
Les stations de dessalement d’eau de mer qui ont vu le jour au cours de cette dernière décennie tombent à point nommé, suite à leur entrée en exploitation pour résoudre une partie du problème d’accès de la population tunisienne à l’eau, notamment dans les régions intérieures. Mais beaucoup d’interrogations restent suspendues: quelles sont les villes réellement desservies et quel est le tarif final d’accès à l’eau traitée?
A l’ère de la baisse des ressources en eau en Tunisie et dans de nombreux pays du monde, des solutions alternatives ont émergé pour couvrir les besoins de la population en eau potable. Parmi ces solutions, les stations de dessalement pour le traitement des eaux de mer comme celle qui a ouvert ses portes l’été dernier à Sfax, région particulièrement affectée suite à l’assèchement des barrages, mais aussi pour le grand bonheur des villes environnantes, sans doute.
Comme précédemment dans d’autres régions, à l’instar de Gafsa et Gabès. Un état des lieux est devenu nécessaire pour connaître quels sont les enjeux actuels et les solutions apportées pour écarter le spectre de la soif de ces régions. Pour savoir aussi quelles sont celles qui vont réellement en bénéficier, dans le cadre de la stratégie nationale pour une répartition plus équitable des ressources en eau ?
On a sollicité Dr Raoudha Gafreg, experte internationale dans le domaine de la gestion intégrée des ressources en eau, pour éclairer notre lanterne à ce sujet, en vain, étant en déplacement et indisposée à répondre. Elle a notamment axé une réflexion il y a 2 ans autour d’une proposition de plan de sauvetage face au stress hydrique «historique et préoccupant qu’endure notre pays depuis plusieurs mois, les cris d’alarme se sont multipliés, appelant à une gouvernance différente de nos ressources en eau et à une meilleure gestion de la crise».
En 2025, la Tunisie intensifie son traitement de l’eau de mer en réponse à une pénurie croissante d’eau douce marquée par le stress hydrique. La Tunisie est confrontée à un stress hydrique sévère, avec une disponibilité en eau bien en dessous du seuil critique. Le changement climatique et l’augmentation de la demande en eau exacerbent ce problème.
Une solution stratégique envisagée depuis 2015 par les experts en eau, pour pallier le déficit pluviométrique et, par conséquent, la baisse des ressources en eau des barrages d’année en année a été d’appeler à recourir au dessalement de l’eau de mer. Depuis lors, et notamment ces 5 dernières années, des avancées notables dans différentes régions du pays en matière de construction de projets hydrauliques de dessalement de l’eau de mer ont émergé, avant d’être enfin inaugurés et entrer en exploitation.
Le dessalement de l’eau de mer est devenu une composante essentielle de la stratégie tunisienne pour sécuriser l’approvisionnement en eau potable. Des projets de stations de dessalement sont en cours de développement, notamment à Sousse où le taux d’avancement des travaux de construction de la station de dessalement d’eau de mer à Sidi Abdelhamid avait déjà atteint 60 % il y a 2 ans, selon le directeur du projet Moncef Amara.
Mais aussi à Gabès avec un taux d’avancement aussi important, sans parler du premier du genre qui a ouvert ses portes à Djerba en 2017 ou celui plus récent de Sfax. Le dessalement de l’eau de mer par voie thermique, grâce à l’énergie solaire inventée par des compétences 100% tunisiennes a connu un succès certain à Zarzis et bénéficié a la filière agricole. Toutefois d’autres experts en eau comme Mohamed Salah Glaied ont averti il y a 2 ans sur la sévérité du stress hydrique qui s’aggrave encore et qu’il faudrait rationaliser notamment la consomation de l’eau. Alors la stratégie «eau 2050» est venue tracer de nouveaux objectifs plus pragmatiques.
Stratégie «Eau 2050»
Selon l’étude «Eau 2050», la Tunisie prévoit d’augmenter significativement sa capacité de dessalement d’eau de mer d’ici 2050. La modélisation hydro-économique a tablé sur un volume de dessalement d’eau de mer mobilisé à hauteur de 127 Mm3 (correspondant à une capacité installée de 475.000 m3/jour, soit 174 Mm3), alors qu’il s’avère que la planification de la Sonede va aller au-delà pour atteindre 265 Mm3 à l’échéance 2050.
Parmi les autres mesures, en parallèle du dessalement, la Tunisie investit dans la réutilisation des eaux usées traitées et dans l’amélioration de l’efficacité de l’irrigation. Le ministère de l’Agriculture œuvre à exécuter un plan de gestion de l’eau pour la période 2026-2030, axé sur la valorisation des eaux pluviales et traitées en agriculture, l’adoption des techniques modernes d’irrigation et la sensibilisation à la rationalisation de l’eau. Le 21 mars dernier, à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau, Abdallah Rabhi, expert international en gestion des ressources en eau, a rappelé l’importance de sensibiliser les citoyens à l’exploitation durable des ressources hydriques.
En résumé, le traitement des eaux de mer est une priorité pour la Tunisie en 2025 et au-delà, afin de garantir un approvisionnement en eau durable pour sa population et son économie.