La Tunisie semble incontestablement sur la bonne voie vers l’indépendance énergétique, un objectif ambitieux, mais ne manquant pas, toutefois, de défis, dans le contexte actuel de changement climatique et de volatilité géopolitique.
La Presse — Dans un monde où l’autonomie énergétique devient un enjeu de souveraineté national majeur, la Tunisie devrait s’engager pour la consolidation de son indépendance énergétique, la diversification de ses sources d’énergie et l’augmentation de sa production énergétique interne.
Notre pays, grâce à ses efforts soutenus et à sa stratégie énergétique bien définie, se dirige avec assurance vers l’indépendance énergétique. En continuant sur cette voie, non seulement, il renforce sa souveraineté énergétique, mais joue également un rôle majeur dans la transition énergétique à l’échelle africaine et mondiale.
Quelles perspectives pour la souveraineté énergétique ?
La souveraineté se réfère à la capacité d’un pays à assurer son approvisionnement énergétique de manière autonome, durable, résiliente, qui réduit la dépendance aux importations et qui augmente sa résilience face aux chocs extérieurs.
En effet, la Tunisie a fait beaucoup de réalisations, et ce, dans l’énergie solaire, les énergies éoliennes… Elle a également mis en place une stratégie et une politique pour la souveraineté énergétique. Néanmoins, depuis la révolution, en 2011, la production nationale d’hydrocarbures a considérablement baissé à cause notamment de l’absence de nouvelles découvertes et de la lenteur de mise en exploitation des champs en cours de développement, du fait essentiellement de la situation économique et sociale particulière qui prévalait dans le pays. Sachant que la part de la production nationale d’hydrocarbures qui revient à l’Etat a une portée stratégique en termes de sécurité d’approvisionnement du pays.
Reste cependant que le niveau des réserves connues et exploitables décline régulièrement depuis le début des années 80. Il pose la question de la gouvernance de ce secteur vital et des réformes qu’elle implique.
Il y a également le retard enregistré dans la mise en œuvre de la transition énergétique devenue pressante, malgré les réformes. L’indépendance énergétique de la Tunisie a atteint environ 45% ces dernières années contre 81 % en 2010 et 91 % en 2000.
Dans un contexte sécuritaire régional incertain, et un contexte énergétique mondial en transition, notre production d’hydrocarbures a baissé de moitié en une décennie. Les efforts de mise en valeur des ressources d’hydrocarbures et de maintien des champs existants sont en berne depuis plusieurs années.
L’unique raffinerie du pays ne répond plus que partiellement et de moins en moins aux besoins du marché intérieur.
Chaînes d’approvisionnement du marché
Il est à noter que le marché tunisien est alimenté en énergie au moyen de trois chaînes d’approvisionnement : pétrole, gaz et énergie électrique. Deux principaux maillons composent ces chaînes : les sources d’approvisionnement de matières premières et de produits finis, d’une part, la logistique de transport, de stockage et de distribution des produits bruts ou finis, d’autre part. Les risques de rupture de ces chaînes concernent aussi bien les circuits intérieurs que les circuits d’importation et les deux principaux maillons de la chaîne.
Sécuriser les importations de gaz
Le contrat d’achat de gaz auprès de la Sonatrach prend fin en 2029. Au-delà de 2029, « nous n’avons pas actuellement de visibilité de la disponibilité et du prix du gaz algérien pour le marché tunisien du fait de la forte augmentation de la demande européenne depuis le conflit russo-ukrainien », expliquent les experts du secteur énergétique. Ils estiment qu’il est fortement recommandé d’engager des négociations avec la partie algérienne afin d’être fixé sur les disponibilités et sur le prix du gaz à importer. Par ailleurs, l’étude intitulée « La sécurité énergétique de la Tunisie à l’horizon 2030 », publiée par l’Ites, recommande la diversification des fournisseurs du gaz naturel importé.
L’Institut propose ainsi des mesures visant à doter la Tunisie d’un terminal GNL, relancer le projet d’interconnexion avec la Libye et doter le pays d’un secours de gaz naturel.
Il s’agit aussi de renforcer la capacité organisationnelle des parties prenantes. « Il est fortement recommandé que le Gouvernement se dote d’un ‘‘Système de management de l’énergie’’ (SME) pour accroître en particulier les chances de réussite dans l’implémentation de la Stratégie 2035. Pour ce faire, la norme ISO 50001-2018 propose un cadre accepté mondialement pour la gestion de l’énergie afin d’améliorer l’efficacité énergétique, de réduire les coûts et d’optimiser les performances économiques et environnementales». Ce cadre aide à instaurer une bonne «Gouvernance» et une «Transparence» appropriées, spécifiques au domaine de l’énergie.
Principales mesures sur la souveraineté énergétique
Lors d’un conseil ministériel tenu fin décembre 2024, des mesures ont été prises sur la souveraineté énergétique.
– Elaboration d’un nouveau Code des hydrocarbures
– La finalisation du Code des énergies renouvelables
– Le renforcement de la gouvernance financière des entreprises et des établissements publics
– L’élaboration d’un programme visant à accélérer le rythme de l’exploration dans le secteur des HC
– La réforme en profondeur du cadre réglementaire régissant les entreprises publiques opérant dans ce domaine en vue de leur conférer la flexibilité requise afin de mener à bien leurs missions et de s’adapter aux spécificités du secteur
– Le soutien renforcé aux investissements des entreprises dans le domaine des ER et de l’EE
– La mise à jour dans les meilleurs délais du décret relatif au Fonds de transition énergétique
– L’incitation soutenue de la production de l’électricité à partir de l’énergie solaire
– L’étude de la mise en œuvre des projets nationaux dans le domaine du raffinage et de la logistique pétrolière de manière à ouvrir des perspectives de développement de l’activité aux entreprises et d’encourager l’investissement