
Le Conseil oléicole international prévoit que la Tunisie deviendra en 2024-2025 le troisième producteur mondial d’huile d’olive, avec un rendement estimé à 340 000 tonnes. Cependant, cette production génère également une quantité importante de déchets. Plutôt que de les laisser inutilisés, certains acteurs innovants ont trouvé des solutions pour les transformer en ressources utiles.
C’est le cas de Yassine Khelifi, ingénieur et fondateur de Bioheat, une start-up tunisienne lancée en 2022. Ayant grandi dans une famille d’agriculteurs, il a observé dès son enfance les méthodes traditionnelles des ménages ruraux qui brûlaient les résidus d’olives pour cuisiner ou se chauffer. C’est ainsi qu’il a eu l’idée de transformer ces déchets en énergie durable. Son objectif : “Transformer quelque chose de sans valeur en richesse”.
Après plusieurs années de recherches, Khelifi a mis au point une machine qui compresse les résidus d’olives en briquettes sèches à faible teneur en humidité (8%), ce qui permet de réduire les émissions de carbone par rapport au bois de chauffage traditionnel. Ces briquettes sont ensuite utilisées comme source de chaleur dans des restaurants, maisons d’hôtes, écoles, mais aussi exportées en France et au Canada, où elles rencontrent un succès croissant.
Le procédé de fabrication est simple : les déchets d’olives sont collectés, compressés et séchés avant d’être emballés. Les résultats sont prometteurs. Selon Khelifi, sa production de briquettes permet de réduire les coûts de chauffage d’un tiers pour les consommateurs tunisiens, tout en offrant une solution écologique. Un propriétaire de maison d’hôtes a confirmé que l’utilisation des briquettes de Bioheat avait diminué sa dépendance au bois de chauffage et réduit son empreinte environnementale.
En Tunisie, où la déforestation est une problématique croissante, cette initiative constitue une alternative plus respectueuse de l’environnement. En outre, elle contribue à diminuer la dépendance du pays aux importations d’énergie, qui représentent plus de 60 % de ses besoins.
Cependant, malgré l’innovation de son produit, Khelifi a dû faire face à des défis, notamment le financement et des prêts bancaires à taux d’intérêt élevés. Mais sa détermination à “laisser une marque dans la transition énergétique de la Tunisie” reste intacte. Son ambition va au-delà des frontières tunisiennes : “J’espère que Bioheat pourra s’étendre à l’échelle mondiale.”
Le recyclage des déchets d’olives, une ressource abondante mais sous-exploitée, représente un réel potentiel pour protéger l’environnement, créer des emplois et diversifier les sources d’énergie du pays. Selon l’expert en développement rural Noureddine Nasr, la réutilisation de ces déchets pourrait également atténuer les pénuries de carburant et de gaz en hiver, notamment dans les régions les plus touchées de la Tunisie.
La Presse avec AFP