Accueil A la une Du malouf aux sonorités contemporaines : le festival, miroir de l’âme musicale tunisienne

Du malouf aux sonorités contemporaines : le festival, miroir de l’âme musicale tunisienne

À la veille de l’ouverture, demain samedi 8 mars 2025, à Tunis, de la 23ᵉ édition du Festival de la Chanson Tunisienne (8-11 mars 2025), la scène musicale au grand complet s’apprête à célébrer cet événement qui a façonné l’identité musicale du pays. Malgré une interruption de douze années, il a tenté d’insuffler une nouvelle âme à la chanson tunisienne, née au croisement des notes, des paroles, des compositions, des arrangements et des voix. Ce festival porte en lui non seulement la mémoire d’hier et d’aujourd’hui, mais aussi l’ambition de redonner de nouvelles ailes à la chanson tunisienne.

Repères clés : De la naissance à la résurgence

Une nouvelle page s’ouvre avec cette 23ᵉ édition en 2025, poursuivant une histoire qui remonte aux années 1960, lorsque l’idée d’un festival dédié à la chanson tunisienne a commencé à germer. Plusieurs initiatives ponctuelles ont alors vu le jour, à commencer par le festival « Saliha » initié par la Radio nationale, puis le Festival Ali Riahi en 1979 et les « Soirées de Carthage ».
De nombreuses sommités musicales ont joué un rôle de premier plan, notamment Ahmed El Ouafi et Salah El Mehdi. En 1972, les clubs de « La Jeunesse Musicale » ont vu le jour, marquant un tournant dans la structuration de la scène musicale. En 1986, la « Semaine de la Musique Tunisienne » est lancée, rassemblant artistes, poètes, musiciens, chanteurs, compositeurs et autres acteurs du secteur. L’année suivante, en 1987, le maestro Fethi Zghonda crée la première édition du « Festival de la Musique Tunisienne », qu’il dirige jusqu’à la 8ᵉ édition en 1994 (à l’exception de 1992, sous la direction de Khalil Mahfoudh).
Depuis, plusieurs grands noms ont dirigé le festival : Feu Ahmed Achour (9ᵉ édition, 1996), Mohamed Boudhina (11ᵉ édition, 1999), Riadh Marzouki (12ᵉ édition, 2000), Abdelkrim Shabou (13ᵉ édition, 2001), Hamadi Ben Othman (14ᵉ édition, 2002), tandis que Sonia Mbarek en a pris la direction de la 16ᵉ à la 19ᵉ édition (2005-2008). L’année 2008 a marqué le début d’une longue pause, qui a duré jusqu’en 2020.
Il a fallu attendre 2021 pour voir le festival renaître sous le nom de « Festival de la Chanson Tunisienne » avec une 20ᵉ édition marquant son grand retour. Après une nouvelle pause en 2022, une 21ᵉ édition est organisée en 2023 sous le signe des retrouvailles, établissant un lien entre passé et présent. En 2024, la 22ᵉ édition s’inscrit dans un contexte particulier, marqué par les événements tragiques à Gaza, conférant au festival une dimension engagée.

Une 23ᵉ édition sous le signe du renouveau

L’édition 2025, placée sous le thème « La Tunisie chante », ambitionne d’apporter un nouvel élan à la chanson tunisienne, en valorisant son héritage et en s’inspirant des expériences passées. Elle met en avant des jeunes talents et des artistes confirmés, explorant des esthétiques musicales variées.
Parmi les nouveautés, les « open mic », initiés dès le 28 février dernier dans les 24 gouvernorats du pays, ont permis d’ouvrir la scène à des voix plurielles. Organisés avec la participation des Instituts supérieurs de musique et de danse, des conservatoires, des professionnels du secteur et des amateurs émergents, ces sessions ont révélé des talents porteurs d’un héritage musical vivant et d’une créativité prometteuse.
À travers tout le pays, cette initiative a permis d’entendre des œuvres mêlant tradition et modernité : du malouf aux sonorités du oud, du qanun et du violon, en passant par des fusions contemporaines intégrant batterie, guitare, orgue et piano. Cette pré-ouverture a contribué à rapprocher la chanson tunisienne de la jeunesse, garante de sa pérennité.
Cette orientation s’inscrit dans la stratégie du ministère des Affaires culturelles, illustrée par le lancement, fin 2024, d’une nouvelle tradition : le rendez-vous mensuel « Ain Mhabba », conçu pour raviver la chanson tunisienne sous toutes ses formes et expressions.

Repenser l’avenir : Le festival, tremplin pour la chanson tunisienne

À la veille de l’ouverture officielle, une rencontre a été organisée le 6 mars 2025, dans l’ambiance ramadanesque du palais « Ennejma Ezzahra » à Sidi Bou Saïd. Artistes, créateurs et professionnels y ont échangé sur l’avenir de la chanson tunisienne, mettant en lumière les défis liés à l’interprétation vocale et instrumentale, ainsi qu’aux moyens de soutenir la création musicale tunisienne face à un paysage de plus en plus globalisé.
Dans cette continuité, une rencontre intitulée « Le festival et après ? » se tiendra le 13 mars. Elle constituera un espace de réflexion sur les perspectives futures du festival, son fonctionnement et son rôle en tant que tremplin pour les auteurs, compositeurs, arrangeurs et interprètes tunisiens. Cette discussion permettra de nourrir les débats sur les orientations à redéfinir pour assurer la pérennité de cet événement et offrir à la chanson tunisienne de nouveaux horizons.
De sa naissance à sa résurgence, le Festival de la Chanson Tunisienne a su inscrire son empreinte dans l’histoire musicale du pays, malgré les aléas. Son véritable souffle réside désormais dans son avenir, qui dépend d’une vision stratégique et renouvelée. Offrir à la chanson tunisienne un espace d’épanouissement, de réinvention et de transmission est un défi majeur, porté par ceux et celles qui lui donneront demain de nouvelles ailes, aux couleurs d’antan et au gré du temps.

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