Accueil Culture Ya’aburnee : Une exposition de Monia Ben Hamouda : Interroger l’amour, le sacrifice et la mémoire

Ya’aburnee : Une exposition de Monia Ben Hamouda : Interroger l’amour, le sacrifice et la mémoire

Avec le vernissage de l’exposition Ya’aburnee de l’artiste Monia Ben Hamouda, on découvre une œuvre et un univers atypiques qui plongent au cœur des thèmes universels de l’amour, du sacrifice et de la mémoire collective. Depuis le 25 février, à la galerie Selma Feriani, un dialogue entre l’art et la culture se dévoile à travers une installation multi-sensorielle intrigante, à la fois visuelle et sonore, qui questionne notre rapport à l’histoire et au langage.

Le titre Ya’aburnee, qui signifie littéralement « tu m’enterres » en arabe, évoque une idée profonde du sacrifice désintéressé, celle d’un être cher souhaitant survivre à l’autre. A travers cette exposition, Monia Ben Hamouda explore ces concepts de manière subtile et émotionnelle. Les œuvres de l’artiste mettent en lumière l’amour infini et le lien inexorable entre l’individu et son héritage, tout en explorant les complexités du langage, de l’histoire et de la compréhension humaine.

Lauréate du prestigieux prix Maxxi bvlgari en 2024, Ben Hamouda est connue pour ses installations audacieuses et son approche poétique de l’art contemporain. Dans cette exposition, l’artiste investit les trois étages de la galerie Selma Feriani , fusionnant peinture, sculpture et pièces sonores pour créer un environnement visuel et auditif où l’on se trouve constamment dans un état de remise en question.

L’aspect sonore de l’exposition se distingue par sa capacité à capturer le paysage auditif spécifique des pays arabes. Des enregistrements de deux mosquées, entrelacés de chants et d’annonces publiques urgentes, modifient l’expérience de l’espace en transformant l’appel à la prière en une mélodie inquiétante. Les basses vibrations résonnent dans la galerie, enveloppant le visiteur et le poussant à une réflexion profonde sur le rapport entre la spiritualité et l’urgence de l’information dans les moments de crise.

Au centre de l’exposition se trouvent neuf tableaux iconiques qui incarnent une réflexion sur la construction de l’histoire et le rôle de l’art dans cette narration. Certains sont disposés au sol, semblables à des tombeaux, avec des touches de peinture jetées sur la toile, créant une texture vivante qui évoque les odeurs familières de la terre d’un pays. Ces œuvres symbolisent le lien profond que l’artiste entretient avec sa patrie, même si celle-ci ne l’a pas vue naître.

S’inspirant d’artefacts anciens, tels que la pierre de Rosette, Monia Ben Hamouda imagine des récits alternatifs et remet en question notre compréhension des civilisations anciennes. L’artiste interroge le rôle du langage dans la transmission des savoirs et la manière dont celui-ci est façonné par des interprétations multiples et parfois inaccessibles. Les œuvres font allusion à des formes d’art «préhistoriques», comme les peintures rupestres, dans un langage visuel qui reste à découvrir.

À travers ses pièces, Monia Ben Hamouda fait écho au philosophe Abdelkebir Khatibi et sa notion de « langage pluriel », un langage qui transcende les identités culturelles binaires. L’artiste développe ainsi un « langage sculptural », où la matérialité de ses œuvres et la force des inscriptions anciennes créent un dialogue entre le passé et le présent.

Ce langage visuel, à la fois reconnaissable et mystérieux, reflète la puissance de la mémoire et du langage comme monuments qui, tout en étant enracinés dans le temps, échappent à une compréhension totale.

L’exposition Ya’aburnee de Monia Ben Hamouda, commissariée par Anissa Touati, est un point de vue qui met en lumière les tensions entre héritage culturel, histoire, et modernité, une installation qui pousse le spectateur à une introspection sur sa propre relation à l’espace, au temps, et à la mémoire.

Charger plus d'articles
Charger plus par Asma DRISSI
Charger plus dans Culture

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *