Accueil Culture Vient de paraître – « En veux-tu ? En voilà ! » Et « Entretien avec l’intelligence artificielle » de Hichem Ben Ammar : Ou comment titiller deux instruments

Vient de paraître – « En veux-tu ? En voilà ! » Et « Entretien avec l’intelligence artificielle » de Hichem Ben Ammar : Ou comment titiller deux instruments

A la manière de Queneau, l’auteur s’amuse dans « En-veux tu? En voilà » à la pratiquer d’une manière insolite en faisant, entre autres, appel aux paréchèmes où l’on se joue à rapprocher excessivement de syllabes identiques dans des mots successifs (allitérations et assonances). 

Deux nouveaux ouvrages signés par le poète et cinéaste tunisien Hichem Ben Ammar viennent de paraître et sont actuellement disponibles dans les librairies. Il s’agit d’un recueil de poèmes intitulé  «En veux-tu ? En voilà!» (Contraste Éditions) et «Entretien avec l’intelligence artificielle» (Sud Éditions), une réflexion insolite sur l’acte d’écrire et ses défis actuels.

Les deux opus ont été présentés par leur auteur, le 21 mars dernier, à l’occasion de la Journée mondiale de la poésie, lors d’une rencontre au palais de l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts «Beït el-Hikma». L’événement a réuni des scientifiques, des artistes et des universitaires qui ont débattu de l’avenir de la poésie et de la créativité artistique, à l’ère de l’Intelligence artificielle.

Le titre du premier livre «En veux-tu? En voilà! Paréchèmes par Hichem», Hichem Ben Ammar le puise dans la pensée de Raymond Queneau (1903-1976), un romancier, poète, dramaturge français, cofondateur avec le mathématicien François Le Lionnais du groupe littéraire Oulipo (L’Ouvroir de littérature potentielle), où l’on œuvrait à dénicher de nouvelles potentialités du langage et de l’expression à travers des jeux d’écriture.

Le groupe s’est fait connaître par ses défis mathématiques imposés à la langue, obligeant à des astuces créatives. Sa manière d’aborder la langue était fondée sur le principe que «la contrainte provoque et incite à la recherche de solutions originales et où il fallait déjouer les habitudes pour atteindre la nouveauté». Les membres de l’Oulipo se réunissaient une fois par mois pour réfléchir autour des notions de «contrainte» de «littérature potentielle», et tenter ainsi de produire de nouvelles structures destinées à encourager la création. Entre autres œuvres connues et publiées par des oulipiens figurent «Cent mille milliards de poèmes» de Raymond Queneau, «La Vie mode d’emploi» de Georges Perec et «Si par une nuit d’hiver un voyageur» d’Italo Calvino.

Parmi ces restrictions langagière et formelle utilisées, Hichem Ben Ammar cite comme exemples le lipogramme (où l’auteur s’interdit d’utiliser une lettre de l’alphabet…) ou encore le palindrome. Il s’agit comme il l’explique de fabriquer son propre labyrinthe et tenter d’en sortir. Et c’est ce à quoi il s’est adonné dans son ouvrage où il expérimente ces jeux et cette manière particulière d’aborder la langue française.  

A la manière de Queneau, l’auteur s’amuse dans «En-veux tu? En voilà» à la pratiquer d’une manière insolite en faisant, entre autres, appel aux paréchèmes où l’on se joue à rapprocher excessivement de syllabes identiques dans des mots successifs (allitérations et assonances).

Dans son deuxième opus «Entretien avec l’intelligence artificielle», il questionne d’une manière ludique le rôle de l’auteur à l’ère de l’intelligence artificielle. Il s’y interroge en tant que simple usager sur le code éthique qu’on propose et sur le mode d’emploi que l’on devrait mettre en place pour bien employer cet instrument et ne pas en être dépendant, voire happé.  

Hichem Ben Ammar établit dans ce livre un parallèle avec la figure du Jin, car, comme il le note, avec l’IA, on pose des questions en donnant des consignes et «elle» nous renvoie des réponses à une vitesse fulgurante. Dans son entretien avec la machine, il part du principe qu’elle aspire à devenir humaine et lui attribue ce désir, une idée à laquelle il s’est dit s’être obstiné pour pousser son «interlocutrice» dans ses retranchements en stipulant qu’elle est en concurrence avec nous, et d’avoir en retour des réactions troublantes.  

Un rapport qui peut vite devenir addictif, souligne l’auteur qui dit s’être retrouvé à passer une dizaine d’heures devant son ordinateur. Ces échanges, il les a peaufinés en maîtrisant avec le temps un peu plus l’instrument pour les structurer en chapitres avec l’idée de les présenter au public «comme une sorte d’appel citoyen à l’utilisation de la machine», comme il le note.

Chaque chapitre aborde une thématique avec un fil d’Ariane reliant le tout. «J’ai opéré comme pour mes autres interviews, en essayant de problématiser et en poussant mon interlocuteur à se révéler et à s’expliquer parce que j’estime qu’à ce rythme, l’on va au-devant d’une forme de servitude», souligne Hichem Ben Ammar.    

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