réseaux sociaux, le ministère de la Justice a mis en garde contre leur diffusion et annoncé des poursuites judiciaires. D’autant que ce phénomène a pris, ces dernières années, des proportions inquiétantes et risquait d’impacter le comportement de nos jeunes. Le message du ministère de la Justice a été bien clair. On ne badine pas avec les valeurs éthiques et toute infraction enregistrée à ce propos conduit inéluctablement à des poursuites judiciaires.
Tout le monde s’est tu !
La publication de ce communiqué a été le prélude à l’ouverture d’enquêtes judiciaires à l’encontre de ceux qui s’amusaient à longueur de journées à publier ou à partager intentionnellement des contenus de vidéos contraires aux bonnes mœurs et susceptibles d’impacter la conduite de nos jeunes. C’est la grande agitation dans les milieux des influenceurs et créateurs de contenus sur Instagram et TikTok à la fin de l’année dernière. Pris au dépourvu, certains d’entre eux ont été condamnés en première instance à des peines allant de 18 mois jusqu’à quatre ans et demi de prison, en application du Code pénal et du Code des télécommunications pour crimes moraux, atteinte aux bonnes mœurs, outrage public à la pudeur, cyberharcèlement sur les réseaux sociaux, et incitation de mineurs à la débauche.
Les avocats de certains créateurs de contenus ont interjeté appel et contesté les décisions prononcées à l’encontre de leurs clients poursuivis pour des contenus jugés attentatoires à la morale publique et aux bonnes mœurs. C’est ce qu’a déclaré à l’agence TAP, Me Ghazi Mrabet, ancien avocat de l’une des accusées devant la Cour de première instance. «La date des audiences en appel n’a pas toujours encore été fixée, mais il est possible que l’audience ait lieu la semaine prochaine pour son ancienne cliente et pour les autres personnes arrêtées, souligne-t-il dans une nouvelle déclaration accordée hier vendredi à notre journal. Selon lui, et depuis ces poursuites judiciaires et l’arrestation d’autres personnes, «Tout le monde s’est tu». Les gens font de plus en plus attention avant la publication de contenus sur les réseaux sociaux.
De son côté, Me Mehdi Louati estime qu’il est nécessaire de laisser la justice faire son devoir à l’égard des personnes qui enfreignent la loi sur les réseaux sociaux, qu’il s’agisse d’instagrameurs ou de créateurs de contenus ou autres. On peut avoir des opinions divergentes sur la base d’interprétations différentes, mais quand il s’agit de contenus publiés sur les réseaux sociaux constituant une flagrante atteinte aux bonnes mœurs, les textes de loi sont bien clairs et ne prêtent pas à équivoque. D’après l’article 226 du Code pénal, quiconque se sera, sciemment, rendu coupable d’outrage public à la pudeur est puni de six mois d’emprisonnement et de quarante-huit dinars d’amende. L’article 226 bis ajoute : «Quiconque porte publiquement atteinte aux bonnes mœurs ou à la morale publique par le geste ou la parole est puni de six mois d’emprisonnement et d’une amende de mille dinars».
Un message fort de dissuasion
Pourquoi a-t-on alors laissé traîner les choses et n’a-t-on pas appliqué ces textes de loi ? Me Mehdi Louati nous explique que le ministère public, représenté par le procureur de la République, peut décider du déclenchement d’une affaire pénale. C’est la règle dans la plupart des pays et non seulement en Tunisie, mais en matière d’application de cette loi, tout reste tributaire d’une certaine volonté politique. «On espère la libération de toutes les personnes arrêtées dans le cadre de ces affaires, mais il faut bien reconnaître que leur arrestation constitue un message fort à d’autres influenceurs pour rectifier le tir et se soumettre à la loi.
Il est à rappeler que suite au verdict rendu dans cette affaire, le porte-parole des tribunaux de première instance de Monastir et Mahdia, Farid Ben Jha, a déclaré, aux médias, que la justice a prononcé la peine maximale prévue par la loi. Il a indiqué que les accusés, tout comme le ministère public, peuvent interjeter appel. Ces poursuites ont, en tout état de cause, constitué un sérieux avertissement à l’endroit des exhibitionnistes de comportements contraire à la décence et aux bonnes mœurs.
Ces démarches judiciaires ont, quoi qu’il en soit, représenté un avertissement ferme à ceux qui adoptent des comportements indécents et contraires à l’éthique sociale. L’application ferme de la loi a ainsi rappelé à l’ordre ceux qui, en l’absence d’un cadre juridique bien approprié à l’utilisation des réseaux sociaux, se sont mués en modèles toxiques pour les jeunes, laissant planer de grandes menaces sur les valeurs morales de notre société.
Certes, des Tunisiens basés à l’étranger continuent à diffuser des vidéos au contenu indécent et contraire à l’éthique sur les réseaux sociaux. Mais attention, ils peuvent toutefois être poursuivis en justice selon la loi tunisienne. La notion de double nationalité n’est pas prise en compte dès qu’un citoyen tunisien foule le sol du pays. A cet effet, nos services de police sont habilités, selon des accords de partenariat ratifiés, à coopérer avec les bureaux de l’Organisation de police criminelle (Interpol) dans le cadre de l’ouverture de certaines enquêtes se rapportant à la publication de contenus indécents sur les réseaux sociaux, impliquant en particulier des enfants.