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On peut dire que la musique et les mathématiques ont une relation forte et rapprochée. Depuis l’Antiquité, les deux disciplines ont cheminé ensemble établissant une liaison étroite. Pythagore a même considéré que la musique est une science au même titre que l’astronomie ou les mathématiques. Les liens entre les deux domaines se sont fortement développés, les chercheurs ont constaté le rapport étroit des notes de musique et de calcul (notes, fréquences, quintes, la gamme, etc.), bref ce que les musicologues, les historiens de la musique, les musiciens appellent la gamme pythagoricienne.
Au cours de l’histoire, l’évolution technologique a toujours accompagné la musique quelle que soit sa forme, classique, romantique, élitiste, populaire, jazz, rock, folk, etc. Bach (1685-1750), par exemple, s’amusait à utiliser des procédés mathématiques pour écrire ses fugues. La musique, contrairement aux autres arts, se traduit précisément en équations et en graphiques. Dans cette histoire commune, l’IA et la musique trouvent un terrain fertile pour s’entendre et se développer.
Au XXe siècle, beaucoup de musiciens-chercheurs d’avant-garde en matière acoustique (Ligeti, Schaeffer, Pierre Henri, Varese…) ont développé des musiques (électroacoustique, concrète…) à base de calculs mathématiques, de physique ; Bartok a utilisé le nombre d’or pour structurer ses compositions, un peu plus tard, le compositeur et scientifique grec Yannis Xenakis a créé une musique nouvelle constituée de masses sonores élaborant une composition entièrement déduite de règles et de procédures mathématiques et a même inventé des algorithmes pour tenter de représenter musicalement les notions de hasard et de probabilité.
Jusque-là, lors de toutes les recherches au cœur de la création et sur tous les fronts, on trouve l’homme derrière la machine. Et l’IA sur ce terrain qu’a-t-elle ajouté dans ce mouvement de recherche perpétuelle ?
On le disait, l’IA a bouleversé le domaine, en créant des musiques nouvelles, en «générant» des créations à partir de données existantes, en inventant une musique originale, apportant des solutions ( nettoyer ou restaurer des passages, des notes ou un simple son par exemple). Bref, dans ce sens, l’IA représente un développement de systèmes d’intelligence générale qui peuvent être utilisés pour la résolution de problèmes musicaux de tous genres imitant l’intelligence humaine. Actuellement, tout le monde parle des «intelligences artificielles» qui génèrent de la musique ou des chansons. Ces productions sont-elles bien tolérées et acceptées par les professionnels ?
La dernière décennie, le monde musical a vécu une croissance notable grâce au streaming, aussi le secteur voit poindre de nouvelles menaces liées à l’IA générative. Au centre de ces menaces se trouve le travail des musiciens. Exemple : la musique utilisée dans les publicités (un réservoir financier important) ou même dans les films qui est composée par des personnes. En plus de la pub, il faut ajouter les jingles ( les courtes et indescriptibles musiques qui annoncent ou clôturent une émission, un feuilleton, etc.)
Aujourd’hui, avec l’essor hallucinant de l’IA, ces sons peuvent être créés à un coût bien moindre et à un rythme plus rapide, une bonne partie des créateurs crient au loup, dénonçant la banalisation de la création. De plus, les applications de l’IA, une fois arrivées et appliquées, mettraient de nombreux créateurs au chômage. De leur côté, les chercheurs, informaticiens, ingénieurs, technocrates… affirment que ceux qui s’opposent aux avancées de l’IA font partie du passé.