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Son passage au Raja Casablanca a eu lieu sans emballement médiatique et, pourtant, cette reconnaissance sonne comme une distinction pour un entraîneur émérite et influent qui a marqué de son empreinte ses différents passages dans des clubs tels que l’US Monastirienne et le Raja lors d’un premier passage.
La Presse — En attendant le graal ultime, la consécration, sous forme d’appel d’une nation pour y officier en tant que sélectionneur par exemple, Lassâad Chebbi, alias Jarda, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a récemment été rappelé par le Raja Casablanca pour veiller sur l’équipe première aux côtés de son adjoint Khaled Mouelhi. Ainsi, après un bail au Raja marqué par deux trophées glanés en 2021, Jarda retourne dans le giron du club casablancais pour y revêtir la casaque d’homme providentiel, l’homme de la situation tout court. A 63 ans donc, Jarda revient au Raja dans un contexte délicat, au chevet d’un club historique classé 7e de Botola Pro, alors qu’auparavant, en C1, cette institution, qui peine à redorer son blason et à retrouver son lustre d’antan, s’est arrêté à la phase des groupes, se classant 3e de sa poule. Et après avoir « consommé » trois techniciens en à peine sept mois, c’est un Raja en quête de stabilité qui a ainsi jeté son dévolu sur un coach méritant. Le défi est donc de taille pour l’entraineur tunisien, soit reconquérir les sommets avec un club qui ne peut se limiter à faire de la figuration, tant le Raja se nourrit de titres et de consécrations. Connu pour sa rigueur et pour la discipline de fer qu’il instaure, Lassâad Chebbi a rarement échoué aux manettes des clubs qu’il a pris en main. Les succès des Bleus du Ribat ou ceux du Raja justement, lors de son premier passage, portent sa patte alors que ses qualités humaines aidant, ont constitué la base de sa réussite. Voilà tout, et on a déjà tout dit ou presque sur un technicien volontiers sous-coté, mais un bonhomme dépeint come un exemple de sérieux et de minutie. Aujourd’hui, ceux qui l’ont côtoyé en parlent avec enthousiasme comme un gagnant dont les victoires sont celles de la simplicité avant tout. Avec lui, il n’est pas seulement question de gagner avec la manière, mais il est surtout question de mettre en relief son comportement dans la victoire, ce qui sublime encore plus ses succès. Et là, on devrait être tous d’accord, car pour peu que l’on perçoive le football comme un important vecteur de valeurs positives, on ne peut qu’être admiratif du personnage. Le bon sens. Mettre les individualités au service du collectif avec les solutions tactiques les plus logiques, tout en créant une atmosphère positive dans le vestiaire, ce qui favorise un climat de confiance. Voilà la méthode Chebbi, sa ligne de conduite, sa marche à suivre pour faire son chemin et mener ses troupes vers les sommets. C’est ainsi qu’il a, par exemple, façonné « son » USM en 2019, et, pour toucher au but, pas besoin d’être martial, de s’en prendre aux adversaires ou aux arbitres de n’importe quelle façon, ou pire, inventer des ennemis invisibles.
Une singularité qui porte ses fruits
Aujourd’hui, tous ceux qui le connaissent le diront. Avec Chebbi aux manettes, tout tourne autour du vestiaire. Ami des joueurs mais pas trop, abordable, leur laissant l’autonomie nécessaire pour se responsabiliser, il représente à la fois une figure paternelle mais supérieure. Bref, avec lui, c’est du sérieux, du respect et de l’amitié, faisant de sa gestion de groupe une marque de fabrique peu commune et forcément distincte. Une recette qui fonctionne partout où il passe. Un vestiaire jamais gangrené par les querelles intestines et une main de fer dans un gant de velours. Et cette sérénité qu’il sait insuffler tout naturellement au sein du club où il travaille est une des clés des succès de Jarda. Aussi, si l’on a parlé du vestiaire, on peut aussi aborder les relations presse, par exemple quand il veillait sur les destinées de l’Etoile du Sahel en 2022 et fut débarqué suite à son cinglant revers (4-2) face à…l’USM. Jamais sur la défensive devant les journalistes, il n’a quasiment jamais fait office de paratonnerre devant la déferlante médiatique et arrive plutôt à calmer la tempête d’un haussement de sourcil qui vaut plus que mille paroles. Enfin, jamais de mémoire, il ne crée de tensions inutiles avec les équipes rivales. Bref, il n’a pas besoin de ça pour motiver ses troupes, et avec lui, vous pouvez oublier les climats délétères car Lassâad Jarda ne mange pas de ce pain-là ! Après avoir sillonné les quatre coins du monde, roulant sa bosse un peu partout, de l’Autriche au Qatar, en passant par la Thaïlande, le Maroc et la Libye, Jarda est ainsi devenu un parfait ambassadeur tunisien, redorant, avec d’autres confrères, l’image d’un football qui se noie de plus en plus dans ses problèmes et polémiques. Aujourd’hui, en poste au Raja, ses faits d’armes aidant, il a les coudées franches pour définir les contours du futur Raja. D’ailleurs, déjà, ces derniers jours, il commence à anticiper le mercato estival afin de ramener à terme le Raja Casablanca à sa position naturelle. Concrètement, il a fixé son premier choix sur le milieu défensif sénégalais Abdou Seydi, pivot et défenseur axial du Club Athletique Bizertin. Redevable de deux ans de contrat aux Cabistes, l’international sénégalais sera vraisemblablement le premier recrutement estival du Raja, en attendant la grande lessive et le remue-ménage qui s’annoncent derrière avec pour marionnettiste le technicien-manager, Lassâad Chebbi.