Accueil Culture Mariem Sayeh, actrice à La Presse : « Le lieu dans le film est un personnage à part entière »

Mariem Sayeh, actrice à La Presse : « Le lieu dans le film est un personnage à part entière »

Par notre envoyé spécial à Clermont-Ferrand Haithem HAOUEL

L’actrice Mariem Sayeh porte sur grand écran le court métrage « Bord à bord » de Sahar El Echi, qui fait son chemin, depuis sa première au Red Sea Festival en 2024, son Tanit de bronze raflé en compétition officielle et sa projection spéciale à la 47e édition du festival international des courts métrages de «Clermont-Ferrand » dans la section « Regards d’Afrique ». Prochain arrêt le Fespaco. Dans le cadre du plus grand festival de courts métrages au monde, entre réactions des spectateurs et brouhaha festif, la rencontre s’est créée.

La Presse — Depuis de nombreuses années, vous avez accumulé les courts et quelques longs métrages, en interprétant différents rôles. Cette aventure filmique semble être distinguée. L’est-elle vraiment ?

J’ai joué dans 15 films courts et longs, très exactement. « Bord à bord » me rappelle mon tout premier film long réalisé par Nasreddine Shili. J’avais le premier rôle aux côtés d’Atef Ben Hassine et Salha Nasraoui. Artistiquement, en tant qu’actrice, cette expérience récente m’a beaucoup rappelé l’ancienne, de par son casting, mes partenaires à l’écran, le tournage… Il y a des rappels dans la construction des personnages. La profondeur du personnage féminin dans le film de Sahar El Echi porte le film.

Qu’est-ce qui vous a attiré dans Mounira, le personnage principal féminin ?

Son existence dans un lieu complètement masculin. Sa condition sociale qu’elle n’a pas choisie, comme sa gargote… ce lieu difficile où elle vit, et qu’elle a hérité de son défunt père. Elle essaie de s’en sortir comme elle peut.

Selon vous, le film lève-t-il le voile sur une frange sociale qui n’est pas assez visible ?

Evidemment. Ce lieu, qui est une casse où on trouve des voitures délabrées, jetées, encastrées, est un lieu de vie. Une population y vit, avec des règles, des lois sauvages. Un univers à part. Cela dit, Mounira peut exister dans toutes les classes sociales masculines et patriarcales. Elle fait de la résistance, souffre des hommes qu’elle croise et qui tentent de l’écraser. Elle ne fait que survivre au quotidien en tant que femme. Le tournage s’est déroulé dans une vraie casse, le lieu dans le film est un personnage à part entière.J’ai dû m’immiscer un peu dans un endroit comme celui-ci, apprendre à faire des fricassés. J’ai fait en sorte d’interpréter Mounira avec un jeu minimaliste.

L’héroïne rencontre au gré de son quotidien deux hommes différents, qui vivent dans cette casse géante, broyeuse d’âmes et de vies. L’élan de liberté qu’elle recherche s’est déclaré vers la fin. Ces deux l’ont- ils propulsé vers sa liberté ?

Mounira a toujours été en quête de liberté. Elle les voyait souvent, c’est vrai mais ils ne sont pas en relation. Elle prend sa voiture, part, et ce départ laisse libre cours à de nombreuses interprétations. A Clermont-Ferrand, les gens nous arrêtaient dans la rue parce qu’ils tenaient à savoir où Mounira est partie. C’est une métaphore de la liberté, un clap de fin qui illustre ce moment vécu en solo. D’ailleurs, « Bord à bord », c’est mon 2e travail effectué avec une réalisatrice femme. Il y a une marge de confiance instaurée dès le départ entre nous. Une sensibilité réciproque, différente de celle ressentie avec un réalisateur homme. Sahar El Echi est talentueuse. Elle a une idée qu’elle tient à appliquer, patiente dans des conditions de tournage difficiles mais entourée d’une équipe technique extraordinaire.

entre le 31 janvier et le 8 février 2025, la réalisatrice et vous êtes présentes à la 47e édition du festival international des courts métrages de « Clermont-Ferrand », unique présence tunisienne cette année malgré la programmation extra – large. Comment se vit cette aventure ?

L’expérience est unique. C’est un festival classe A mais quand on y assiste, c’est un vrai festival de cinéma. Ce n’est pas une vitrine. La programmation extrêmement riche attire et la réaction du public après les projections est extraordinaire. C’est une ville festival et l’interaction autour du film et du cinéma se fait sans cesse partout pendant toute sa période. Cette réception du film, c’est ce qui séduit le plus.

Pouvez-vous nous faire un rappel de votre actualité et et nous dire s’il y a des projets en vue ?

J’ai créé mon propre monodrame, qui s’appelle « Mère Nature – Madre Natura » et j’ai eu une mention spéciale du jury suite à sa présentation italienne, à l’instant même où « Bord à bord » gagne le Tanit de bronze. (rire). Un moment unique. Le monodrame est expérimental pluridisciplinaire, fusionne danse, musique, cirque, et j’ai eu la possibilité de participer avec au festival international du monodrame de Turin. Je le reprends dans quelques semaines pour d’autres festivals et pour une représentation en Tunisie, bien sûr. La reprise de « Prometheus », un spectacle tuniso-italien, est pour bientôt. Je reste dans la recherche du pluridisciplinaire sur scène et j’assure les rendez-vous « Studio Fan » à l’Agora, une fois par mois.

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